7

Critique de Imperator

par scorpion771 le dim. 27 juil. 2014

Rédiger une critique
D’abord Octavien, puis César et finalement Auguste, ainsi s’appelait le réformateur de la République Romaine, qu’il fera évoluer vers un empire millénaire. Fondateur de la première dynastie « impériale », l’histoire de cet homme est passionnante. Entre guerres et manœuvre politique, il saura faire pérenniser l’héritage de son grand-oncle et père adoptif, l’illustre César. Mais fût-il glorieux, l’Auguste d’Imperator l’est bien plus encore, ou plutôt, le sera bien plus ! Car pour le moment, celui que l’empire galactique divinisera n’est que Gus ! Un Romain vivant de rapine d’œuvres d’art, sur une Terre encore terriblement meurtrie par une guerre nucléaire ancienne et dévastatrice. S’il est mentionné dans Le Fléau des dieux et aperçu dans Le Dernier Troyen, c’est dans Imperator que nous découvrons les origines du fondateur de l’Orbis. Alors, oubliez le poème de Virgile, car c’est bien dans le sang de la guerre civile que naîtra l’empire galactique qui « n’a pas eu de début et n’aura pas de fin ». Donc ! Imperator, tome 1 - Les fascistes sont éternels, paru le 18 avril 2012 chez Soleil BD, dans la collection Quadrants est une BD de science-fiction. Avec Valérie Mangin au scénario et Max Von Fafner aux dessins, c’est évidemment une œuvre qui s’intègre en plein dans l’âge oublié des Chroniques de l’Antiquité galactique. Faut-il vraiment présenter Valérie Mangin ? Scénariste de génie et historienne, les récits qu’elle propose sont toujours très riches de vie et de détail. Ce n’est pas pour rien qu’elle est au scénario de la très bonne série Alix Senator. J’avoue ne pas encore avoir lu la série KGB, dont on ne m’a pas dit que du bien, mais ce qui est sûr, c’est que Mangin touche sa bille dès que le sujet touche l’Histoire avec un grand H, ce qui est évidemment le cas d’Imperator. Max Von Fafner est plus méconnu. Imperator était sa première publication et ça se sent. Mais je développerai ci-bas. Fafner est également aux dessins de Carthago Adventure tome 2, bon spin-off de la très bonne série Carthago. Pour faire simple, un artiste aux traits et à la couleur intéressante, qui évolue bien, et qu’il me tarde de voir avec plus de maturité dans ses prochaines réalisations. Côté scénario, si l’univers de Mangin nous avait habitués à un mélange entre antiquité romaine/grecque et science-fiction, Imperator s’éloigne des canons pour s’orienter en direction des années 30-40, et particulièrement de l’avènement du fascisme italien. Les liens avec les autres séries de l’univers des Chroniques de l'Antiquité galactique sont également plus ténus. Sans trop spoiler Le Dernier Troyen, l’on peut transposer le poème de Virgile à la situation actuelle. Les habitants du Latium seraient les terriens et les Eneides seraient nos amis fascistes. Une transposition qui nous donne sans doute des indices sur l’évolution du scénario. Gus sera peut être historiquement plus proche d’un Castro que d’un César… À noter également, un élément dès plus WTF : l’apparition d’un exemplaire d’une version intégrale de Le Fléau des dieux, particulièrement bien conservé (semble-t-il une version encore à paraître, puisque la couverture est celle du tome1). Mon esprit tordu en vient à se questionner. Est-ce un easter egg ou alors une révélation sur la nature réelle du monde futur ? Les Chroniques de l'Antiquité galactique seraient alors notre avenir. Valérie Mangin, à qui les dieux romains galactiques susurreraient à l’oreille, devenant par la même le prophète (ou plutôt la Pythie) d’un avenir des plus sombres … Je plaisant a moitié. Mangin nous ayant habitués aux surprises dans ses histoires, alors ça ne m’étonnera pas qu’il y ait là matière à creuser. Ou alors il s’agit juste un easter egg… Beaucoup de supposition, car le scénario de ce tome 1 semble mettre en place un monde plutôt qu’une histoire. En ce qui concerne les personnages, l’on retrouve toujours les « réadaptations » de personnage historique, avec le héros Gus pour Auguste, sa sœur Juvia pour Octavia (et sans doute Livia, la femme aux dents longues d’Auguste), l’antagoniste Benito pour Benito Mussolini. L’on trouve également un chef mafieux qui ressemble à un proto-César, mais cela reste encore nébuleux. Si les protagonistes sont plutôt plats, Benito attire l’attention avec des scènes chargées d’émotion, que retranscrit parfaitement le dessin de Fafner. À noter des éléments amusants marquant bien la mégalomanie du personnage, comme le lifting du sphinx ou encore la réutilisation originale du célèbre tableau « Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard » dans le bureau du Duce. C’est d’ailleurs l’un des problèmes, car nous nous retrouvons avec un couple de héros peu présent et un antagoniste très présent. Nous avons également un tome 1 plutôt manichéenne avec d’un côté le gentil voleur et de l’autre le méchant dictateur. La surprise viendra, je pense, de Julia, la sœur qui voit en son frère un futur empereur. Un empire qui accomplira les desseins des fascistes en bannissant les aliens... Affaire à suivre, mais l’évolution psychologique du héros sera sans doute un élément clef à suivre, car même si les empereurs cherchent souvent à nous le faire croire, un empire n’est par le fruit d’une destinée manifeste, mais bien d’une conquête fragile et d’un jeu d’équilibriste entre l’ancien et le nouveau. Côté dessin, Fafner nous propose du photoréalisme. Technique attirante, mais parfois hasardeuse avec des poses donnant, çà et là, une allure de mannequin aux personnages. L’impression d’être dans la vallée dérangeante n’est pas loin. Comme l’histoire, le design des fascistes est très années 30-40. Leurs véhicules, aux allures de V.A.B., munis de verrières type chasseurs de la Seconde Guerre mondiale, ou encore leurs véhicules aériens équipés de queue semblable à celle des P-82 Twin Mustang. Le design vestimentaire des protagonistes est lui plus contemporain (malgré le millénaire qui nous sépare). Un détail, peut-être, imputable à un retour du rétro dans la société terrienne, mais plus probablement à une réutilisation de modèles vestimentaires déjà maîtrisés par le dessinateur (les vêtements du héros étant une reprise d’une de ses précédentes œuvres, Submission Bundle). L’apparence des aliens est plus intéressante et diverse, avec des lézards à grosse tête et des crustacés humanoïdes. Un gros point positif sur la texture de peau des aliens, particulièrement soigné. Niveau découpage, nous avons une utilisation importante de case-bande, prenant toute la largeur d’une page et détaillant les scènes, sur lesquelles se superposent des cases plus petites détaillant un personnage. Découpage qui, à mon sens, ralentit l’enchaînement de l’action. Fafner réutilise cette technique avec une fréquence moindre dans Carthago Adventure, et dynamise beaucoup le récit. Les paysages sont détaillés et, comme déjà dit, les visages particulièrement expressifs. Fafner nous offre d’ailleurs une Rome magnifique, rappelant les ruines cambodgiennes envahies par la végétation. Pour conclusion, si le tome 1 d’Imperator est sans doute le maillon faible des Chroniques de l'Antiquité galactique, je pense que cette série est la plus intéressante et potentiellement la plus ambitieuse. J’espère sincèrement voir une suite, et découvrir comment Gus décapitera le pouvoir actuel pour en prendre la tête …

En bref

7
scorpion771 Suivre scorpion771 Toutes ses critiques (1)
Boutique en ligne
11,93€
Boutique en ligne
11,93€
Boutique en ligne
11,93€
Boutique en ligne
11,93€
Laissez un commentaire
Commentaires (0)