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Critique de King Spawn #2

par Ben-Wawe le dim. 30 avril 2023 Staff

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Un ensemble confus, qui laisse espérer de bons développements malgré de nombreux loupés gênants

William Shakespeare disait : inquiète est la tête qui porte la couronne, pour confirmer les troubles des monarques et dirigeants.
Une réalité incontestable... mais pour Al Simmons, notre cher Spawn, l'on pourrait reformuler en disant : inquiète est la tête du mort-vivant qui découvre la couronne qui lui est dédiée !

En effet, les incompréhensions, angoisses et crispations du personnage créé par Todd McFarlane en mai 1992 sont au cœur de King Spawn, l'une des séries au cœur de la nouvelle étape des comics Spawn. A l'été 2021, Todd McFarlane a en effet développé sa franchise en enclenchant un véritable Spawn Universe, au-delà des spin-offs réguliers déjà lancés (Sam & Twitch, Curse of the Spawn, Hellspawn et bien d'autres comme Haunt [lien ici]).
Cette dynamique vise à créer un univers partagé entre des séries au long cours, au cœur de l'univers de Spawn. L'on y retrouve ainsi Gunslinger Spawn (sur le Pistolero infernal), The Scorched (sur la super-équipe de l'enfer) et ainsi King Spawn, sur Al Simmons en parallèle de la série classique Spawn qui se poursuit.

Cette nouvelle série est rédigée par Todd McFarlane (évidemment) et Sean Lewis (spécialisé dans l'Indépendant), et dessinée par Javi Fernandez (Batman, Justice League, Wolverine...).
Le premier tome posait les bases d'un titre basé sur une seule intrigue, riche en rebondissements dans une période surprenante pour Spawn. Il a tué Malebolgia, son créateur détesté, et a isolé la Terre du Paradis et de l'Enfer, pour liquider tous ceux qui manipulent l'Humanité. Il a même révélé son existence au monde, et entend agir comme un super-héros.
Les vieux démons ont cependant la vie dure, dans tous les sens du terme. Spawn découvre en effet d'horribles crimes à New York, avec des meurtres d'enfants organisés par le mouvement terroriste Psaume 137, en hommage à un verset de la Bible. Al Simmons y voit une référence directe à lui-même, et une prophétie sombre.
Psaume 137 le mène à Billy Kincaid, meurtrier d'enfants qu'il avait jadis tué et qui est revenu – alors que Spawn a bloqué l'accès aux zones aveugles, qui permettent des voyages et transports entre l'Enfer et le Paradis. Il apprend également que Psaume 137 est commandé par la Fondation Exodus, dirigée par... Jason Wynn, son vieil ennemi également ressuscité ! Tout ceci est un complot qui le vise, afin d'aboutir à un projet mystérieux : faire d'Al Simmons un roi !

De quoi parle, ainsi, King Spawn Tome 2 après ces annonces surprenantes ?
De bruit et de fureur, bien sûr ! Enragé de voir ses vieux adversaires ramenés de la Mort, alors qu'il s'est organisé pour empêcher cela, Spawn remonte la piste avec Terry, son vieil ami avec qui les relations sont difficiles depuis longtemps. Jadis inséparables, leur lien est troublé car Al a découvert que, durant sa mort, Terry a épousé sa femme Wanda, et lui a donné des enfants. Hélas, Wanda a été tuée précédemment, et cet événement les hante encore.
Les ennemis de Spawn le savent, et notre antihéros découvre lentement un complot terrifiant, remontant sur plusieurs années. Nombre de ses ennemis (dont Mammon, Wynn, Zab...) sont en effet réunis au sein d'un groupe terrible, la Cour des Prêtres, qui est derrière les événements récents. Ils sont menés par Azrael le Noir, un ange qui avait vu Spawn anéantir ses frères, et qui est parti pour s'arracher une aile et changer définitivement la partie.
Al Simmons et Terry errent dans cette machination, passant même dans le Vert, la dimension de Gaia, au-delà de l'Enfer et du Paradis et qui n'apprécie pas ces nouvelles manœuvres. Spawn est ainsi confronté à la véritable proposition de la Cour des Prêtres, qui lui offre un trône divin... afin de diriger et changer le monde ! Al va pouvoir réaliser ses plus grands rêves de destruction, conquête... et même de résurrection, s'il le souhaite. Simmons est perdu, face à la perspective d'être un Roi – mais un Roi nommé par ses ennemis...

King Spawn Tome 2 contient les numéros 7 à 12 de la série, qui accélère grandement après un premier tome assez classique dans sa démarche. Ce premier volume semblait, d'ailleurs, une sorte de porte de retour idéale pour les lecteurs ayant lu et abandonné Spawn, en connaissant les bases de l'univers mais pas les événements récents. Kincaid, Wynn sont des opposants connus, et l'ensemble était un retour confortable.
Cette suite décide de se lancer vraiment dans cette saga de Spawn « royal » et le résultat est... autant surprenant que troublant. Hélas, pas dans le bon sens du terme.

Très clairement, la lecture de King Spawn Tome 2 a des qualités, des défauts et des choix maladroits, qui interrogent.

Au niveau qualités, l'on peut citer un bon sens du rythme, un enchaînement pertinent de rebondissements. Les événements se suivent, la narration est plutôt efficace, et l'on a clairement envie d'en savoir plus, d'en apprendre plus, de mieux comprendre. Le jeu du mystère sur le trône est problématique, mais ce mystère accroche réellement.
De même, il y a toujours ce plaisir régressif de voir Spawn tabasser des gens, et les frapper si fort qu'il les éclate brutalement. C'est bête mais c'est cool.

Au niveau des défauts, hélas, la liste est plus nombreuse.
Pour être direct, les scénaristes Todd McFarlane et Sean Lewis ont une approche « mystérieusement mystérieuse » des choses et des révélations, et ça devient très vite lassant. L'idée de ce trône divin proposé à Spawn par ses pires ennemis, en cadeau empoisonné qui demeure alléchant, est assez classique mais efficace. Malheureusement, les auteurs multiplient les semi-vérités, les bouts de révélation sur le trône et le complot, et cela aboutit à une véritable lourdeur.
Il y a un manque de clarté, il y a un déficit de simplicité dans l'ensemble qui créé une lassitude durant la lecture. Celle-ci, en soi, ne fait qu'alterner discours grandiloquents des personnages (Al inclus, particulièrement bavard ici) et grosses bastons brutales, voire rapidement expédiées. Cela devient désagréable, d'autant que ces grandes déclarations sont souvent creuses, et ne mènent pas à grand-chose.
Le final est assez représentatif, avec un Spawn qui dit avoir décidé – mais tout vient un peu tard, tout est un peu trop trouble et chaotique. L'attitude de Terry est cohérente dans ses gestes finaux, mais l'on ne comprend guère sa « gentillesse » envers Al, qui est vraiment insupportable dans ce tome.

L'on doit aussi relever plusieurs maladresses générales, au-delà des défauts. Il y a en effet des choix qui sonnent bien sur le papier, mais interrogent sur le fond.
Certes, c'est agréable de découvrir la Cour des Prêtres et de nombreux ennemis rassemblés ici. C'est un procédé classique des comics, cela rend bien... sur le papier, encore une fois. Car, finalement, ces mêmes ennemis, qui ont souvent été de gros opposants sur plusieurs numéros, sont ici anéantis en quelques cases, et perdent complètement de leur superbe.
Notamment parce que ces affrontements sont des exécutions, tout simplement. Oui, Spawn est ultra-fort, mais là ses adversaires ne tiennent même pas deux cases. Al Simmons lui-même perd un peu de son aura, car ses opposants ne sont rien face à lui – et la valeur se compte aussi sur la difficulté à vaincre l'ennemi.
Enfin, ces fameux discours grandiloquents font partie de l'ADN de la franchise Spawn, mais... c'est lourd, ici. Le propos de Todd McFarlane a toujours été de dire que « tout le monde est pourri », ou presque. Mais là, cela sonne un peu lourd, surtout avec cette Gaia très enfantine dans son attitude.

Un scénario, donc, assez lourd et maladroit, illustré par un graphisme efficace et solide, cependant sans briller.
Javi Fernandez illustre l'essentiel des épisodes, dans un style classique et sombre. Ça se lit bien, ça se suit bien, on reconnaît les personnages, et c'est fluide. Les bagarres sont parfois un peu difficiles à suivre, mais cela reste lisible.
Il est aidé par Thomas Nachlik, qui correspond à la même approche, tandis que Marcio Takara et Philip Tan réalisent des interludes préparant la suite. Là aussi, le trait est solide, mais ne retient pas l'attention après lecture.

A noter des bonus pertinents : couvertures originales, mais également un retour sur les conditions de mort de Wanda (dans les comics originaux, dans cette relecture) et un point précis sur les événements et les possibilités. Une bonne analyse finale.

En bref

King Spawn Tome 2 est une lecture frustrante. Le fond de la saga est intéressant, même si ce n'est pas non plus très original. La lecture est prenante, car le rythme est plutôt efficace ; et la violence est plutôt fun, aussi. Hélas, le récit souffre de très nombreux défauts, qui alourdissent une intrigue remplie de maladresses et de fausses bonnes idées. L'on peut espérer que ça s'améliore, car ici le tome se révèle une sacrée (!) frustration pour les lecteurs de Spawn.

3
Positif

Un rythme prenant.

Une violence assez fun et régressive.

Une intrigue de fond classique et efficace.

Negatif

Trop de mystères et de semi-révélations, qui rendent la lecture lourde.

Les fondamentaux de Spawn poussés trop loin : trop de violence facile, trop de discours grandiloquents, trop de mystères incompréhensibles avant trop de révélations.

De fausses bonnes idées qui interrogent la gestion de l'ensemble.

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