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Critique de Le bestiaire du crépuscule

par ginevra le dim. 3 juil. 2022 Staff

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Un album surréaliste hors normes autant par son histoire que par ses dessins

J'aime les œuvres de Daria Schmitt depuis que je l'ai découverte. Son univers teinté de surréalisme est soutenu par des dessins d'une beauté prodigieuse. Donc je ne pouvais pas rater ce nouvel opus

J'ai redécouvert Lovecraft il y a peu de temps grâce à des nouvelles traductions de ses œuvres moins lourdes et pesantes que celles de mes premières lectures. Il a tellement marqué l'imaginaire mondial qu'il suffit de légères allusions pour que nous soyons plongés dans son monde… et Daria Schmitt excelle dans cette légèreté.

J'avoue que la préface de Philippe Druillet m'a un peu troublée puisqu'il y expose ses visions de l'album… dont je n'ai pas retrouvé certaines. Mais à chacun ses propres visions du monde de l'autrice!

Providence, le gardien du parc, serait donc un avatar de Lovecraft. Ses visons sont en couleurs alors que sa vie de tous les jours est en N&B. Il parle avec son chat, Maldoror, qui philosophe sur l'irrationnel dans la vraie vie et se montre rationnel dans les visions (pourquoi pas un descendant du chat du Cheshire?). Philippe Druillet voit les 3 vieilles comme les Nornes, ces déesses du destin de la mythologie nordique. Comme elles tricotent en permanence, je les vois plutôt comme des clones de la brebis tricoteuse que Lewis Carroll avait imaginé dans "Alice de l'autre côté du miroir". Après tout, c'était un avatar de la reine blanche et elle fait ramer Alice dans une barque! Encore de l'eau, peut-être un lac?

Dans le lac, il y a des carpes et quoi d'autre? De quoi sont-elles les gardiennes immuables? Apollinaire s'interrogeait déjà dans son bestiaire :

"Dans vos viviers, dans vos étangs,

Carpes, que vous vivez longtemps!

Est-ce que la mort vous oublie,

Poissons de la mélancolie."

Encore un auteur tenté par le surréalisme… Peut-être une des sources d'inspiration de l'autrice.

Qui est cette directrice rigide qui se déplace à cheval dans le parc, étrange cheval que le lac rend mélancolique peut-être parce qu'il est plus lucide que sa cavalière? Qui sont ces enfants qui vont où ils ne devraient pas et qui m'évoquent le peuple de Dagon (nouvelle de Lovecraft)? Les yeux inquiétants sont-ils la preuve de la folie de Providence ou sont-ils réels? Comment le livre aux pages blanches devient-il une édition de la nouvelle de Lovecraft "L'étrange maison haute dans la brume"? Des questions, encore des questions auxquelles chaque lecteur ou lectrice donnera sa propre vision.

Bien entendu, les fabuleux graphismes de Daria Schmitt nous guident et nous transportent dans ce monde mystérieux qui rappelle le jardin extraordinaire de Trenet où il se passe la nuit des choses bien différentes de celles du jour. Ses dessins en N&B dignes des grands graveurs du XIXe siècle nous guident dans l'étrange et le merveilleux (enfin pas toujours!) dès qu'elle colorise ses images. La maison sur son pic m'a évoquée l'univers fantastique du peintre René Magritte.

En résumé, un formidable album qui nous entraîne dans le monde fantasmagorique de l'autrice.

En bref

Daria Schmitt nous offre avec cet album un hommage à des nombreux auteurs de l'imaginaire à commencer par Lovecraft bien sûr, mais moi j'y ai aussi vu Lewis Carroll, Apollinaire ou Trenet… À chaque lecteur ou lectrice de trouver ses propres sources. Une lecture indispensable pour tous les amoureux des rêves ou des cauchemars surréalistes. Un vrai coup de cœur pour moi.

10
Positif

tout

Negatif

rien

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