Critique de Joseph Smith et les Mormons
par Le Doc le mar. 9 avril 2024 Staff
Rédiger une critiqueUn enfant de la terre...
Parmi les fratries du monde des comics (les Buscema, les Kubert...), je crois qu'il n'y a pas beaucoup de styles et de sensibilités aussi différentes que celles des frères Van Sciver. Noah Van Sciver (Fante Bukowski) est une figure de la bande dessinée indépendante qui cite comme références des auteurs comme Marc Hansen, Joe Matt ou encore Robert Crumb. Ethan Van Sciver est le chef de file du comicsgate, courant conservateur pour qui la diversité ou la présence de femmes dans des positions éditoriales ont détruit les comics de super-héros (j'exagère à peine). Ce gros c.....d d'Ethan est très présent sur les réseaux sociaux, tandis que Noah est plus discret. Les deux ont été élevés au sein d'une famille membre de l'Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours avant de s'en éloigner.
S'il n'a plus la foi qu'il avait lorsqu'il était enfant, Noah Van Sciver a tout de même souhaité renouer avec cette partie de sa vie en travaillant sur une biographie de Joseph Smith, paysan inculte devenu chef religieux et fondateur du mormonisme. Le trait particulier de l'artiste complet (il s'occupe de tout, jusqu'aux couleurs) peut paraître étonnant pour ce genre d'ouvrage, avec ses grands nez, ses gros yeux, mais cela fonctionne. S'il ne cherche pas vraiment à "faire beau", il sait raconter...les personnages sont expressifs, la reconstitution est soignée, les décors sont détaillés et il y a de bonnes idées visuelles, notamment lors de la représentation des visions de Joseph Smith.
J'avoue que je ressors tout de même de ma lecture avec un avis partagé. Etant profondément athée, l'accent mis sur les aspects purement religieux m'a souvent ennuyé et rendu de nombreux passages assez arides (ce n'est pas le genre d'album qui se savoure d'une traite). Mais il y a aussi des choses intéressantes. Dans le portrait qui est fait de Joseph Smith, par exemple...Noah Van Sciver ne tombe pas dans le piège de l'hagiographie et souligne bien les défauts de Joseph Smith, son hypocrisie concernant la position des femmes et la question du mariage plural dans sa religion. Le bonhomme n'est pas vraiment un modèle de sympathie, ce qui se ressent fortement (mon interprétation est que c'était un sacré escroc...mais ce n'est que mon interprétation)...
Ce regard sur une part de l'histoire de l'Amérique a aussi ses moments intenses, sanglants quand Van Sciver fait le point sur les bouleversements et les déchirements aussi bien externes qu'internes provoqués par les paroles et les actes de Joseph Smith. Si le scénariste/dessinateur a reconnu avoir pris quelques petites libertés pour la fluidité de son récit, il s'est montré dans l'ensemble assez fidèle à ce qui a été relaté dans les textes et compte-rendus de l'époque. Un travail minutieux donc...pour un résultat qui a ses forces et ses faiblesses car les plus de 400 pages de Joseph Smith et les Mormons sont certes denses...mais aussi très, très longues...
En bref
La partie bonus en fin de volume propose les commentaires de Noah Van Sciver, des notes historiques très complètes et un glossaire.
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