S’il y a une œuvre de l’univers de Batman sur laquelle il y a beaucoup à dire, c’est bien Silence. L’histoire commence par un sauvetage, celui d’un jeune garçon kidnappé par Croc. Batman va vite s’apercevoir que quelque chose cloche, la méthode ne colle pas aux méfaits que pratique habituellement son ennemi. Puis, alors que les coups de forces et coups de poings s’enchaînent avec Poison Ivy, Catwoman, Joker, Harley Quinn ou Superman, Batman s’interroge de plus en plus. Tous ces évènements isolés sont-ils reliés les uns aux autres ? Quelqu’un manipule-t-il ses ennemis, comme ses alliés ? Le mystère s’épaissit alors que l’ombre d’un nouvel - ou ancien - ennemi recouvre peu à peu la vie du Chevalier Noir... Avec Jeph Loeb au scénario, le mystère se devait d’être grand. Autant vous le dire tout de suite, la qualité est au rendez-vous ! Jusqu’au bout, le lecteur reste dans le flou. Qui est cet ennemi ? Que cherche-t-il à faire ? Tout le long de l’histoire, ce polar est jalonné d’indices et de fausses pistes, si bien que le mystère est complet jusqu’aux dernières pages où le lecteur découvre un énorme rebondissement qui éclaire d’un jour nouveau tous les évènements qui viennent de se dérouler. On retrouve bien là le style que Jeph Loeb a notamment mis en œuvre lors d’« Un Long Halloween » et « Amère Victoire », deux grands monuments de l’univers de Batman réalisés en collaboration avec Tim Sale. Si l’histoire au départ peut paraître confuse, c’est que le lecteur n’a pas encore toutes les clés en main. Une deuxième lecture s’impose et c’est sous ce nouvel éclairage que le talent de Loeb se dévoile à travers les détails et les indices que l’auteur a su nous laisser au fil des 288 pages de Silence. Quelques points qui ont fait la force de ses précédents récits sont absents de Silence. Citons, en particulier, la réflexion sur la Justice qui tourmentait Batman et son sens du devoir dans les précédentes œuvres de Loeb. Ici, nous avons affaire à un Batman qui a trouvé sa place entre le Bien et le Mal. Les années ont passé depuis Amère Victoire, il est plus mature et, surtout, a appris à faire confiance à ses amis et alliés. Il y a un bon côté à tout ça : moins de blabla, plus d’action ! l’action ne manque pas et elle est très bien servie par le très talentueux Jim Lee. Celui-ci avait la difficile tâche de prendre la relève de Tim Sale qui avait donné à son Batman un aspect sombre, dramatique. Ici, le dessin est plus dynamique, plus lumineux, il donne du punch au scénario de Jeph Loeb. Le dessinateur a su trouver un style pour Silence qui correspond bien au nouvel état d’esprit de la chauve-souris. J'ai tout particulièrement bien aimé les scènes du passé de Bruce Wayne que Jim Lee a laissé en noir et blanc pour bien les différencier de la trame principale En plus de son talent, l’artiste montre également sa connaissance de l’univers du héros de Gotham en glissant ici ou là des références à de précédentes œuvres. Cela s’adresse avant tout aux vrais fans, mais cela ajoute un peu de cachet. Pour le plaisir de tous, ces références sont d’ailleurs listées en fin de volume dans les nombreuses pages bonus. Je dis nombreuses, je devrais ajouter riches et excellentes ! Urban-Comics nous livre dans cette édition plus de 80 pages de croquis, interviews, couvertures de tomes, etc. Citons notamment une interviews de Jim Lee et Jeph Loeb sous forme de chat que nous découvrons en préambule à Silence. Sans (trop) nous révéler d’éléments de l’histoire, cette interview nous permet de connaître quelques détails de la rencontre des auteurs, les œuvres et les auteurs qui les ont influencés et quelques infos croustillantes sur la création de Silence, le tout avec une pointe d’humour. Nous avons donc là une grande œuvre de l’univers de Batman, un polar avec une intrigue bien construite, une histoire rythmée, pleine d’action et très agréablement servie par un dessin précis et dynamique. A noter également que cette édition Urban-Comics est vraiment de qualité, que cela soit au niveau de l’impression, des couleurs ou des bonus. A conseiller absolument !