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Critique de Centaures #6

par Tampopo24 le sam. 18 déc. 2021 Staff

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Vivre en régime oppressif et garder l'espoir !

Ultime incursion dans cette puissante série fantastique signée Ryo Sumiyoshi, ce tome me laisse un sentiment doux-amer malgré la force de ce qu'il raconte, comme l'impression d'avoir été coupé en plein élan et de manquer plein d'histoires qui pourraient encore être racontées.

Avec ce dernier diptyque, l'autrice proposait de revenir sur le passé des adultes qu'on a suivis dans les tout premiers tomes : Matsukaze et Kohibari. Avec l'âpreté qu'on lui connaît, elle retrace leur parcours jusqu'à leur rencontre fatidique et on ne peut pas dire qu'elle les épargne. Dans ce récit de fantasy asiatique original, l'empreinte de la mort et de la fatalité est partout. Le destin des héros est donc à chaque fois douloureux malgré leur désir de liberté.

On se retrouve à suivre d'abord Matsukaze dans des montagnes désertiques où il cherche avec sa famille d'alors à fuir les humains impitoyables à leur poursuite. C'est rude. C'est solitaire. Et pourtant beaucoup de beauté et de bonté ressortent de ce moment d'union entre centaures. C'est beau de voir la force de caractère des femmes de la famille au moment où les jeunes hommes perdent leur sang-froid face à la peur qui les gagne. C'est beau de les voir construire quelque chose sur un sol aussi aride et déployer ainsi tout leur amour. On est touché en plein coeur !

Pourtant la tragédie n'est jamais bien loin. Même si elle se déroule hors cadre, les conséquences, elles, nous frappent de plein fouet et on assiste à la tragique naissance de Gonta ainsi qu'à celle métaphorique du diable rouge des montagnes. C'est à nouveau très douloureux. Une bouffée de colère sourde s'empare aussi de nous face à tant de violence inutile. Cette histoire en miroir de la nôtre, dénonçant les violences que l'on fait subir à un peuple voisin est terrible. L'autrice a-t-elle voulu dénoncer ce que les Japonais ont fait en Chine et en Corée ? Je n'en serais pas surprise car on ressent la même horreur face à ce que les humains font subir aux centaures réduits en esclavages que face à ce que les Japonais ont fait quand ils ont envahi ces contrées.

Le décor historique se justifie ainsi pleinement, nous emmenant dans une histoire dépaysante et saisissante. Une fois contée le passé du "père" de Gonta et ce qui l'a amené à devenir le Matsukaze rouge qu'on connait, on se retourne vers Kohibari, le centaure domestiqué, et la tragédie nous reprend. L'autrice procède par vague, un drame, un apaisement, puis encore un nouveau drame. Une boucle qui se répète à l'infini en attendant que quelque chose vienne enfin la briser pour en sortir et courir vers la liberté. On ressent donc à nouveau de grosses bouffées de colère face à ce que vit Kohibari, qui nous montre de l'intérieur le sort des centaures qu'on devinait à peine jusqu'à présent. Alors certes, c'est moins puissant que lors de notre première rencontre avec l'univers où l'autrice était encore plus crue sur leur destin, mais on se prend quand même une vague d'horreur en plein visage, de manière brutale et sèche.

La lumière est cependant au bout du chemin, l'autrice bouclant bien la boucle entamée dans son premier diptyque en nous amenant jusqu'au moment clé de LA rencontre, celle qui rompra cette boucle infernale. C'est avec un talent assez fou qu'elle retombe ainsi sur ses pattes et nous avec, alors que peut-être certains se seront perdus au fil de l'histoire, des différentes temporalités et personnages, à cause de la parution assez espacée des tomes.

En bref

Même si cet ultime arc en 2 tomes n'a pas la puissance de son aîné, ce fut un nouveau moment magique, mais pas une magie douce et chaleureuse, une magie âpre et vibrante, telle la colère légitime de ses êtres brimés. Ryo Sumiyoshi offre ainsi une oeuvre singulière, inscrite dans son identité asiatique par ses dessins, son folklore, ses décors et ses thèmes aussi. Un récit contestataire qui a le mérite d'oser être cru et appuyer là où ça fait mal, mais qui n'est pas dépourvu d'espoir grâce à un message ultra positif sur la transmission et l'éducation. On espèce un jour la revoir sur ce registre car son Ashidaka fait un peu pâle figure à côté ^^! Une oeuvre en forme de coup de poing !

8
Positif

Une histoire qui marque les esprits

Une vision percutante des régimes totalitaires et de leurs violences

Une fantasy originale

Une boucle bouclée en revenant dans le passé des héros de la première saga

Des dessins époustouflants

Negatif

Une parution lente qui fait perdre le fil

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