Une intrigue qui avance lentement et maladroitement, mais une bonne animation générale de l’univers de Spawn

Delcourt propose la suite du titre King Spawn, connexe à la série-mère Spawn et concentré également sur Al Simmons. Cette autre proposition se concentre cependant uniquement sur une seule, unique et immense saga, qui plonge notre Hellspawn favori dans une terrible machination, l’amenant à bien des troubles ; en lui-même, et dans le monde.
Cela fait partie d’une nouvelle dynamique lancée par Todd McFarlane, qui intensifie son Spawn Universe avec de nouveaux titres toujours en cours (The Scorched, Gunslinger Spawn) et d’autres annoncés il y a peu. Les fans du Rejeton de l’Enfer vivent une période grisante, et bénéficient de la qualité d’édition en France de Delcourt.
Le présent volume, qui souffre de défauts mais se révèle plus agréable que les précédents (cliquer ici pour la critique du deuxième tome), est ainsi fort agréable à prendre en main, avec quelques bonus classiques mais sympathiques.

Les deux premiers tomes de King Spawn surfent sur la victoire d’Al Simmons sur Malebolgia, son créateur détesté, et l’isolement qu’il impose à la Terre, en empêchant Anges et Démons de passer par les Zones Aveugles. Ces couloirs dimensionnels sont fermés, coupant toute nouvelle invasion – et bloquant ceux déjà sur Terre, pour que Spawn les anéantisse.
Néanmoins, des crimes affreux sont perpétrés par les criminels connus sous le nom de Psaume 137. Ces fous sont liés au serial-killer Billy Kincaid mais aussi à la Fondation Exodus dirigée par Jason Wynn. Oui, l’ancien chef et ennemi de Spawn lui-même.
Al Simmons remonte les pistes avec son ami Terry, bien que leurs relations soient difficiles depuis la mort de Wanda. Spawn découvre que plusieurs adversaires ont formé un groupe, la Cour des Prêtres, dirigé par Azrael le Noir. Ce dernier tente de manipuler Al, mais ce dernier le tue – et est face à la tentation de s’emparer de la Couronne de l’Enfer tout en s’installant sur le Trône de Dieu !

De quoi parle alors ce troisième volume de King Spawn ?
Les ennemis de Spawn veulent donc pousser ce dernier à régner sur le monde, en espérant qu’il commette des erreurs et qu’eux en profitent. Mais Al veut plutôt ramener Wanda, physiquement et psychiquement, et engage une partie d’échecs sur plusieurs niveaux, avec de nombreux adversaires.
Il tente ainsi de former un accord avec Gaïa, qui règne sur la Nature dans le Vert, tout en déjouant ses pièges, car celle-ci a ses propres projets. La Cour des Prêtres n’a pas dit son dernier mot, le Clown complote dans son dos et monte une équipe avec le reste de ses adversaires. Spawn dispose de quelques alliés, jadis opposés, mais subit la trahison d’un Terry manipulé et poussé à bout.
La Couronne de l’Enfer s’annonce difficile à conserver, et le Trône de Dieu fait bien des envieux…

On le comprend, les scénaristes Todd McFarlane et Sean Lewis continuent leur grande saga, en poursuivant un tracé connu d’eux seuls. Chaque tome se révèle ainsi une étape, un pallier dans le grand dessein général. Le premier volume présentait la situation et les enjeux, le second montrait les doutes de Spawn, le troisième révèle ses manœuvres pour tenter de contrôler son destin et de gagner sur tous les tableaux. Le quatrième pourrait marquer une chute, logiquement.
Bien entendu, l’on se doute bien que tout ne finira pas bien pour lui, et il faut admettre qu’il n’y a ici rien d’original dans la façon d’écrire l’histoire. Celle-ci est elle-même déjà-vue, dans le monde de la fiction et même dans Spawn, série qui a eu son lot de manipulations et de grands jeux de dupes.

Il y a ainsi une certaine lenteur, certes programmée mais réelle. La série souffre également d’un certain manque de dynamisme, car les personnages ne font que parler, en se lançant essentiellement dans de grands discours enflammés. Tous évoquent des plans mystérieux, avec régulièrement des révélations sur telle figure cachée.
C’est en soi habituel également dans cet univers, mais du coup un peu redondant. D’autant que Spawn, jamais pleinement sympathique en effet, est assez « désagréable » à suivre, en étant abusivement suffisant et arrogant.

Cependant, la lecture est plus réussie que précédemment.
Déjà, le lecteur a désormais conscience du style de la série, et ne peut légitimement lui reprocher d’être ce qu’elle est. Mais, également, le fait est qu’il demeure intéressant de voir un Spawn réfléchir et préparer les événements, plutôt que de partir dans des explosions de colère. Ce n’est pas neuf non plus, mais sympathique.
De même, le personnage de Terry est bien écrit, comme le Clown, décidément un élément fondamental de l’univers d’Al Simmons. King Spawn se révèle un patchwork grisant de toute la franchise de Todd McFarlane, avec aussi le plaisir de voir Spawn s’emparer du pouvoir absolu de manière durable.

Graphiquement, Thomas Nachlik illustre les trois premiers chapitres dans un style adapté à l’ensemble. Cela rappelle quelque peu Szymon Kudranski, avec des personnages quelque peu figés, mais avec des traits moins durs, moins secs.
Une approche qui n’est pas brillante, mais cohérente avec un scénario très bavard.
Les trois derniers segments sont dessinés par Javi Fernandez, auteur principal de la série. Son style est plus dynamique, mais les visages sont un rien moins bien achevés. Sa prestation est elle aussi correcte.