Ce livre est magique : étrange et beau, il a le pouvoir de faire voyager à l’intérieur de choses inexistantes, mais qui nous deviennent précieuses par leur puissance d’évocation de l’imaginaire que laisse s’épanouir un univers graphique fait de simplicité et de connivence. Par un effet papier brûlé, on s’achemine vers l’incendie qui initie une découverte d’êtres magnifiques, et de mots qui réinventent par leur agencement un monde et son vocabulaire. On peut simplement aussi y voir l’œuvre de la censure, pour rajouter de l’épique et de l’historique à cette fiction qui ne manque déjà pas d’attraits. Il s’agit d’une déambulation de fantasmagorie en fantaisie, dans l’univers de cette époque bizarre et attirante où les artistes poussaient leur sens à leur paroxysme, sans aucun interdit. On ressent un peu de cette folie et de cette exaltation, accompagnés par un dessin poétique, fait de nuances et de simplicité. On ressent un peu l’esprit de Sempé dans certaines cases. Le dessinateur nous donne à voir quelques facettes de son talent, du réalisme psychédélique en passant par l’impressionnisme. Une découverte revigorante que je ne peux que conseiller.