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Critique de L'Oxalis et l'Or #1

par Tampopo24 le dim. 27 sept. 2020 Staff

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Famine et Ruée vers l'or

J'ai toujours été de tout temps amatrice de récits historiques et encore plus quand je connais mal le sujet comme c'est le cas ici avec le thème de la ruée vers l'or des Irlandais fuyant la famine ravageant leur pays au XIXe siècle. Du coup, quand j'ai vu que Glénat proposait un manga sur ce thème, j'en ai été ravie. C'est une fois de plus la preuve qu'on peut écrire sur tout et n'importe quoi du moment qu'on sait comment le raconter.

L'Oxalis et l'Or est un seinen issu de l'Ultra Jump de Shueisha où Eiichi Kitano fait ses armes après deux courts titres plus orientés shonen parus dans la première moitié des années 2010. Sa série actuelle avance tranquillement à un rythme mensuel et propose actuellement 4 tomes au Japon sans être finie pour autant.

Dans ce seinen, le mangaka allie Histoire, drame et humour. Il s'est documenté sur la Grande famine de la patate qui a eu lieu en Irlande au milieu du XIXe siècle et qui a fait des ravages là-bas, poussant tout une partie de la population à accélérer son immigration vers les Etats-Unis où à la même époque on a découvert les premières mines d'or californiennes. C'est donc dans cette ambiance dramatique d'un côté et pleine d'espoir de l'autre que va évoluer notre héroïne, une jeune fermière affamée de 14 ans et son domestique.

J'ai trouvé le sujet vraiment très intéressant et bien traité par rapport à ce que j'en connaissais. L'auteur nous raconte bien comment la famine a eu lieu, ses conséquences et rend crédible les actions de l'héroïne aussi bien en Irlande que sur le bateau et ensuite aux Etats-Unis. Le récit de la traversée correspond aussi à ce que l'on en sait avec ses problèmes d'hygiène et de mortalité. Il en va de même avec la vie à New York quand on est immigré pauvre et Irlandais. Le phénomène des bandes est par exemple bien documenté et parfaitement retranscrit ici, rappelant l'excellent Gang of New York de Scorsese. Rien ne nous est épargné. Le monde dont il est question est très dur. On voit la misère la plus extrême, on entrevoit une forme de cannibalisme, on découvre la violence. Mais l'auteur laisse aussi une porte ouverte pour qu'on ait de l'espoir, grâce à cette opportunité qu'offre une nouvelle vie, ailleurs, dans un pays qui potentiellement permet de s'enrichir si on a de la chance. C'est le mythe de la ruée vers l'or.

Le problème dans tout ça, c'est que même si le récit est intéressant et bien documenté, la narration, elle, pêche. J'ai eu le sentiment que l'auteur ne trouvait jamais le juste ton pour raconter son histoire et ça m'a vraiment gênée. Il y a tout d'abord un humour incongru et inopportun qui surgit bien trop souvent à des moments où l'histoire se veut dramatique, ce qui casse tout. Et à l'inverse, il y a des moments où le drame est bien trop surjoué pour être crédible, du moins dans l'expression de celui-ci sur les visages des personnages. Du coup, ça rend l'histoire bien moins crédible et c'est fort dommage.

A cause de cela, je n'ai pas vraiment adhéré aux personnages. Je trouve la jeune Amelia un brin surfaite, pour ne pas dire, pas très crédible. Son entrain exagéré m'a tapé sur le système parfois tant il était en contradiction avec l'ambiance sombre de part ailleurs. Je comprends l'intention d'en faire ainsi un élément moteur, mais ça n'a pas fonctionné avec moi. Son fidèle valet, Conor, est totalement transparent. C'est le cliché du domestique par excellence et il n'apporte pas grand-chose. A la limite, les personnages secondaires croisés au passé toujours lourd et dramatique sont plus intéressants, que ce soit l'homme ayant perdu sa fille avec la famine alors qu'il comptait lui aussi émigrer avec elle, ou le jeune garçon qui a pris l'identité d'un autre pour repartir à zéro, voire même le chef de gang qui déteste les Irlandais à cause de leur affluence trop importante qui menace les siens. Ils sont, pour moi, mieux construits et plus creusés que l'héroïne, un comble.

C'est dommage parce que l'aventure est bien menée. Elle est racontée de manière prenante. On a envie de voir ce qu'il va advenir de l'héroïne, si elle va réussir à partir, puis si elle va survivre à la traversée, puis si elle va réussir à faire fortune aux Etats-Unis. Chaque étape est bien racontée et prenante. Le contenu est vraiment intéressant, c'est l'emballage qui pêche en quelque sorte.

Les dessins, eux, sont par contre tout a fait satisfaisants. Ils sont dans la veine de ce qu'on attend d'un seinen historique avec suffisamment de détails et de réalismes pour être crédibles. Dans leur tonalité et leur style, ils me rappellent un peu ceux de Taro Nogisaka (La Tour Fantôme, Le 3e Gédéon). Rien de particulièrement bluffant mais un travail de qualité qui permet de bien s'immerger dans l'univers et d'en ressentir toute l'âpreté et la misère.

En bref

Je pensais vivre un véritable coup de coeur avec ce titre, j'en ressors un brin déçue. Si l'univers est vraiment convaincant et rend à merveille ce que l'auteur cherche à exposer de notre histoire, je suis moins convaincue par l'enrobage narratif qui manque d'équilibre et de nuances. C'est un premier tome, on va donc dire que la série ne demande qu'à laisser épanouir son potentiel.

7
Positif

Un récit documenté sur la Grande famine puis l'émigration irlandaise et la Ruée vers l'or américaine

Une histoire prenante

Une ambiance dure et âpre où l'auteur ne nous épargne pas

Des dessins détaillés et réalistes facilitant l'immersion

Des personnages secondaires bien mis en valeur

Negatif

Une narration mal maîtrisée qui fait sortir de l'histoire

Un humour incongru

Des drames surjoués

Une héroïne pas crédible et un valet transparent

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