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Critique de EVOL #2

par MassLunar le sam. 17 juin 2023 Staff

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Eradiquer le mal

Evol , la nouvelle série d'Atsuhi Kaneko s'enfonce davantage dans la noirceur et dans la théatralisation d'un mal super-héroique qui explose tout sur son passage.

Pour rappel, Evol , c'est un peu le The boys de l'un des rois du manga underground à la différence majeure que Kaneko-san remplace l'humour cracra et satirique de Garth Ennis par un relfet sans concession d'une adolescence meurtrie et suicidaire. 

Dans ce tome 2 , nos trois anti-héros détenteurs de  pouvoirs suite à leurs tentatives de suicides ratée, forment désormais un groupe de méchants autorevendiqués appelés Evol ( un nom qui est du à une faute d'écriture transforment le mot  evil en evol, un choix qui brouille intelligement la notion de bien et de mal) mais pour l'heure, cette envie de détruire ce monde se résume surtout à  la destruction d'un centre commercial la nuit. Pas de victime mais un peu de bruit , tout le contraire des supers-héros officiels Lightning Volt et sa mutique et psychopathe petite soeur qui accumule les assassinats discrets et impitoyables (sous couvert de fausse justice) au nom d'un maire corrompu.

Qui sont les vrais méchants dans l'histoire entre les trois adolescents se revendiquant comme des supers-vilains mais qui trouvent en réalité une échapattoire à leurs prisons traumatiques et les supers-héros héréditaires qui ne sont que de pur instruments de meurtres ? Les uns deviennent des punks pourchassés par la justice tandis que les autres font l'objet d'adoration...

La question du mal, de sa symbolique et de ses origines, c'est toute la question qui est mise en valeur dans ce deuxième volume de cette superbe et terrible série qui ne se limite pas aux non-dits et décrypte le passé de deux des ados et les raisons qui les ont poussés à tenter de se suicider. Attention, l'émotion est forte dans ce volume qui ne prend pas de gants et ce grâce au style acéré d'Atsuhi Kaneko qui nous plonge dans la souffrance et la psyché de ses personnages à commencer par Akari, la fille renfrognée au verbe tranchant.

Nous la rencontrons pour la première fois à l'hopital psychiatrique et les abus qu'elle subit de la part de ses parents et notamment de son père sadique sont sous-entendus mais dans ce tome 2 , tout est évoqué frontalement à travers la figure métaphorique d'un lapin taille humaine qui rappelle la psyché d'un Donnie Darko (au passage, je conseille cet excellent film avec Jake Gyllenhal ). Nous avons droit à une plongée cauchemardesque dans le subconscient de cette fille qui s'est inventée un ami imaginaire devenue un double schyzophrénique pour oublier et fuir les abus sexuels de son père. Forcément, la genèse du mal n'est pas loin et la jeune Akari devient dans la bande celle qui aura le plus à coeur de détruire ce monde d'autant plus que son pouvoir flamboyant est symboliquement le plus destructeur. 

Atsuhi Kaneko délivre des planches cauchemardesques pour cerner au mieux le caractère vulnérable des personnages. Cet image du lapin ténébreux vous suivra par delà la lecture. Akari apparait comme une Alice bafouée et brisé par la viciosité de son père et par l'indifférence de sa mère. Mais le lapin qu'elle poursuit dans le terrier ne l'entrainera pas forcément dans le pays des merveilles mais plutôt dans les limbes. Tout comme dans le premier tome avec l'image de cette lune déformée et larmoyante, le mangaka multiplie les cases surréalistes brouillant la réalité avec la déformation du traumatisme. Un style expérimental qui régalera les amateurs du style underground du mangaka.

L'autre personnage mis en valeur est celui de Nozomi, personnage renfermé, qui s'est isoler suite à une humilation en publique en raison de son homosexualité, une orientation encore jugée trop tabou au Japon et qui fait de Nozomi, un personnage reflétant la réalité sociale d'une stricte intolérance. Nozomi apparait comme un adolescent attachant qui a été poussé à l'isolement mais qui peut malgré tout compter sur le soutien maternel, toujours présent. Sera t-il celui qui controlera son pouvoir pour le bien ? Sa future confrontation face à un mal évident en fin de tome le laisse présager. 

La tentative de suicide de Sakura, la cheerleader, n'est pas encore expliqué dans la série mais tout au plus, nous savons que Sakura n'est pas d'origine japonaise ce qui va impliquer une forme de discrimination tournée vers elle. Encore une fois, à travers ces personnages jugés marginaux , Atsushi Kaneko délivre un pamphlet féroce contre une société peu bienveillante à l'égard de ces personnages et encore emprisonnée dans une discrimination latente. Le caractère destructeur de ces personnages qui ne commettent pas des massacres comme le duo super-héroique possède surtout un aspect un peu révolutionnaire comme des marginaux se libérant des carcans suicidaires d'une société qui les a bafoué ou violenté. 

Avec ce second tome , on demeure aussi dans une satire féroce à l'égard des supers-héros. Je n'en dirais pas plus mais le duo fraternel super-héroique est tout simplement flippant et bien tourné. Ce sont des psychopathes mais on devine, plus particulièrement chez Lightning Volt, le grand frère , une souffrance lattente lié à son héritage de super-héros. Sous le masque, se cache d'ailleurs un monstre bléssé mais le personnage le plus flippant reste sa petite soeur. Totalement mutique et impitoyable, cette dernière est une incarnation de pure sadisme dont le petit sourire et la coupe au bol vous fera frémir à chaque apparition. 

Certes, celles et ceux qui connaissant l'oeuvre de Garth Ennis ne seront pas surpris par le portrait malveillant des super-héros de Evol mais c'est une influence bien tournée qui apporte un certain enjeu au nouveau titre d'Atsushi Kaneko. De plus, au niveau formel, le noir et blanc tranchant du mangaka souligne encore plus cet épaisseur du mal faussement héroique. Evol est un titre de super-héros profondément noir. 

L'intrigue avance et s'achève dans ce volume sur le début d'une double confrontation infernale. On attend avec impatience le tome 3 qui ouvrira les hostilités.

En bref

Un tome 2 encore plus percutant que ce soit dans la mise en valeur des adolescents et de leurs meurtrissures ou dans la confrontation avec les super-héros maléfiques. L'ambiance est lourde, les traumatismes sont là , parfois éclaircies et évacués par la liberté que ressentent les adolescents à détruire mais sans faire de victime. La série apparait dans ce volume à la fois comme un cri de révolte et un cri de désespoir tout en offrant une parabole nuancée sur ce qu'est le mal et ses origines ancrées dans la souffrance.

9
Positif

Un titre super-héroique d'une noirceur détonnante

Le style m^élant réalité et cauchemar avec une mention spéciale au lapin ténébreux qui évoque la créature de Donnie Darko

Des super-héros des plus flippants (à commencer par Thunder Girl)

Un vrai cri de révolte entre pamphlet sociétal et brouillage sur la notion du mal et du superhéros

Negatif

Assez bourrin

Une influence que certains peuvent trouver facile à l'univers de Garth Ennis dans le reflet de ces héros corrompus et psychotique

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