Tout commence avec la découverte d'un jeune naufragé amnésique au Siam en juillet 1807 par le capitaine d'une frégate anglaise, William Roberts. L'adolescent ne se rappelle que de son nom : Abel. Les marins vont être surpris par sa connaissance des bateaux et de la vie en mer. À son arrivée à Plymouth, William l'installe à L'Albatross, auberge tenue par les 3 sœurs Stevenson. L'auberge est vide depuis que leur père a disparu avec un trésor de guerre et est considéré comme traître à la couronne. Parallèlement à la vie d'Abel, nous découvrons celle de Rebecca, tenancière d'une maison close… et aussi grand amour du capitaine de la Compagnie des Indes Orientales, Nathan Mc Leod. Ces deux-là ont une particularité commune : ils voient le port des marins perdus, invisible aux yeux des autres, et où ils devront aborder un jour ou l'autre. Les auteurs ont qualifié leur livre d'opéra graphique et le nom n'est pas usurpé. En 4 actes alternant la vie sur les bateaux et la vie à terre, Teresa Radice et Stefano Turconi nous embarquent dans leur épopée maritime et nous piègent dans leurs filets. Une fois ouvert ce gros livre de plus de 300 pages, il m'a été difficile de le refermer et le piège s'est refermé sur moi. La splendeur des dessins laissés en crayonné (quelle superbe idée!) donne, par moments, un côté fantomatique aux divers personnages qui correspond parfaitement à l'histoire racontée. Mais je crois qu'ils ont un peu idéalisé la Compagnie des Indes Orientales car je ne suis pas sûre que, à cette époque, un officier né à Alger puisse devenir capitaine d'un bateau aussi brillant soit-il et même si c'est un navire de commerce. En revanche, leur culture en poésie anglaise est impressionnante (voir fin du livre)… et leurs goûts musicaux des plus éclectiques : de Vivaldi à The Pogues en passant par Ennio Morricone et d'autres. Il manquait un pendant en BD aux grandes aventures maritimes romanesques du XIXe siècle. Ne cherchez plus, le port des marins perdus a comblé ce trou… et de très brillante façon. À lire et à relire!