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Critique de Eternity

par bulgroz le jeu. 25 oct. 2018 Staff

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À peine moins d’un an après la sortie du troisième et dernier tome de Divinity - une des séries les plus finement ciselée que j’ai pu lire à ce jour chez Valiant - Bliss comics nous propose Eternity, un récit complet se plaçant chronologiquement après la trilogie citée plus haut. De par son statut de sequel, Eternity suppose que l’on soit familier de l’intrigue et des personnages développés auparavant, mais c’est tout de même un one-shot tout à fait abordable dans le cas contraire. A une remarque près : si vous n’avez pas encore lu Divinity mais que vous comptez le faire, ne lisez pas Eternity (ni cette critique, tant qu’à faire)… ça tombe sous le sens mais il me semble bon de le rappeler : Eternity « spoile » un certain nombre d’éléments. Notamment dans le très beau et très efficace prologue/previously chargé de rappeler et présenter les faits et les personnages de la série. La continuité est évidente entre les deux œuvres : Continuité dans le fond puisque le prologue de Eternity se place immédiatement après la fin de Divinity. Continuité dans la forme car on retrouve la même équipe d’artistes aux manettes même si le traitement graphique n’est pas tout à fait le même (lire à ce sujet les commentaires des auteurs en fin de volume.) Le récit s’ouvre donc sur Abram, sillonnant le monde (et plus encore) pour s’assurer que tout est rentré dans l’ordre et que tout est plus ou moins bien à sa place après le retour à la « vraie réalité », celle dans laquelle la Russie ne domine pas le monde, quoi. Il vit une vie paisible de gardien de la Terre bienveillant en compagnie de Myshka qui lui annonce être enceinte. Le prologue se clôturant ainsi, et connaissant le potentiel des personnages, on voit assez facilement l’élément perturbateur arriver : le rapt de l’enfant à naître par des forces étranges venues de l’Inconnu, cette zone mal définie à l’origine des pouvoirs d’Abram et des autres. Eternity, c’est donc la quête de deux parents à la recherche de leur enfant. Oui, enfin, c’est bien plus que ça ! Eternity, c’est aussi une histoire de poursuite inter-dimensionnelle ainsi qu’un hommage des auteurs (et de Matt Kindt en particulier) au genre SF. L’Inconnu est un espace à mi-chemin entre l’onirisme hallucinatoire des grands maîtres de la science-fiction européenne et les personnages, enjeux et thématiques d’une SF bien plus contemporaine. Le tout desservi par le dessinateur Trevor Hairsine qui a l’air de bien se faire plaisir, secondé par un bel encrage et des couleurs surprenantes et lumineuses : l’abstraction et l’étrangeté de l’Inconnu sont très bien rendues. C’est aussi une réflexion de l’auteur sur son propre statut de créateur de fiction (enfin, je crois). En témoignent les nombreux flash-backs relatant la vie d’Abram (ou serait-ce celle de Kindt lui-même ?), son expérience de geek friand de romans bons marché, l’importance de l’imaginaire, de l’évasion grâce à la fiction etc. Tout cela tend à établir un discours qu’on perçoit facilement sans qu’il soit pour autant facile de mettre des mots dessus, comme souvent avec Matt Kindt. Comme son aîné Divinity, Eternity un récit très intelligent dans lequel les auteurs développent une ode à la SF en créant un univers d’une complexité rare en si peu de pages. Les personnages et les enjeux nous dépassent largement. C’est une œuvre à plusieurs niveaux et dont la lecture s’est (pour moi en tout cas) faite étonnamment vite, ce qui me laissera le loisir de la relire en espérant parvenir à décrypter à fond le propos sous-jacent concernant la création et la fiction… C'est une lecture indispensable si, comme moi, vous avez aimé Divinity.

En bref

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