Une vie après la violence ?

Je ne sais pas vous mais rien que la couverture de Shimazaki in the land of peace me donne envie d'ouvrir le manga. Il faut dire que le portrait qu'on y voit est intrigant avec son regard à moitié caché par les lunettes et ce visage à l'expression maussade, comme dépourvu de toute emotion.

En lisant la courte introduction, on comprend vite pourquoi Shimazaki n'a pas l'air heureux. C'est probablement parce que ça fait très longtemps qu'il ne l'a pas été...

Tout commence il y a 30 ans quand un vol au départ du Japon est détourné par la ligue de libération économique (LEL), une organisation terroriste qui s'oppose à la communauté internationale. Les passagers qui n'ont pas été tués ont été enrôlés dans les rangs de l'organisation afin de servir leur cause. Shimazaki était l'un d'entre eux alors qu'il était encore un petit garçon. Il revient 30 ans plus tard au Japon alors qu'il a réussi à déserter. Son but ? Vivre une vie normale dans un pays en paix.

Ce manga impose directement une ambiance très particulière. Au départ , l'auteur ne nous donne que peu de détails sur ce qu'il s'est réellement passé pendant ces trente dernières années mais on sent vraiment le poids qui pèse encore sur les épaules de Shimazaki. Il aspire à une vie normale mais il semble dénué de tout sentiment, comme si sa malheureuse expérience l'avait cassé à vie. Sans même savoir à quelles atrocités il a assisté ou participé, on peut ainsi se l'imaginer grâce à son attitude et au fait qu'on ne le voit presque jamais sourire et même quand il sourit, on sent que ce n'est pas naturel.

Pourtant il n'est pas seul à être revenu de l'enfer. Les déserteurs se sont rassemblés dans une sorte de résidence et ils essaient de se serrer les coudes. Comme ils se comprennent, ils peuvent échanger sur leurs difficultés.

À côté de ça, tous ces déserteurs sont à priori surveillés par les autorités car on doit craindre que leurs instincts se guérilleros ne refasse surface dans la vie de tous les jours. On assiste d'ailleurs à quelques scènes où Shimazaki va utiliser ses compétences mais pour la bonne cause. C'est ainsi qu'on peut voir de quoi il est capable... Un regard suffit pour faire pâlir les assaillants !

Mais ne vous y trompez pas : l'accent est surtout mis sur la réinsertion de Shimazaki et non sur les combats même s'il y a fatalement des scènes d'action de temps en temps. Mais ce n'est pas de l'action gratuite, c'est toujours des choses qui lui arrivent au cours de ses démarches pour mener une vie normale. Ses réflexes de combattant refont facilement surface. Alors que le rythme du manga est plutôt lent, ces scènes d'action sont étonnamment très efficaces grâce à un sens de la mise en scène certain. C'est clair net et précis.

Même si on est plutôt dans de la tranche de vie au niveau de la construction du récit, l'auteur intègre habilement un fil rouge qui est en réalité une échéance, qu'il va rappeler régulièrement et c'est très malin car on se demande bien comment on va en arriver là.

Les petits flashbacks qui sont distillés tout au long du tome nous en apprennent plus sur ce qu'ont subi ceux qui ont intégré les rangs de la LEL et ça s'intègre parfaitement au récit. C'est toujours lié à une situation précise.

Ce premier tome est une réussite, l'auteur nous livre un récit bien équilibré et intelligent sublimé par des dessins qui respirent l'authenticité. Belle découverte !