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Critique de La Troisième Personne

par Le Doc le mar. 21 mai 2024 Staff

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Edgar, Emma et Katina.

La Troisième Personne est un album de 920 pages en N&B sous couverture souple. L'essentiel de ces plus de neuf cents pages consiste en des discussions se déroulant en grande partie dans le même endroit, le cabinet d'un thérapeute. Les décors sont réduits au strict essentiel, aux éléments qui ont le plus d'importance dans l'histoire. Le dessin minimaliste est assez particulier compte tenu du sujet du livre car les traits sont presque cartoonesques, souvent exagérés même si ce parti-pris donne beaucoup d'expressivité aux visages, ce qui renforce encore plus l'expérience de visiter le passé d'une autrice au mental fracturé. 

Si elle est née homme, Emma Grove ne s'est jamais définie en tant que tel. Avant de changer de sexe, de suivre un traitement hormonal dans le but de réaliser sa transition, elle a d'abord du parler avec un thérapeute. Mais les choses ne se sont pas vraiment passées comme elle le souhaitait. Car le psychologue a détecté en elle trois personnes, ce qui l'a mené sur le diagnostic d'un Trouble Dissociatif de l'Identité. Peut-il alors donner un avis positif sur le changement de sexe quand plusieurs personnalités se disputent le même corps ? 

D'après sa préface, Emma Grove a retranscrit ses rendez-vous avec son thérapeute exactement comme elle s'en souvenait. Et il y a en effet quelque chose de vrai qui se dégage de ces échanges, jusque dans leur côté répétitif inévitable quand les deux interlocuteurs n'arrivent pas à se mettre d'accord, quand Edgar/Emma/Katina botte(nt) régulièrement en touche. Cette partie du récit est un peu longue, un peu aride même parfois, mais paradoxalement la lecture est rapide car elle ressemble à un ping-pong verbal qui donne du rythme à un ensemble qui ne m'a pas laissé  insensible une fois le livre refermé. 

Le dessin est simple sans être simpliste car Emma Grove ne manque pas de bonnes idées visuelles pour exprimer le passage d'une identité à l'autre, pour faire ressentir la désorientation des déconnexions. Elle "aère" les chapitres des visites à son thérapeute par des instantanés de ce qu'était son quotidien à l'époque et vers la fin enchaîne des flashbacks plus courts pour évoquer ses jeunes années. Le témoignage se fait alors plus difficile et émouvant...et il y a aussi un malaise qui prend aux tripes quand on parle d'incompréhension, de harcèlement et de mauvais traitements...

Du N&B, Emma Grove ne passe à la couleur qu'en une seule occasion, quand elle se sent prête, quand elle accomplit sa quête d'identité...un très joli moment de libération, poétique et plein d'espoir...

En bref

Emma Grove revient également sur la longue période de création de son oeuvre dans un intéressant carnet de notes, très bon complément à son témoignage.

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