Librement inspiré de son roman éponyme par l’auteur devenu scénariste, qui dit lui-même avoir fait œuvre de création plutôt que d’adaptation, cette BD fait la part belle au dessin, magique et expressif de Sorel. La mise en page est rythmée, alternant les grandes pages d’illustrations donnant à voir, à ressentir, à comprendre et des pages au découpage plus classique poursuivant la narration au fil de dialogues ciselés. Les réminiscences de l’écrivain sont présentées en couleurs sépia qui leurs conviennent à merveille et tranchent avec la luxuriante végétation et les couleurs présentes du Brésil. On suit donc l’écrivain dans son lent détachement, son glissement vers le renoncement jusqu’aux trois pages finales, le long d’un tunnel blanc, dont on ne sait s’il est commencement ou fin. Superbe ouvrage, témoin d’une période et de la fin d’un monde surement, vu au travers des yeux et du cœur d’un homme sensible et pessimiste ; les évènements récents montrent que l’humanité apprend peu de son histoire et des monstruosités qui la parsème, et que le désespoir de l’écrivain est finalement bien compréhensible.