La Jessica de Kelly Thompson

Depuis sa création en 2001, Jessica Jones n'a jamais quitté Brian M. Bendis. Le dernier tome dessiné par son dessinateur attitré, Michael Gaydos, fut un véritable hommage à son ennemi de toujours, l'Homme Pourpre, comme à son héroïne, en lui donnant enfin une journée parfaite. Notre larme roulée et essuyée brusquement sur notre joue ne nous empêchera pas de voir ce qui va se dérouler dans un avenir proche. Sachez pour les réfractaires de nouveautés, que ses successeurs ont plu à Bendis lui-même, on va tâcher de découvrir pourquoi...

Pour ceux qui regardent comme moi au dos du livre pour voir le nombre d'épisodes, ne se fâchent pas, effectivement, c'est noté qu'il s'agit des épisodes 1 à 3 de Jessica Jones : Blind Spot. Pourtant, il y en a bien 6, puisqu'il s'agit d'une sortie à la base pour le digital, et est donc distribué par deux. Au final, nous avons bien nos 6 chapitres.

Passez ce détail que je souhaitais à tout prix vous parlez, ce qui me frappe tout d'abord le plus, ce sont les dessins du jeune Mattia De Iulis. Encore débutant sur le marché américain, nous avons ici encore une fois un talent à mettre dans vos favoris sur Sanctuary. Il faut dire que l'on passe d'un dessin personnel, assez brumeux, pour aller à l'essentiel lors des expressions faciales d'un Michael Gaydos, à un trait beaucoup plus précis et éclairé, comme on le voit souvent dans les illustrations Italiennes. Mais ce que j'ai apprécié, c'est surtout notre Jessica en blouson de cuir mode années quatre-vingt, avec toute une gamme de rictus qui s'allie parfaitement aux scènes d'enquête ou d'actions. Une très bonne note pour ce début prometteur !

Mais parlons à présent du scénario de Kelly Thompson... elle n'en est pas à son premier personnage féminin Marvel, on se rappelle d'elle sur les titres A-Force, Hawkeye (avec Kate Bishop bien sûr) ou encore Captain Marvel and the Carol Corps et même Power Rangers Pink ou Jem et les hologrammes. Et ici, elle a su tirer du meilleur de cette expérience pour ressortir l'essence même du personnage. Une femme au caractère bien trempé pouvant manier une hache contre une horde de monstres avec Elsa Bloodstone par exemple. J'avoue qu'ici, il s'agit d'un de mes passages favoris. Mais on la voit aussi en mère de famille moderne qui sait se remettre parfois en question et qui doute de la meilleure chose à faire. On l'aperçoit également dans le rôle d'une femme tendre qui peut exercer un esprit critique sur son homme quand il le faut. Et enfin, on voit en elle évidemment une enquêtrice hors pair qui partage agréablement ses indices avec le lecteur, à l'aide de polaroïdes dispersés sur la personne. Une idée qui m'a particulièrement plu, et qui sent bon comme le blouson cuir, la nostalgie d'une époque retrouvée.

Et c'est une affaire non résolue qui s'offre à elle avec une complexité agréable, sans être prise de tête, on apprécie le fait de ne pas deviner tout rapidement grâce à des extraits issus du dernier chapitre. Beaucoup d'invités Marvel complétés par le meilleur du casting féminin permettront à Jessica de trouver enfin les réponses à ses questions.

Le dernier chapitre dessiné par Marcio Takara (All-New Wolverine) fait office de friandises. On rentre dans la vie quotidienne de Luke et Jessica pour préparer le deuxième anniversaire de leur fille. Et quand on invite des super-héros, il y a forcément son lot de super problèmes, et je ne vous parle même pas de la fin qui relance la partie ou touche notre curiosité.

Les carnets de croquis de Matias De Iulis permettent encore une fois de nous convaincre de la partie graphique. Mais il ne faut pas oublier le magnifique travail de la scénariste Kelly Thompson, la nouvelle spécialiste des personnages féminins modernes. Elle sait en ressortir toute leur individualité. Oui, il y a des millions de super-héros pour toi dans le couloir Jessica, mais entre nous, tu n'as pas compté en plus tous tes fidèles lecteurs !