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Critique de Torso

par Le Doc le dim. 29 juin 2025 Staff

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On ne sera pas les Incorruptibles ?

Eliot Ness fait partie de ces figures historiques dont la légende a dépassé la réalité, notamment à travers les portraits qui ont été fait de lui sur le petit et le grand écran grâce aux interprétations de Robert Stack dans la série Les Incorruptibles et de Kevin Costner dans le long métrage de Brian de Palma...des adaptations qui ont certes pris des libertés avec la réalité tout en se basant sur les témoignages d'époque. Après ses études de criminologie, Eliot Ness a rejoint en 1927 le Département du Trésor, organisme qui travaillait alors conjointement avec le bureau de la Prohibition de Chicago. La lutte contre Al Capone s'est déroulée sur plusieurs fronts, Ness se chargeant des opérations de terrain avec son groupe surnommé les Incorruptibles...mais si les actes du policier fédéral et ses hommes de confiance ont eu leur impact sur la chute de l'empire de Capone, c'est l'enquête de Frank J. Wilson sur les fraudes fiscales du parrain du crime qui ont véritablement fait tomber le balafré. 

Quatre ans plus tard, Eliot Ness fut nommé à la tête de la sécurité publique de la ville de Cleveland. Son but était de lutter contre la corruption et le jeu mais il a été également confronté aux actes horribles d'un tueur en série qui a été surnommé le Cleveland Torso Murderer par les journaux. La véritable identité du tueur aux torses n'a jamais été clairement établie, un doute qui signa le début d'une série d'échecs dans la carrière d'Eliot Ness. Dans les années 90, alors qu'il était un aspirant écrivain qui travaillait pour le Cleveland Plain Dealer, le plus grand journal de sa ville natale, Brian Michael Bendis a pu parcourir tous les documents concernant ces horribles faits divers. Il en a parlé à son camarade Marc Andreyko, également auteur de comics, qui y a vu un potentiel cinématographique mais Bendis l'a convaincu qu'une bande dessinée était le meilleur support pour développer cette histoire. 

Comme pas mal de lecteurs de ma génération, j'ai découvert le travail de Brian Michael Bendis par le pan polar de son oeuvre, comme la série Sam & Twitch de l'univers Spawn et ce Torso. Je n'avais pas relu Torso depuis au moins 20 ans et cette relecture montre à quel point Bendis avait déjà posé les bases (ou tics) de son style (même s'il a signé le scénario à quatre mains) : les chapelets de dialogues, des cases répétées et silencieuses, des trombinoscopes en pleine page...autant d'éléments qu'il a réutilisé par la suite dans ses titres de super-héros. Ce qui m'a progressivement ennuyé au fil des années mais ici cette façon de raconter démontre une certaine efficacité dans l'élaboration d'une atmosphère sombre et oppressante. 

À l'époque, Bendis assurait aussi la partie graphique...et ce n'est pas l'aspect le plus réussi de Torso. S'il se montre plutôt bon dans les contrastes entre ombres et lumières et l'incorporation de documents d'époque dans sa narration, je trouve que ses visages manquent d'expressivité (avec des répétitions qui insistent plus sur les faiblesses que sur les forces du trait) et que la composition de ses planches est parfois un brin laborieuse à lire. Mais malgré ces faiblesses, Brian Bendis et Marc Andreyko ont réussi à faire de Torso une lecture prenante, reconstitution soignée  tout en incorporant des éléments romancés. La caractérisation est de qualité, aussi bien celle de Ness que la dynamique du duo d'inspecteurs Myrlo & Simon, au centre de l'enquête, et le suspense monte bien en puissance pour mener à un dernier acte haletant. 

Publié à l'origine par Image Comics sous la forme d'une mini-série entre octobre 1998 et septembre 1999, Torso fut un véritable déclencheur pour la carrière de Brian Michael Bendis qui a ensuite imaginé un hybride de polar et de super-héros avec sa série Powers et commencé à collaborer avec Marvel sur Ultimate Spider-Man et Daredevil. Torso aurait également pu être être adapté au cinéma mais les différents projets (qui ont vu défiler les noms de David Fincher, David Lowery et Paul Greengrass) sont tous tombés à l'eau.

En bref

Riches en photographies et archives (dont celles provenant du journal Cleveland Plain Dealer), les très intéressants bonus détaillent plusieurs sources d'inspiration de Brian Michael Bendis et Marc Andreyko dans l'élaboration de cet album.

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