Retour vers le passé : Une Soirée Etrange (1932)

 

REALISATEUR

James Whale

SCENARISTE

Benn W. Levy, d’après le roman de J.B. Priestley

DISTRIBUTION

Boris Karloff, Gloria Stuart, Raymond Massey, Melvin Douglas, Charles Laughton, Ernest Thesiger…

INFOS

Long métrage américain
Genre : thriller/horreur/comédie
Titre original : The Old Dark House
Année de production : 1932

Après le succès de Frankenstein, le réalisateur James Whale a enchaîné avec un film maintenant oublié, la romance The Impatient Maiden, une commande qu’il n’a accepté que pour « se tenir occupé » pour reprendre ses propres mots. Il a ensuite vite retrouvé le registre qui l’a rendu célèbre en adaptant un roman de l’écrivain britannique J.D. Priestley, Benighted (sorti en France sous le titre Dans la Nuit). D’après les infos disponibles sur la toile l’histoire aurait pour toile de fond les désillusions post-première Guerre Mondiale. Un sous-texte que je n’ai pas retrouvé dans The Old Dark House, la version qu’en ont tiré James Whale et son scénariste qui reprennent tout de même à leur compte les grandes lignes de l’intrigue du livre.

Par une nuit sombre et orageuse, un couple, Philip et Margaret Waverton, et leur ami Roger Penderel, frappent à la porte d’une vieille demeure de la campagne galloise pour demander un refuge pour la nuit. Ils sont accueillis par une silhouette massive au visage défiguré qui se trouve être le serviteur de la famille à qui appartient ces terres, les Femm. Après Frankenstein, Boris Karloff collaborait à nouveau avec James Whale en jouant cet homme lourdaud et dangereux, dont l’incertitude des actions est renforcée par son mutisme (il ne s’exprime que par borborygmes). Si la créature de Frankenstein avait soif d’être acceptée, ce n’est pas le cas de Morgan qui est une véritable brute. Mais il y a peut-être bien pire que lui dans cette vieille et ténébreuse maison…

 

 

James Whale ajoute une dimension humoristique (un humour grinçant) avec l’apparition des Femm, Horace et sa soeur Rebecca qui ont l’air de se détester cordialement. Leur côté excentrique est de prime abord assez amusant…et déconcertant aussi. Ernest Thesiger, qui sera ensuite l’inoubliable Dr Pretorius dans La Fiancée de Frankenstein, le chef d’oeuvre de James Whale, incarne Horace, un personnage qui peut se montrer cassant, tout en basculant d’un moment à l’autre dans une peur irrationnelle. Avec son physique squelettique, il a presque l’air d’un fantôme qui hante ces murs, lieu qui démontre une nouvelle fois l’intérêt de James Whale pour l’expressionnisme allemand…

Comme souvent dans ce genre particulier, la maison est un personnage à part. Elle est hantée, pas par des spectres mais par ses habitants qui ont clairement sombré dans la folie. Elle est vivante également, ne serait-ce que par le malaise qui s’en dégage (superbe travail de Whale et de ses équipes, aussi bien au niveau de la photographie que des décors) mais aussi dans le sens où elle reflète l’état d’esprit des Femm. L’une des meilleures scènes est celle où Rebecca raconte à une Margaret en train de se changer (moment sexy pré-Code Hays) l’histoire de sa famille. L’utilisation que Whale fait des miroirs est brillante en donnant ainsi forme à l’esprit torturé de la vieille femme.

 

 

Deux autres voyageurs pris par la tempête se joindront à cette Soirée Etrange (à noter que le film est également connu en France sous le titre La Maison de la Mort), un homme aisé (Charles Laughton dans son premier rôle hollywoodien) et sa jeune amie. Pendant cette nuit qui semble ne jamais finir, les protagonistes vont se révéler d’une manière inattendue par rapport à la première impression d’ensemble (la caractérisation est intéressante) et les événements vont prendre une tournure de plus en plus imprévisible.

The Old Dark House n’est pas sans défauts…l’amourette qui lie deux des personnages n’est pas très convaincante et l’ambiguïté de ce qui se déroule peut parfois dérouter…mais l’atmosphère est soignée et l’équilibre entre les différentes tonalités qui animent ce récit donne des résultats souvent étonnants dans ce qui est devenu le modèle de la longue lignée de films de « maisons étranges » qui ont suivi.

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