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Critique de Hunter-Killer

par Ben-Wawe le mar. 18 juil. 2023 Staff

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Un récit efficace et entraînant, mêlant complotisme, super-héroïsme et thèmes de Top Cow – avec les avantages et inconvénients que l'on devine

Delcourt propose l'intégrale de la série Hunter Killer, titre édité initialement dès 2005 par Top Cow dans le cadre de l'univers basé sur les séries Witchblade et The Darkness.
Marc Silvestri, grand créateur de tout ceci et dessinateur émérite, a alors sollicité le scénariste Mark Waid, pour lancer une série différente de ses autres productions. Le duo réalise ainsi douze épisodes, plus un n°0 et un dossier complet, sur des concepts déjà croisés dans The Darkness, mais complètement creusés ici.
A ce jour, Hunter Killer n'a pas eu de suite, mais l'ensemble a un début, un milieu et une fin ; ouverte, mais consistante. Delcourt livre ainsi la totalité des épisodes dédiés, dans un beau volume complet, massif mais agréable à la lecture.

Mais de quoi parle Hunter Killer, et ses treize épisodes ?
Ellis est un jeune adolescent américain sympathique, élevé par Susan et Steve dans une ferme isolée. Il semble avoir toujours la bonne idée ou le bon outil au bon moment, mais son quotidien explose en éclats quand ils sont attaqués par des super-agents gouvernementaux. Ellis découvre ainsi des secrets cachés, qui révèlent que le monde est bien différent de ce que l'on croit.
Au milieu du XXe siècle, la technologie a permis de créer des surhumains, notamment dans le Projet USA : Ultra-Sapien Alliance. Les Ultra-Sapiens, qui possèdent des pouvoirs, ont d'abord été des super-soldats pour les Etats-Unis et l'URSS, puis se sont reproduits, avec des descendants qui ont exigé leur indépendance.
Depuis des années, le Projet USA a mis en place la section Hunter Killer, avec des super-agents chargés de retrouver, récupérer ou éliminer des Ultra-Sapiens en fuite et dangereux. Samantha Argent est la meneuse dure à cuire du groupe Hunter Killer principal, et elle croise souvent l'ambivalent et mystérieux Wolf, l'un des leurs qui a trahi. Eux et d'autres camps sont à la recherche du Catalogue, mystérieux élément méconnu qui pourrait pister tous les Ultra-Sapiens.
Ellis se retrouve au milieu de tout ceci, après la perte de ses parents. Il plonge dans ces événements, notamment quand il est au contact de l'étrange Tsar Ténébreux du Monde, qui le dirige en secret et veut le protéger d'une Apocalypse évoquée par une visiteuse du futur. Mais rien n'est clair, et personne ne semble vraiment honnête autour d'Ellis...

On le comprend, Hunter Killer semble réunir tous les éléments distinctifs des histoires des années 90 : fort complotisme à base de révélations sur la véritable marche du monde, manipulations génétiques gouvernementales, secrets sur l'Histoire et notamment la Guerre Froide, personnages brutaux avec des répliques qui tuent. Le tout avec le style Top Cow, donc une grande dose de sexy, pour les hommes et surtout les femmes.
Oui, Hunter Killer a tout des années 90... mais est sorti en 2005 ! Le lecteur peut ainsi être surpris, en 2023, de cette étrangeté temporelle, mais cela ne gêne finalement pas la lecture... qu'il faut relativiser.

Cette lecture se révèle en effet agréable – si on la prend pour ce qu'elle est.
Oui, clairement, l'ensemble est rempli de clichés, notamment dans la caractérisation des personnages (Ellis est creux et neuneu mais devient un moment plus fin que les autres, Samantha a des failles derrière son obstination) ou les rebondissements (oui, ça se trahit de tous les côtés, tout le temps). Oui, totalement, les personnages sont abusivement sexy, même si l'on évite heureusement les poses lascives gênantes. Oui, définitivement, le complotisme est très lourdement amené ici, avec des changements dans l'Histoire qui paraissent ridicules si on les évoque à haute voix. Oui, enfin, le tout est très prévisible, que ça soit pour les personnages (Wolf n'est pas si méchant, le mystérieux super-méchant a des failles...) ou les événements (la vérité sur le Catalogue, la vérité sur l'Apocalypse...).

Mais... il faut admettre que cela paraît être « le jeu » pour une telle lecture. Quiconque lit Hunter Killer après avoir parcouru le résumé ou le pitch ne peut être surpris de telles caractéristiques, car c'est intrinsèque à cette histoire de complotisme surhumain dans la veine des années 90.
Tous les éléments précités sont des inconvénients, mais qui amènent aussi des avantages. Ceux liés à un récit de divertissement réel, qui amuse et se révèle surtout prenant, grâce à un sens du rythme et de la narration maîtrisé par Mark Waid. Le scénario en lui-même est tellement « gros » que l'on en vient à vouloir vraiment connaître la fin, par curiosité et par intérêt réels pour le sort des personnages et de ce monde.
Enfin, même si le tout est cliché, il faut aussi admettre l'aspect confortable de retrouver ainsi des figures connues, prévisibles, préétablies, ce qui permet de se glisser aisément dans un récit qui au fond s'amuse de son concept. Des productions comme Heroes sont passées par là depuis, à la TV, mais les divers Ultra-Sapiens croisés sont quand même très diversifiés, avec de vraies bonnes idées sur leurs pouvoirs et leur impact sur le monde.
Surtout, Hunter Killer est un récit auto-contenu, sans besoin de lire autre chose. The Darkness a croisé l'équipe Hunter Killer B, que l'on ne revoit pas ici. Le lecteur peut ne lire que ce gros et beau volume, avec des bonus pertinents et des explications bienvenues, et c'est fort agréable.

Mark Waid ne livre pas ici le meilleur scénario de sa carrière, et cela demeure une production minime de son œuvre. Il donne cependant ce qu'il faut pour créer un divertissement efficace – et finalement dessiné de manière cohérente, et efficace.
En effet, Marc Silvestri livre des planches réussies et solides, là aussi avec ses forces et faiblesses. Oui, clairement, tout cela manque de décors, les personnages secondaires sont interchangeables, et le sexy est de mise. Mais... là aussi, il n'y a aucune surprise : c'est le style Silvestri, l'on ne peut le lui reprocher. Ce qu'il propose ici est cohérent avec lui-même, et plutôt solide.
Il ne réalise pas tous les épisodes, ce qui n'est pas non plus une surprise. Eric Basualda et Kenneth Rocafort le remplacent, le premier dans un style neutre et assez passe-partout, le second dans les prémices de son approche bien personnelle, qui divise mais donne une patte réelle.

En bref

Hunter Killer est une belle intégrale, bien éditée, complète et auto-contenue. Il y a un début, un milieu et une fin, ouverte mais consistante. C'est un récit prenant, qui réunit tous les éléments des histoires des années 90, notamment le complotisme surhumain et les manipulations gouvernementales. Cela demeure cependant une anomalie pour un titre sorti en 2005, qui est quand même mineur pour ses auteurs, mais reste une lecture agréable en elle-même.

6
Positif

Un rythme prenant et une narration efficace, qui donnent envie de lire jusqu'à la fin.

Des clichés agréables à retrouver.

Un style général assumé et réjouissant, pour ce que c'est.

Negatif

Des clichés, quand même, et un ensemble très prévisible.

Un manque d'ambition en soi, car tout cela demeure déjà-vu.

Un côté daté de l'ensemble, très implanté dans les années 90 alors que c'est sorti en 2005.

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