Dans les ténèbres...

Je passe rapidement sur Incredible Hulk #419, un épisode divertissant et anecdotique qui donne un ultime rebondissement à la journée du mariage de Rick Jones et Marlo Chandler avec un combat entre Hulk et le skrull Talos. Peter David alterne comme il sait le faire entre l'aspect soap (Rick se rend une nouvelle ridicule en rappelant à Betty le jour où ils se sont embrassés) et l'action qui se termine d'une manière inhabituelle pour le colosse (mais c'est une astuce plutôt bien vue de sa part). Aux dessins, un jeune Roger Cruz remplace Gary Frank (qui avait besoin de cuver après les festivités...c'est carrément la première réplique de l'épisode), le brésilien qui cherchait encore son style faisait partie des nombreux sous-Jim Lee de l'époque.

Incredible Hulk #420 est l'un des épisodes les plus importants du run de Peter David, l'un de ceux qui ont le plus marqué les lecteurs. Peter David a notamment été inspiré par l'histoire tragique de Ryan White, un enfant hémophile qui a contracté le VIH après une transfusion. Dans les années 80, le SIDA était encore mal connu et incompris et devant la pression des professeurs et des parents d'élèves, Ryan s'est vu interdire l'accès de son école. Il est décédé en 1990, à l'âge de 18 ans. 

Dans les ténèbres... débute par une scène qui rappelle ce qui est arrivé à Ryan, sauf que cette fois-ci l'école a décidé de garder l'élève sidéen ce qui déclenche une vague de colère à l'extérieur. Une manifestation entre parents en colère et manifestants qui veulent garantir les droits de l'enfant dégénère et le sang coule. Le blessé est un vieil ami de Hulk, Jim Wilson, lui-même malade du sida. Banner emporte Jim au Panthéon et apprend que le jeune homme n'a plus longtemps à vivre. S'ensuit une discussion intéressante, Hulk faisant face à un cas de conscience lorsque Jim  demande s'il peut lui faire une transfusion de sang, comme lorsque Bruce avait sauvé sa cousine Jennifer Walters, faisant d'elle Miss Hulk. 

C'est un sujet difficile et Peter David le traite avec une certaine justesse car le sang de Hulk ne peut être un "deus ex machina " pour traiter toutes les maladies (ce qui s'ajoute à la peur du titan vert de créer d'autres mutés gamma) comme le souhaite Jim à l'article de la mort. La scène en question n'a rien perdu de sa force émotionnelle, avec cette succession de trois cases qui se termine sur le regard éteint de Jim. Et si le Panthéon est un refuge pour beaucoup de monde, il n'échappe pas à l'homophobie, comme le montre les échanges tendus entre Ulysse et Hector. 

Dans ce #420, il y a aussi un autre drame qui se joue. À son travail, Betty  Banner reçoit l'appel d'un désespéré qui veut se suicider après avoir appris sa séropositivité. Betty va passer toute la nuit à lui parler, pour le convaincre de ne pas renoncer. Une introspection qui parle de la peur, des préjugés et de leur impact et encore une fois l'happy-end n'est pas à l'ordre du jour, avec ce fondu au noir d'un pessimisme déchirant.

Oui, quel épisode...de ceux qu'on n'oublie pas...