Un album onirique, une jolie métaphore du délicat chemin du deuil servie par des dessins aux couleurs matifiées qui retranscrivent parfaitement les atmosphères et sentiments. Etrange pouvoir des couleurs qui confèrent à son objet une palette large d'émotions. La lumière automnale, les couleurs rougeoyantes se sont substituées aux couleurs vives et gaies, lumineuses de l'été, conférant instantanément une certaine nostalgie à cette bâtisse familiale que Noémie et ses parents rejoignent. Etrange pouvoir de l'aspect mat qui transforme les rouges chaleureux de l'automne en bruns délavés et tristes. Etrange alchimie qu'utilise Tatiana Domas pour nous amener avec Noémie, fillette d'une dizaine d'années, personnage central de ce one-shot, au pied de la demeure de ses grands-parents paternels. Nous invitant par-là même à assister à l'enterrement de son grand-père et au déchirement, bien que sobre et pudique, qu'il représente pour le père de Noémie. Si la peine semble contenue, intériorisée, elle n'en est pas moins palpable. Le profond chagrin s'accompagne de silences qui génèrent chez l'adulte l'enfermement, le vide, la confusion mais également l’introspection. Chez une petite fille comme Noémie, le chagrin paternel sera à l'origine d'une évasion onirique, accompagnée de son doudou fantastiquement doué de vie, dans un royaume où le roi vient d'être capturé par l'Estompe. Destiné à un public jeune, cet album touche avec délicatesse et justesse un sujet difficile: la perte d'un être cher et le profond chagrin qu'il engendre, même chez les papas.