7

Critique de Si Nous Étions Adultes #1

par Tampopo24 le lun. 17 janv. 2022 Staff

Rédiger une critique
Petit guide du coming-out lesbien

Après avoir raté le coche lors de la sortie des Fleurs Bleues, je me rattrape, comme d'autres lecteurs je l'espère, grâce à Akata qui nous propose à nouveau des titres de la singulière Takako Shimura. Après Comme un adieu qui fut une lecture d'abord étrange puis coup de poing, je me relance dans une nouvelle aventure avec Si nous étions adultes... un josei au démarrage aussi compliqué, étrange et malaisant que son prédécesseur.

Pour cette autrice qui avait disparu de nos radars, Akata a fait le choix de la relancer à la fois avec son titre court Comme un adieu, dont nous venons d'avoir la conclusion, et avec Si nous étions adultes... qu'ils publiaient en parallèle en numérique chapitre par chapitre, ce qu'ils poursuivent en plus de la sortie en reliée désormais. C'est le dernier titre en cours de l'autrice mais on aimerait bien la découvrir ensuite dans ses titres plus anciens si les actuels fonctionnent car elle a vraiment un style étrange et percutant bien à elle.

Sa nouvelle histoire commence par un rythme lent et entêtant, une narration douce et tranquille mais qui assène des vérités qui font mal. Nous faisons la rencontre de deux héroïnes atypiques : une femme mariée, Ayano, qui pour la première fois succombe au charme d'une autre femme et une femme lesbienne, Akari, qui ne fait que tomber dans des relations compliquées, par exemple avec des femmes mariées ou qui vont le devenir. Avec elle, nous avons le portrait de la vie difficile d'une femme lesbienne au Japon et ce n'est pas la rencontre des deux qui va améliorer les choses.

Akari et Ayano se rencontrent un soir dans un bar, alors que la première veut décompresser un peu de son boulot d'instit et de sa vie de femme mariée. Le problème, c'est qu'à aucun moment elle n'en parle à Ayano et que les deux se sentent irrémédiablement attirée l'une par l'autre, et se lancent dans quelque chose de nouveau. Mais très vite le statut marital d'Ayano va venir compliquer les choses sans que leurs sentiments ne puissent être étouffés. L'autrice ose donc nous conter une histoire d'adultère, une histoire de quête de soi.

Entre les mains de Takako Shimura, l'étrangeté de son titre, le thème central de l'adultère, deviennent tout de même un récit qui se veut naturel et nonchalant. Nous suivons avec curiosité et non sans émotion nos deux héroïnes en quête d'elles-mêmes mais un peu à la dérive quand même. Elles cherchent à savoir qui elles sont vraiment et ce qu'elles veulent vraiment. La franchise des deux femmes surprend, notamment chez Ayano, la femme mariée, SPOILER : qui en parle même à son mari. C'est étrange, singulier, ça interpelle. On ne sait pas vraiment sur quel pied danser. Faut-il les apprécier ou les juger ? S'émouvoir de leur quête ou leur reprocher ce qu'il se passe ?

J'ai trouvé ce portrait d'adultes dans la trentaine, de leur vie tranquille et de leurs sentiments de désœuvrement assez réaliste. Il y est question de l'emploi alimentaire vs emploi plaisir/passion, des enfants, du mariage et de la pression que fait ressentir la société japonaise à ces sujets. L'autrice ose vraiment mettre le doigt sur ce qui pose question et ce qui pose problème même encore à l'heure actuelle alors qu'on pensait que la société avait évolué. Ce malaise des personnages, c'est celui d'une génération, qui se reconnaîtra certainement dans ce que relate Takako Shimura.

A côté de ça, son beau dessin est doux avec un travail sur les regards qui attrapent et happent le lecteur par leur profondeur et leur richesse. La froideur apparente d'Ayano devient un masque derrière lequel elle se cache, tout comme la naïveté qu'elle déploie. L'assurance d'Akari est également une façade pour cacher ses souffrances et ses doutes. Ce sont deux très belles femmes sous le trait de la mangaka, mais deux femmes fragiles quand on regarde dans leurs yeux. Et le découpage très sobre propre au josei qu'on retrouve dans le style de la mangaka ne fait que renforcer chaque émotion.

En bref

A nouveau comme dans Comme un adieu, ce premier tome est étrange et ne permet pas vraiment de savoir vers où va nous mener l'autrice, mais ayant adoré la conclusion de sa précédente série, je lui fais confiance. Le voyage risque d'être rude et complexe mais je suis sûre qu'il me touchera. Déjà, j'aime énormément le ton de vérité qui se dégage du titre. Ça me fait d'autant plus regretter d'avoir manqué son tout premier titre chez nous, auquel il est fait référence en couverture du dernier chapitre, et j'aimerais beaucoup voir Wandering Son (Infos) dont les thématiques à fleur de peau ont aussi l'air superbes.

7
Positif

Un titre encore singulier qui sort du lot

Un propos moderne mais ancré dans la société japonaise

Des portraits de femmes fins et émouvants

Une narration surprenante

Un trait rond et doux

Negatif

Une histoire déstabilisante

On se demande où veut en venir l'autre et par quels chemins

Tampopo24 Suivre Tampopo24 Toutes ses critiques (1596)
Autres critiques de Si Nous Étions Adultes
Boutique en ligne
6,99€
Boutique en ligne
6,99€
Boutique en ligne
6,99€
Boutique en ligne
6,99€
Laissez un commentaire
Commentaires (0)