Retour vers le passé : Le Grand Inquisiteur (1968)
REALISATEUR
Michael Reeves
SCENARISTES
Tom Baker et Michael Reeves, d’après le livre de Ronald Bassett
DISTRIBUTION
Vincent Price, Ian Ogilvy, Rupert Davies, Hilary Heath…
INFOS
Long métrage britannique/américain
Genre : horreur
Titre original : Witchfinder General
Année de production : 1968
En 1645, l’Angleterre est déchirée par une guerre civile, un conflit qui oppose les Royalistes aux forces des Parlementaires. Cette ère troublée détourne les gens du peuple de toute pensée rationnelle et permet à des hommes sans scrupules d’accroître leur pouvoir en exploitant les superstitions des villageois. C’est le cas de Matthew Hopkins, qui s’est auto-proclamé Witchfinder General (chasseur de sorcières en chef). Hopkins a véritablement existé et sa « carrière » a duré près de trois ans, pendant lesquelles il a, avec ses associés, tué plus de 300 personnes, surtout des femmes. Il serait même responsable de deux tiers des exécutions qui ont eu lieu pendant cette sombre période de l’histoire britannique.
Le Grand Inquisiteur est le premier volet de ce qui a été appelé l’officieuse « Trilogie Impie » (avec La Nuit des Maléfices et The Wicker Man), fondation de ce sous-genre de l’horreur qu’est la folk horror. C’est un film sorti des studios de la Tigon British Films Productions, une petite société qui n’avait pas les moyens de la Hammer et dont l’activité dans la production (que des petits budgets, avec quelques titres très intéressants) a duré moins longtemps que celle dans la distribution.
Le budget n’était donc pas énorme et même avec l’apport des américains de AIP, il n’a pas dépassé les 100.000 livres. Mais l’implication des américains a du obliger Michael Reeves à changer ses plans. Le réalisateur (qui nous a quittés très tôt, à l’âge de 25 ans des suites d’une overdose peu de temps après la sortie de ce qui est resté son troisième et dernier film) avait écrit le rôle de Matthew Hopkins spécialement pour Donald Pleasence, car il voulait en faire une figure d’autorité inefficace et un peu ridicule. AIP a imposé Vincent Price en échange de leur participation financière, ce qui a entraîné des réécritures. À cause de cela, les relations entre Michael Reeves et sa star n’ont jamais été au beau fixe (les clashs furent nombreux)…ce qui n’a pas empêché Vincent Price de livrer une de ses meilleures prestations.
Il est en effet excellent, subtil et inquiétant dans le rôle de ce soi-disant « grand inquisiteur officiellement mandaté », un profiteur qui ne fait qu’exploiter les peurs et l’hypocrisie de villageois lâches et sordides pour assouvir sa cupidité et ses pulsions sexuelles. Robert Russell est également très bon en John Stearne, l’âme damnée de Hopkins…les deux vilains rendant le noble héros, incarné par Ian Ogilvy, ami et acteur fétiche de Michael Reeves, un chouïa fade en comparaison.
Dans ce croisement de film d’aventures historiques (aux chevauchées westerniennes dans des paysages judicieusement utilisés et impeccablement filmés) et d’horreur, Michael Reeves fait de ces coins de campagne anglaise des lieux de terreur lugubres et sans espoir. Excessivement critiquées pour leur aspect « gore » à l’époque de la sortie, les scènes de torture sont toutefois très dures, une violence sèche et intense menant à un final marquant et cruel, qui crée un véritable malaise.
Il est à noter qu’aux U.S.A., le long métrage a été retitré The Conqueror Worm afin de profiter de la popularité du cycle Edgar Allan Poe de Roger Corman. Le Grand Inquisiteur n’a bien entendu rien à voir avec Poe, mais les responsables de AIP ont ajouté un poème de l’écrivain récité en voix-off par Vincent Price histoire d’entretenir la (très) faible illusion.
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