Retour vers le passé : Super Express 109 (1975)

 

Action/drame/suspense
Long métrage japonais
Réalisé par Jun’ya Satō
Scénarisé par Jun’ya Satō et Ryunosuke Ono
Avec Ken Takakura, Sonny Chiba, Kei Yamamoto, Eiji Go…
Titre original : Shinkansen daibakuha
Année de production : 1975

Le film catastrophe était l’un des genres les plus populaires des années 70. Avec leurs kaiju eiga (ou films de monstres géants), on peut dire que le Japon en était l’un des précurseurs mais les U.S.A. ont varié les sources de destructions, entre les catastrophes naturelles, les accidents aériens, les naufrages ou encore les pandémies. Les producteurs japonais ont alors répondu avec des longs métrages comme La Submersion du Japon en 1973 et Fin du Monde - Nostradamus An 2000 en 1974.

Avec Super Express 109, le réalisateur Jun’ya Sato (surtout connu jusque là pour ses histoires de yakuzas) a surfé sur la vague des Airport…mais en remplaçant l’avion par le Shinkansen, train à grande vitesse que les anglophones ont surnommé le Bullet Train (ce qui est d’ailleurs le titre U.S. de Super Express 109). Une bombe a été posée dans le Shinkansen 109 et elle explosera si le train descend en dessous de 80 km/h. Le maître-chanteur ne révèlera la position de l’engin explosif que si les autorités lui remettent une rançon de 5 millions de dollars…une vitesse à ne pas franchir qui rappelle bien entendu le Speed de Jan De Bont sorti en 1994 (le scénariste Graham Yost avait peut-être entendu parler de ce Bullet Train)…

 

 

Super Express 109 s’éloigne de la construction caractéristique des disaster movies à l’américaine. Il n’y a pas vraiment d’exposition consacrée à la présentation des passagers car ceux-ci sont très rapidement esquissés. Au fur et à mesure d’un trajet qui semble ne jamais finir, l’accent sera mis sur leurs réactions, passant par des phases d’interrogation, de colère et de panique, d’une manière parfois un peu caricaturale mais le réalisateur sait entretenir une certaine tension, notamment par le biais de ce qui arrive à une femme enceinte. Le visage le plus connu est celui de Sonny Chiba (The Street Fighter) qui incarne le rôle du conducteur du train, lien avec les responsables ferroviaires qui tentent de tout faire pour éviter une catastrophe.

Le scénario suit en alternance la traque des poseurs de bombes, s’éloignant souvent du train pendant plusieurs minutes pour se rapprocher du suspense urbain grâce à des scènes bien ficelées (la remise de la rançon, la course-poursuite…). Mais pas que puisque le portrait de ces hommes fait également basculer le métrage dans le drame social, un regard sur l’évolution du Japon des années 70, à travers plusieurs flashbacks racontant le parcours désespéré de Okita, ancien entrepreneur ruiné impeccablement interprété par Ken Takakura, vu notamment dans la saga Musashi de la Toei et dans le Yakuza de Sydney Pollack. Okita et ses deux complices sont les personnages les mieux développés, ce qui ajoute une dimension triste et tragique au dernier acte.

 

 

J’ai juste une petite réserve sur la durée de l’ensemble pas toujours bien maîtrisée car avec ses 2h25, Super Express 109 est un poil trop long (les discussions entre les figures d’autorité ne sont pas les plus nerveuses). C’est ce qui a motivé la décision de la 20th Century Fox de couper 30 minutes pour l’exploitation U.S. afin de resserrer l’action mais en faisant cela, tous les passages intimistes, ceux qui enrichissent la caractérisation des poseurs de bombes, sont passés à l’as.

À la croisée de plusieurs genres, Super Express 109 a connu le succès à sa sortie dans les salles japonaises en 1975. Ici à contre-emploi (il ne bouge pas de son siège à chacune de ses apparitions), Sonny Chiba a ensuite à nouveau laissé parler ses muscles avec le plus physique Champion of Death, l’adaptation du manga Karate Master.

Commentaires (1)
  • OkadaYT
    Membre

    Il est de notoriété publique que le film américain Speed s'inspire de Super Express 109. Le film japonais est caractéristique de son époque : il n'y a pas vraiment de héros, mais un grand nombre de personnages à peu près au même niveau. Seuls finalement les poseurs de bombe ont un réel portrait. Ce sont les déshérités, ceux que l'évolution économique du Japon a laissé sur le carreau.