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Critique de Lone Wolf & Cub #1

par Auray le mer. 26 janv. 2022 Staff

Rédiger une critique
Le loup solitaire et son petit

Des auteurs emblématiques

Faisons simple, Lone wolf & cub est un récit culte par des auteurs qui le sont tout autant. Kazuo Koike a collaboré avec le dessinateur Ryoichi Ikegami pour créer Crying Freeman. C'est le papa également d'un récit dit « classique », Lady Snowblood, avec cette fois, Kazuo Kamimura aux crayons.

Gôseki Kojima a, par exemple, dessiné les premières pages de Kamui Den, qui ont été disponibles un temps chez Kana. Beaucoup de ces œuvres sont inédites en France, mais, elles restent moins célèbres que notre manga aux 28 volumes et aux 8000 pages. Il s'agit ici de l'oeuvre de toute une vie.

Un format de luxe

On va croire que j'exagère si j'écris vraiment ce que je pense, mais, si vous me connaissez un peu, je ne peux être qu'honnête envers vous, mes lecteurs, ou, envers moi-même. Ce format de lone wolf & cub est l'un des plus beaux mangas que j'ai pu avoir entre les mains. Je pense sincèrement qu'il y aura un avant et un après. On a déjà eu de belles rééditions pour notre génération qui a eu la chance d'observer les balbutiements du manga en France, pourtant, celle-ci, propose encore quelque chose d'autre. On est limite dans une forme qui rappelle les romans de luxe, comme peuvent avoir pour certains auteurs, les Éditions Bragelonne, ou, Actusf.

Effectivement, si vous enlevez la couverture amovible, il apparaît des lettres dans un vert doré sur la couverture toilée, noire, rigide, de format 150 X 252 mm. Elle présente aussi le titre et ses créateurs. Le bloc est très solide en main. Sur le dos, un petit dessin inédit fait son apparition. Et que dire à l'arrière du titre en japonais qui n'a jamais été aussi classe.

On le retrouve sur la nouvelle couverture cartonnée également. Cette dernière est épaisse, et même double, sur les rabats. Celle-ci indique le résumé, un court texte qui prend du recul sur le récit, voir ce qu'il apporte aujourd'hui à des personnalités comme Frank Miller (Batman : Dark Knight) ou Quentin Tarantino (Kill Bill) en tête.

Enfin, les pages sont épaisses, car du papier de 170 grammes a été utilisé. Le livre est constitué de près de 700 pages, et sera complet en 12 tomes au lieu de 24. J'adore le fait que les onomatopées sont restés en japonais, et sont traduites, du coup, autour des cases. Par contre, il faudra prévoir le prix de 32 euros l'unité. Pour l'instant le deuxième tome sort au mois de février, et le troisième en avril de cette année.

Quelques plus

On va finir avec ces petits détails. On a un bon récit introductif sur deux pages de Xavier Guilbert, un spécialiste du genre. On verra également, à la fin, deux autres pages, cette fois par un spécialiste de l'Histoire du Japon. Il présente le contexte historique d'avant notre récit, soit, le Japon de la fin du XVIIe siècle. Difficile de résumer le règne de deux cent cinquante années du clan des Tokugawa, mais, il s'agit ici de surtout comprendre l'essentiel, soit l'esprit du Bushido. Je pense que certains auront envie d'aller plus loin, et je vous conseille vraiment d'aller vers les numéros d'Historia qui s'y réfèrent, ou, les « ça m'intéresse, histoire », pour commencer doucement dans ce monde plus complexe qu'il n'y paraît.

On note également un lexique très utile. Par contre, il est dommage de ne pas avoir mis d'astérisque ou un autre symbole, car, parfois, le tout est traduit directement près des bulles de lecture. Du coup, on n'est un peu perdu, car tous les mots ne sont pas non plus dans le lexique. Il faudra donc jongler entre ces deux solutions proposées. Après, ça ne gâche en rien notre lecture une fois que l'on a compris cette façon de faire. Le glossaire présente tout simplement les mots les plus courants de l'oeuvre.

Enfin, quelques pages représenteront les couvertures de l'époque, de quoi replonger encore quelques instants, dans les magnifiques tableaux de Gôseki Kojima.

Des histoires qui se renouvellent sans cesse

Franchement, le fait que le tout a été concu dans les années soixante-dix m'a vraiment fait peur, et j'ai tout de suite ouvert ce livre en pensant que l'on allait avoir des chapitres qui se ressemblent sans cesse, comme on peut le voir chez certains de ses ainés.

C'est tout le contraire qui se passe. Le début est, certes, par rapport aux restes, un peu plus lourd. Et encore ! Car ne connaissant aucunement l'oeuvre, je ne l'ai pas senti tout de suite. C'est surtout que ça devient de mieux en mieux, et, de plus en plus maîtrisé.

On ne connaît pas le nom du ronin (samouraï sans maître) et de son jeune fils tout de suite. Et puis, ce n'est pas le plus important. Car, tout de suite, on est frappé par les traits aux pinceaux de Kojima Gôseki, ainsi que la narration lente et efficace de Kazuo Koike.

L'ambiance est là, cruelle parfois, que ce soit de la part des hommes ou de la nature. Le chapitre où le petit est coincé en montagne sous une avalanche de neige m'a vraiment marqué. Son père s'inquiète sans le dire vraiment, et en même temps, il sait que la vie sera plus dure encore, et que, c'est là l'occasion d'une véritable épreuve dont il doit s'affranchir afin de pouvoir affronté la vie en règle générale.

On a souvent une installation de nouveaux évènements à l'aide de villages assez différents, toujours traversés par l'homme et son berceau, puis, une phase de combat clot les chapitres, avec une morale plus ou moins prononcée. Pourtant, rien n'est vraiment pareil. Car, c'est déjà une vraie immersion dans une époque féodale que l'on vous propose ici, avec ses différents paysages, ses métiers pour les hommes ou les femmes, déshonorants ou non, d'ailleurs. Parfois, notre guerrier répond aux missions des habitants, à d'autres moments, il va s'en donner, afin de faire justice face à des lois souvent injustes.

Par exemple, on aura un passage où une femme sera lapidée sur la place publique, comme un simple jouet d'hommes bélliqueux. Elle sera sauvée par notre antihéros. Par la suite, elle lui donnera une mission, celle de s'infiltrer en prison. On comprendra d'ailleurs mieux pour nous, européens, les gestes du type à l'intérieur de celle-ci, à l'aide du texte de fin, qui a décidément un rôle très important.

Sinon, ne vous inquiétez pas, vous en saurez plus au fur et à mesure sur le ronin et son fils. Le prénom apparaîtra à un moment, ainsi que son ancien métier. Le bébé est au départ muet, puis, il prend la parole et l'espace en grandissant au fil des pages. Nombreux seront les ennemis, mais, chacun a quelque chose à leur apprendre de la vie, ou alors, ils confirmeront la voie empruntée jusqu'à maintenant.

De véritables tableaux

Gôseki Kojima rend un travail comme j'ai rarement vu. Déjà, le tout ne souffre pas du temps qui passe, c'est pour cela que Frank Miller ou Quentin Tarantino peuvent encore s'y référer. De plus, le grand format lui rend tout l'honneur que l'on lui doit.

L'artiste utilise le pinceau et ces paysages simples et bruts sont magnifiés. C'est une vraie plongée dans le Japon féodal que l'on vous offre ici, avec ses dojos, ses campagnes ou ses petites villes, ces kimonos ou yukatas suivant les situations.

Les scènes de combat sont limpides, jamais brouillonnes, on peut suivre aisément le tracé du sabre qui tourne sur chaque adversaire mal habile par rapport à notre samouraï. Il y a du sang aussi... et puis, de la neige, elle effacera toute trace de violence. La douceur rencontre souvent la brutalité dans lone wolf & cub.

Immortel

Nous avons entre les mains un chef-d'oeuvre immortel. Ici, pas besoin d'une DeLorean volante afin de voyager dans le temps, il suffit de se procurer lone wolf & cub afin de partir dans un japon féodal qui a tant souffert après le règne des Tokugawa. Les codes ont changé, beaucoup de samouraïs se sont retrouvés sans maître, et le rituel du seppuku (mourir dans l'honneur en ouvrant son ventre) n'était pas donné à tout le monde. Il est temps de raconter les histoires de ces laissés-pour-compte, qui ne pouvaient ni exercer un métier, ni vraiment s'insérer dans la société. Pourtant, ils avaient des codes d'honneur, le bushido, qui parle encore aujourd'hui à notre société qui aimerait tant revenir parfois en arrière afin de remettre en avant, une certaine morale perdue depuis longtemps.

En bref

« Fils à louer, sabre à louer. »

10
Positif

Un grand format vraiment luxueux

Les textes de Xavier Guilbert

Les traits de l'incroyable Gôseki Kojima

Les différentes histoires, plus fines que l'on croit, de Kazuo Koike

La galerie de couvertures

Le glossaire et les notes au long de la lecture

Negatif

Mais, des annotations à deux endroits, et surtout, sans renvois au glossaire

Le prix, même s'il est justifié

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Commentaires (1)
  • Auray
    Staff

    Attention le tome 2 vient d'être décalé au 2 mars ! Mais, avec une réimpression du tome 1!