Quand les oeuvres d'art se rebellent!

Catastrophe au musée du Louvre, les statues de femmes nues, dont beaucoup de l'antiquité, sont en train de devenir transparentes. Elles sont toujours là puisqu'on les sent au toucher mais elles se sont plus visibles. La révolte couvait depuis longtemps d'après Teresa Santos, femme de ménage au musée depuis 30 ans. Elle pose un don rare sinon unique : elle entend les statues lui parler et échange avec elles. C'est une révolte contre les regards salaces, les attouchements et les réflexions cochonnes que les femmes nues subissent en permanence… Le duo directorial a bien du mal à comprendre ce qui se passe, mais une solution finira par être trouvé : faire du Louvre le premier musée naturiste!

La collection du musée du Louvre édité par Futuropolis a déjà donné des joyaux, mais aucun de ceux que j'ai lu n'avait osé proposer un bouleversement aussi grand que cet album. J'avais découvert Zelba avec "Mes mauvaises filles", mais je crois que je vais plus m'intéresser à sa bibliographie après ce coup de maître.sse!

J'ai beaucoup aimé le duo composé par les jumeaux Charles-Henri et Charline-Henriette endossant tour à tour le rôle de directeur selon les circonstances via échange d'une perruque aux longs cheveux et d'une moustache postiche. Grimer les harceleurs de rue en femme et les faire circuler devant d'autres harceleurs serait peut-être une meilleure leçon que des mois de prison! Mais j'avoue que je n'irai sans doute plus dans les musées s'ils devenaient naturistes… comme le Louvre dans cette histoire.

Zelba explique dans sa postface avoir passé deux ans à déambuler dans le Louvre et cela se ressent dans la précision qu'elle a mise dans ses représentations des œuvres. Quelles splendeurs elle m'a fait (re)découvrir en même temps qu'une grosse envie de retourner au Louvre dès que je pourrai. Les personnages sont expressifs et dessinés en N&B tandis que les paysages (extérieur du Louvre ou la mer) sont en monochromies de rouge ou bleu. Seules les peintures ont droit à toutes leurs couleurs, les statues étant soit en N&B, soit en dégradés de bleu ou rouge.

Mais je ne suis pas d'accord avec sa remarque selon laquelle elle serait la 1e autrice de la collection. C'est oublier Loo Hui Phang sur "L'art du chevalement", mais des esprits chagrins pourraient m'objecter que cela concerne le Louvre Lens. Soit, mais il y a aussi "Les rêveurs du Louvre" où des auteurices asiatiques comme la japonaise Mari Yamazaki ont revisité le Louvre dans la "grande" collection. Il y a aussi chez la concurrence Delcourt & Louvre la dessinatrice Sandrine Goalec avec ses 5 tomes des "Souris du Louvre" destinés à la jeunesse. Et, côté BD du musée d'Orsay, je crois que c'est Catherine Meurisse qui a ouvert la collection avec "Moderne Olympia" chez Futuropolis. Et j'oubliais Judith Vanistendael avec "Atan des Cyclade" paru l'an dernier.

À propos de la collection, je vous recommande l'appel de la classe en visite car les noms des élèves sont des détournements proches des noms d'auteurs de la collection… Et le nom du prof n'est autre qu'une variation du nom du responsable éditorial.

Le dossier final commence par la postface de Zelba, et continue avec une très intéressante analyse du tableau de Véronèse "Suzanne et les vieillards". L'analyse dans la BD de la jeune historienne d'art Lisa Vallon est particulièrement intéressante. Enfin, c'est Fabrice Douar, lui-même, qui conclut avec un article sur "Le nu dans l'art".

Donc un régal d'humour féministe où le rappel des choix patriarcaux est fait sans lourdeur… rappel fort intéressant d'ailleurs car j'ignorais qu'il n'y avait que 29 femmes peintres exposées au Louvre.