Inspectrice Colombro : au cœur de la forêt et des Hommes

Avec La forêt, je m’attendais à un livre de vulgarisation scientifique sur l’état de la forêt en France. C’est ce que j’espérais même. Et bien en fait pas du tout : il s’agit d’une autofiction d’enquêtrice avec beaucoup d’humour et d’autodérision. J’aime le ton, la naïveté, le côté vrai : elle se fait engager comme serveuse pour espionner mais elle n’entend rien, pas le temps entre deux plats, au milieu d’un groupe de chasseurs riches, des barbares donc, elle est bien obligée de constater que loin du cliché de mâle violent qu’elle attendait, elle se retrouve avec des hommes courtois aux goûts désuets.

Quel plaisir d’avoir le point de vue de spécialistes auto-proclamés sur la chasse (surtout à charge!), de savourer les anecdotes sur la forêt des Gitans de Loches ou de découvrir la philosophe, théologienne et religieuse Edith Stein.

Les illustrations ressemblent à celles des albums jeunesse avec des couleurs et des traits très doux, et c’est à croquer. Les pauses dans la narration avec de grandes illustrations pleines pages sont comme un bol d’air frais ou d’anxiété selon l’état de la forêt. Claire Braud introduit aussi ça et là la photographie pour appuyer son propos (le photo montage avec Emmanuel Macron est très drôle).

Cette enquête buissonnière se lit avec bonheur, au fil des rencontres de l’auteur. J’ai pensé aux BD de Davodeau, on est sur le même registre : une émotion qui naît de la simplicité et de la sincérité du propos. Même si certaines scènes sont bien crues (on commence quand même par la découpe de cerfs après une partie de chasse assez gore) même si d’autres sont anxiogènes (peut-on encore parler d’avenir pour la forêt?), c’est rafraîchissant. Claire Braud, c’est un peu la copine qu’on a envie d’avoir, son propos est à la fois drôle et sérieux, on apprend plein de choses l’air de rien. J’ai, par exemple, mieux compris pourquoi le lobby de la chasse fonctionne. Je m’étais toujours demandée comment si peu de gens pouvaient réussir à empêcher de se balader tant d’autres, voire tuer en presque totale impunité. Maintenant, j’ai compris.

Mon seul regret, c’est que je trouve que la quatrième de couverture n’est pas du tout à la hauteur de la qualité de l’album : j’espère qu’elle ne découragera personne.

C’est frais, c’est bon, c’est vrai ! Je le conseille sans réserve à tous les amis de la nature qui aiment regarder les animaux sans avoir envie de leur tirer dessus ! Un vrai coup de cœur.