Retour vers le passé : La Corde (1948)

 

REALISATEUR

Alfred Hitchcock

SCENARISTES

Arthur Laurents et Hume Cronyn, d’après la pièce de Patrick Hamilton

DISTRIBUTION

James Stewart, John Dall, Farley Granger, Cedric Hardwicke…

INFOS

Long métrage américain
Genre : thriller
Titre original : Rope
Année de production : 1948

La Corde s’ouvre sur une vue plongeante sur une calme rue new-yorkaise. La caméra se déplace et s’arrête devant des fenêtres aux rideaux tirés malgré le beau temps. Un cri étouffé retentit. Le regard du spectateur pénètre alors dans cet appartement qui sera le décor unique du premier long métrage en couleur d’Alfred Hitchcock pendant les 75 minutes qui suivent. Un meurtre vient d’être commis…un jeune homme a été étranglé par deux de ses camarades de classe à l’Université de New-York. Pourquoi ont-ils commis ce geste ? Parce qu’ils le pouvaient, “tout simplement”…

Sûr de leur supériorité intellectuelle, Brandon Shaw et Phillip Morgan sont convaincus que le meurtre peut être une forme d’art et que leur place dans la société leur confère le droit de se débarrasser de ceux qu’ils jugent inférieurs. Brandon est cynique, arrogant et est tellement certain d’avoir commis le meurtre parfait qu’il a organisé une mise en scène macabre. En attendant de pouvoir se débarrasser du corps, les deux hommes le cachent dans un coffre dans le salon et préparent un dîner auxquels sont conviés le père et la petite amie de la victime ainsi que Rupert Cadell (James Stewart), leur ancien professeur avec lequel ils avaient discuté des théories de Nietzsche…

 

 

La dynamique entre Brandon et Phillip, avec ce sous-entendu homosexuel finement joué par Hitchcock et ses scénaristes (la situation était, paraît-il, plus directe dans la pièce de théâtre dont le film s’inspire), est d’emblée intéressante. La différence de comportement entre les deux “esthètes du crime” (le premier est très calme, sûr de lui; le second est beaucoup plus nerveux et cela ne va pas aller en s’arrangeant) est l’un des moteurs du suspense et de la tension de la représentation qui s’ensuit.

“Représentation” car la manière dont Hitchcock a décidé de filmer cette histoire rend d’une certaine façon hommage à ses racines théâtrales. La Corde est célèbre pour son tour de force technique, huit plans séquences d’environ 10 minutes raccordés entre eux par des coupes plus ou moins discrètes. On assiste alors à une véritable pièce dans un endroit confiné, mais les mouvements de caméra du Maître du Suspense donnent énormément de fluidité à l’ensemble.

 

 

La Corde ne manque en effet pas d’excellentes idées de mise en scène qui exploitent idéalement toutes les possibilités du décor sans perdre de vue le fameux coffre et son contenu. Et plus on s’approche de la révélation finale, plus l’atmosphère est tendue, ce qui passe surtout par des attitudes, des regards, quand le personnage campé par James Stewart se rend progressivement compte que quelque chose ne va pas chez ses anciens élèves.

Pendant longtemps, La Corde a été réduit à son statut d’“expérimentation”. Peut-être déçu par la réception de son film à l’époque (les critiques étaient partagées et cela n’a pas été un gros succès financier), Alfred Hitchcock a en parlé comme d’un “truc” pendant ses entretiens avec François Truffaut et James Stewart a souvent dit que ce n’était pas son long métrage préféré entre toutes ses collaborations avec Hitch (son Cadell est dans un premier temps assez rigide et ce n’est pas le genre de personnage qui lui convient le mieux, je trouve). J’avoue que La Corde ne fait pas non plus partie de mes Hitchcock préférés…mais il est tout de même plus qu’une “simple” prouesse technique…

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