Soigner aussi les seconds couteaux
La bataille pour le titre fait rage entre les femmes pour le titre de Queen et les hommes pour le titre de Maître et pourtant Yuki Suetsugu subjugue avant tout par sa capacité à faire vivre aussi l’arrière-plan. Quelle grande dame !
On pourrait croire à ce stade de l’histoire que ce sont les deux duels en train de se jouer qui allaient nous passionner. C’est le cas mais pas seulement. J’ai été estomaquée dans ce tome par la facilité de l’autrice à dévier notre attention vers des choses qui semblent plus banales mais qui font vivre l’histoire en fait, la colorent et lui donnent sa particularité. Que ce soit la mise en avant des récitants hommes et femmes avec leurs particularités à chacun, ou celle des chargées des cartes qui doivent présenter le jeu au public, et même celle des entourages des joueurs, chacun est fait judicieusement et avec émotion. On sent toute leur passion pour ce jeu et leur amour pour le candidat(e) qu’ils défendent. C’est splendide.
La transmission reste en effet au coeur de l’histoire. Certes le match de Chihaya et Shinobu manque encore un peu de relief. Chihaya n’est pas dedans, mais ce faisant, elle reçoit une leçon de la Queen actuelle, qui lui transmet ainsi sa force l’air de rien. Quant à Arata et Suo, on voit peu de cases sur leur jeu, mais Arata s’est totalement glissé dans la peau de son grand-père afin d’hériter de son jeu et malmener Suo. Et puis, il y a leurs entourages à côté, de la soeur de Chihaya venue expressément lui rapporter ses affaires, à la tante de Suo venue le voir, chacun à des soutiens. Parfois, ceux-ci en viennent à être un peu effrayés par leur enfant, que ce soit le père d’Arata qui exprime son malaise face au caractère de son fils ressemblant à celui de son propre père qu’il n’a jamais compris et qui pire l’a blessé, en passant par la famille de Shinobu, tellement transparente, qu’elle semble bien seule.
L’autrice sublime ainsi le jeu du karuta, animant les cartes à travers les prises des héros et faisant vivre la tradition dans les paroles des récitants et les mouvements de kimonos des concurrents. C’est superbe ! Quand on aime l’art, la tradition, la culture, on ne peut qu’être sous le charme de ce décor qui fait tant honneur à ce sport en perte de vitesse mais qui aurait tout pour reprendre du poil de la bête, si la série, plébiscité chez eux, fait des émules.
En bref
Je suis pour ma part ravie d’avoir eu la chance d’avoir une telle série en français, un sujet de niche que le talent d’une mangaka, encore un fois, a su subjuguer et porter aux nues. Ces ultimes échanges pour gagner le titre de Queen et Maître sont des modèles du genre. Entre force tranquille, abnégation, courage et héritage assumé, nos héros dévoilent leurs techniques avec fougue et passion et ce même si c’est parfois dur. Je suis donc ravie de poursuivre l’aventure à leurs côtés, aventure qui devrait encore durer quelques tomes à ce rythme.
Positif
Des matchs pour le titre passionnant
Des affrontements variés au résultat incertain
Un joli décentrage pour regarder les personnes en coulisses
Une belle mise en avant des seconds couteaux
De l'émotion, de la tradition, de la passion
Negatif
Trop de focus sur Chihaya au détriment des autres
Laissez un commentaire
Commentaires (0)