Ce goût nous plonge dans la vie d’Harold au moment même où celle ci est sur le point de basculer. C’est un jeune homme obsédé par son travail, au passé douloureux, qui a passé son enfance ballotté de foyer en foyer après avoir été abandonné par sa mère. Il se réveille un matin avec un goût étrange dans la bouche. Un goût qui va s'intensifier pour bientôt ne plus le quitter, l'obsédant d'avantage jour après jour. Ce goût lui rappelle quelque chose, sans qu'il parvienne à s'en souvenir. C'est à travers cette recherche obsessionnelle que l'on va assister à une véritable descente vers la folie et l'horreur du personnage qui le mènera peut être au dénouement qu'il attend.   Neyef nous fait pénétrer dans cet univers étrange aussi bien par l'histoire que par le dessin. Les femmes sont dessinées telles des pin up d'un ancien temps. L'encrage y est incisif. Les personnages sont expressifs, dans leurs expressions comme dans leurs postures, ce qui va de pair avec leur personnalité déjantée et dérangée. Ils sont mis en avant par l'utilisation de couleurs vives, criardes et non représentatives, faisant passer la pigmentation de leur peau du bleu au rouge d'une page à l'autre. Par ce fait, en plus de renforcer l'ambiance glauque du récit, les personnages se détachent des fonds en coloris unis et sombres.   Le point fort de cette bande dessinée est qu'on entre facilement dans le scénario, il nous fait réfléchir, on essaye de découvrir le mystère du goût en même temps que le personnage en jouant avec les différents indices qui nous sont donnés. Le dénouement quant à lui, plus une ouverture qu'une fin en soit, nous amène à imaginer une suite, une logique de comportement vers laquelle va s'engouffrer Harold. Et c'est cette suite, à peine suggérée par l'auteur qui nous fait réellement prendre conscience de la force du récit et de son goût malsain et tragique. En bref une bande dessinée que je conseille vivement à tous ceux qui ont faim de mystère et qui n'auront pas peur d'y mordre à pleines dents!