Interview Sylvain Repos [Paris Fan Festival 2023]

Découvrez l'interview de Sylvain Repos réalisée au Paris Fan Festival 2023

Sylvain Repos est un jeune auteur français très prometteur dont la première BD, Yojimbot, est publiée chez Dargaud depuis 2021. Sur cette série, qui est un ovni à la croisée des genres, il s’occupe à la fois du scénario et du dessin. 

C’est lors du Paris Fan Festival 2023 que nous avons eu le plaisir de rencontrer Sylvain Repos pour la sortie très prochaine du tome 3 de Yojimbot, entretien durant lequel nous revenons sur cette première expérience et sur ce qu’il envisage pour la suite.

 

Sanctuary (SA) : Bonjour Sylvain Repos.

Sylvain Repos (SR) : Bonjour. 

SA : On a déjà eu l’occasion de bien échanger ensemble, on peut se tutoyer ?

SR : Oui, bien sûr, pas de souci. 

SA : Peux-tu te présenter pour le site ?

SR : Je m’appelle Sylvain Repos, je suis auteur de BD depuis 4 ans maintenant. J’ai sorti ma première BD, Yojimbot, en 2020. C’était un peu un rêve de gosse. C’est une BD d’action-aventure qui met en scène des robots samouraïs qui protègent un enfant et où je peux un peu utiliser tous les archétypes que j’adore dans le manga, les comics et tout ce qui a pu m’inspirer quand j’étais gosse.

 

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SA : Est-ce un choix d’avoir voulu gérer le scénario et le dessin ?

SR : En fait, comme c’était ma première BD, j’avoue que je ne me voyais pas délaisser une partie de la production de cet album et je voulais absolument avoir le contrôle pour ce premier projet. Mais dans l’avenir, j’aimerais bien bosser avec soit un dessinateur soit un auteur pour me délester un peu de cette charge de travail parce que ça peut être tétanisant, quand on est sur une série, d’avoir tout à faire et de tout avoir à gérer, surtout que la responsabilité ne repose que sur moi.

C’est beaucoup de travail, c’est une année pleine à être un peu tout seul sur un album, à ne communiquer qu’avec ma coloriste - essentiellement à la fin de l’album - donc globalement une année à bosser tout seul. 

SA : Le troisième tome sort le 30 juin 2023. As-tu d’autres projets en cours ou vas-tu te concentrer uniquement sur Yojimbot ?

SR : J’ai des pistes d’albums que j’aimerais faire et des projets que j’ai déjà présentés. Je vais faire 30 pages pour le Label 619 pour un prochain LowReader. Et comme j’ai une série qui tend plus vers un public jeune, je voudrais m’extraire un peu de ça pour proposer du contenu plus mature et plus mainstream - en tout cas, dans cet ordre d’idée.

 

SA : Pour LowReader, tu bosseras seul aussi ?

SR : Oui, je serai même encore plus seul que sur Yojimbot vu que je m’occupe aussi des couleurs mais c’est 30 pages donc je pense que je vais bien y arriver.

SA : Tu sais déjà ce que tu vas y faire ?

SR : Oui oui, j’ai déjà présenté le projet et ils m’ont validé le scénario donc je n’ai plus qu’à m’y mettre. J’attendais justement de terminer le tome 3 de Yojimbot pour pouvoir commencer.

SA : Yojimbot est prévu en combien de tomes ?

SR : 4, le prochain sera le dernier. C’est une première série, j’ai envie que pour la prochaine, je puisse mettre d’autres choses en place qui seront sûrement mieux maîtrisées.

Yojimbot, c’était ma première BD, j’y ai mis des choses et maintenant je fais avec. Mais pour la prochaine BD j’aimerais y réfléchir plus en amont. Pour le premier projet, on ne sait jamais comment ça va se passer, si ça sera un one-shot et c’est un peu un test. La prochaine, je ne veux plus que ce soit un test justement et que ce soit quelque chose de plus construit, dense et mature dans le ton et j’ai hâte de m’y mettre.

SA : Tu nous a dit que tu souhaiterais bosser en équipe. Sur quel poste est-ce que tu te verrais plus bosser / qu’est-ce que tu préfères faire ? Plutôt scénario, plutôt dessin ?

SR : Eh bien maintenant j’aime les deux. Sauf que quelquefois j’ai des idées que je n’aimerai pas forcément dessiner, je vois juste que ça peut faire une bonne histoire terre-à-terre, plus psychologique. Je vais par contre avoir plus envie de dessiner des histoires plus bankables avec des explosions, de l’action parce que j’aime beaucoup dessiner de l’action. Et j’aimerais d’ailleurs dessiner les scènes d’action des autres ; Il m’arrive quelquefois en lisant un truc de me dire que j’aurais bien aimé le dessiner.

 

SA : Tu penses à qui en disant ça ?

SR : J’aime beaucoup ce que font le Label 619. J’aime beaucoup leur ton, leur cynisme et le côté un peu satirique où ça finit mal, c’est cracra, on peut lâcher les chevaux même au niveau du dessin. Par exemple, j'adore le duo Kirkman/Ottley sur Invincible, quand ils veulent tuer un personnage, ils le font de façon trash et assumée. C’est jusqu'au boutiste et c’est ce que j’aime aussi chez le Label 619, quand ça meurt, ça meurt vraiment. 

SA : On avait pu échanger lors d’un salon sur notre passion partagée pour les comics. Yojimbot est considéré comme de la franco-belge mais tu y reprends certains codes des comics. Pour toi, s’il fallait te catégoriser, tu te mettrais plutôt dans la case franco-belge ou comics ?

SR : Ah… En vrai, j’ai un découpage très comic-book et je dessine façon comics. Mais pour répondre à cette question, ça dépend ce qui caractérise un genre : si on se base sur le sujet je fais du manga, si on se base sur le dessin et la narration je fais du comic-book, si on se base sur l’objet je fais plutôt du franco-belge.

Pour moi, je fais du comic-book nouvelle génération. En tout cas, je ne le rangerais pas dans le franco-belge.

SA : Si tu pouvais un jour partir dans les comics, y a-t-il un éditeur ou une série sur laquelle tu voudrais idéalement bosser ?

SR : Forcément, je rêverais de dessiner Batman ou d’autres personnages de ce genre. Ou même le surfeur d’argent ou un autre dans le genre cosmique pour pouvoir faire un peu n’importe quoi ; Une scène d’action dans l’espace, tu fais ce que tu veux, il n’y a aucun problème. Tu peux faire exploser des planètes et tu peux t’éclater en termes de dessin. J’aimerais beaucoup faire ce genre de choses cosmiques un peu dantesques. Mais pas forcément au scénario, plutôt me concentrer sur le dessin pour pouvoir faire péter des trucs quand on me dit “fais péter des trucs”. *rire*

En ce moment, je suis régressif à fond pour la BD, j’écris vraiment ce que j’ai envie, je fais des scènes d’action que j’aurais rêvé de voir quand j’étais petit et que je peux maintenant dessiner moi-même. En plus, j’ai accès à un monde régressif qui me fait un bien fou.

SA : Dans tes références pour Yojimbot, on peut aussi compter du manga ? 

SR : Oui oui, Yojimbot, le sujet fait très manga parce que ça reprend un peu les codes de Lone Wolf and Cub ou ce genre de choses. Mais dans le visuel, je dessine plus avec une ligne et des épaisseurs plus dans le genre des comics. C’est plus dense vu qu’il y a de la colorisation qui vient derrière, je ne peux pas me permettre comme en manga de laisser beaucoup de blancs et d’espacements de traits. Mais, du coup, mon style de dessin est plus orienté comics, mes thèmes de prédilection plutôt manga et dans la fabrication de l’album, on est plus sur du franco-belge donc on est à la croisée des genres (même s’il manque du manhwa).

J’ai l’impression de faire partie d’une génération avec le Label 619 ou ce qui se fait chez Kinaye où on a une grande liberté. 

SA : Mais justement, ce sont eux qui t’ont inspiré ?

SR : Ah oui oui, complètement. En tant que lecteur, j’ai souvent été complexé quand j’avais 17-18 ans de me dire que je ne me lancerai pas dans la BD parce que ce qui se fait en france ne me plaît pas forcément. Puis on a eu des choses comme Lastman ou le Label 619 qui ont fait bouger les choses. Et ça m’a grave inspiré, je me suis dit qu’on pouvait dessiner comme on voulait sans que ce soit cheap ou que ça fasse appropriation culturelle.

Même les français qui faisaient des trucs type manga gardaient le format franco-belge et ça créait un décalage que je trouvais gênant, mais depuis cette génération on a accès à des formats qui respectent les thèmes et le médium et c’est hyper cool. J'adore quand le format est en adéquation avec le sujet du bouquin.

 

SA : Dans Yojimbot, la narration est assez cinématographique ; est-ce que ça t’attirerait de bosser dans l’univers du cinéma ou de l’animation ?

SR : Ouais beaucoup, quand j’étais petit, je voulais vraiment faire du charadesign. J’étais un grand fan de Star Wars et je voulais passer ma vie à dessiner des robots et des vaisseaux. Je me suis toujours vu finir là-dedans, faire des charadesigns, des décors ou ce genre de choses. 

SA : On ne t’a jamais contacté pour ça ?

SR : Si, mais comme je passe une année complète sur un album et que j’accepte des petits projets en parallèle, je ne peux pas me permettre de me lancer à bosser dans une production cinématographique, de l’animation ou du jeu vidéo qui demandent d’être disponible du jour au lendemain pour 6 designs ou ce genre de tâches. Je me tourne pour le moment plus vers des projets d’illustrations pour des jeux de société ou ce genre de projets qui ont des dates de début et de fin bien définies que je peux caler dans mon emploi du temps.

Mais j’adorerais faire ça. Comme vous avez pu le constater dans Yojimbot, je viens du monde de l’animation, non pas en termes d’études mais plutôt par mon vécu. J’adorais les dessins animés comme Samouraï Jack ou les Tortues ninja quand j’étais petit et j’ai grandi avec ce genre de choses en 16:9 et c’est sûrement pour ça que ça se ressent dans mes cadrages sur Yojimbot. 

SA : Ça te plairait que Yojimbot soit adapté en animé ?

SR : Ah ouais, de ouf ! *rire* 

SA : Une question un peu moins drôle mais d’actualité sur les générateurs d’art par intelligence artificielle. En tant qu’artiste, as-tu un avis sur l’existence ou l’utilisation de ce genre d’outils ?

SR : Pour ce genre d’outils, c’est toujours la même chose : il faut apprendre à s’en servir. Je ne suis pas contre toutes ces choses qui pourraient nous aider ; Je ne suis pas contre une calculatrice qui permet de ne plus utiliser le boulier, je ne suis pas contre l’évolution.

C’est un gros problème pour les artistes digitaux mais ce n’est pas une intelligence artificielle qui fera des originaux ou des dédicaces.

Même nous en tant qu’auteur on peut les utiliser pour prévisualiser des choses. Par exemple, beaucoup de mangakas travaillent à partir de références photo et on peut facilement imaginer qu’ils se basent sur des photos générées par IA pour s’en servir de références. Ca retire certainement du travail à quelqu’un mais ça reste une évolution et je ne pense pas qui faille lutter contre l’évolution mais plutôt apprendre vite à s’en servir et ne pas laisser les autres le faire pour nous. 

SA : Pour finir, as-tu quelque chose à partager avec tes lecteurs ?

SR : Je veux surtout leur dire que je les kiffe ! Grâce à eux je vis une vie de rêve, je suis super heureux. En ce moment j’avance sereinement sur la série, je suis content de moi, j’ai suffisamment d’opportunités grâce à ça, grâce aux lecteurs, grâce à mes éditeurs. Je suis hyper reconnaissant, surtout pour cette année qui fût un peu particulière avec Angoulême et tout ça. Je quitte petit à petit mon syndrôme de l’imposteur pour arriver vers quelque chose de plus sécurisant pour proposer des projets qui me ressemblent plus sans avoir un sur-moi qui réfléchisse à si ça va plaire, si je vise au bon endroit ou si je peux me permettre de proposer ce genre de projet sans être connu ou validé. 

SA : Merci beaucoup pour toutes ces réponses !

SR : Merci à vous.

 

Un grand merci au Paris Fan Festival d’avoir permis cet entretien.

Interview réalisée et retranscrite par ScoobyDam.

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