Bonheurs simples

Contrairement à l'autrice qui a mis tout ce qu'elle aimait dans cette romance, elle partait pour moi avec plein de petits handicaps : une différence d'âge, un héros barbu, un jeune dominant... Et pourtant, le charme de Cocomi a eu lieu une fois de plus !

Depuis sa romance campagnarde Restart, j'aime beaucoup les ambiances des écrits de l'autrice. Oublier le temps perdu, avec sa très belle seconde chance, avait d'ailleurs frôlé le coup de coeur. Un peu retrait par rapport à ces deux très beaux titres, Le printemps d'un coeur brisé a su cependant me conquérir alors que ce n'était pas gagné.

Nous allons à la rencontre d'un trentenaire, freeter, qui a laissé de côté sa passion pour la photo faute d'en vivre et qui se laisse un peu vivre et presque dépérir dans son petit appartement où il déprime depuis qu'il ne voit plus le beau cerisier qu'il avait sous ses fenêtres à cause de l'installation de ses voisins. Et justement, un jour en allant quand même le voir, il tombe sur le fils lycéen de ses voisins avec qui il va nouer une relation. 

Je n'aime pas les histoires de différence d'âge, ça me met toujours mal à l'aise et pourtant ici, petit à petit, l'autrice a su me faire surmonter cela. Comment ? Avec beaucoup de lenteur et de bienveillance malgré un format très court et ramassé. Elle prend le temps de dépeindre l'amitié qui va naître simplement entre eux à coup de petits moments passer à chiller chez Eisuke, le plus âgé des deux. Puis lorsqu'ils se mettent finalement ensemble, il n'y a pas une course au sexe où à la démonstration affective, on traite plutôt des questions de leur vie de tous les jours. On s'intéresse à la passion d'Eisuke pour la photo et à ce qu'il pourrait en faire. On montre que ce n'est pas facile d'être dans une relation avec quelqu'un de plus vieux pour Kai, qui veut peut-être grandir un peu trop vite, et se cherche encore. Du coup, ça sonne juste et ça marche. 

J'ai beaucoup aimé cette capacité de l'autrice à rendre leur relation crédible. Cela passe aussi bien par les personnalités de chacun. Même si je mettrais un bémol sur le côté finalement assez immature d'Eisuke comparé à Kai, ce qui me fait toujours bizarre. J'ai du mal avec ce genre de caractère assimilé à de la faiblesse. Je n'aime pas qu'on ait besoin de représenter quelqu'un dans cet état pour créer une dichotomie dans une relation. Pourquoi deux personnes équilibrées ne suffiraient pas ? Je suis plus fan de Kai, du coup, ce que je n'aurais pas cru. J'ai aimé son côté fonceur et taquin, sa maturité précoce et sa capacité à réfléchir sur lui-même pour changer de braqué quand c'est nécessaire, quand il voit qu'il en fait trop. 

Il y a en plus un cadre touchant avec cette passion pour la photo de l'un, encouragée par l'autre, alors qu'il est un peu dans le creux de la vague, d'où le titre ;) C'est mignon aussi d'avoir en Kai un enfant de famille recomposée qui doit apprendre à gérer les sentiments complexes que cela lui provoque. J'ai aimé les moments doux et calmes où ils se retrouvaient dans l'appart d'Eisuke, tout comme leurs conversations téléphoniques quand Kai part étudier. On sent que l'autrice a su exploiter chaque petit moment dans cette expérience pourtant courte sur le papier, que ce soit chez l'un ou l'autre ou lors de leurs rendez-vous. Son secret ? Très peu de scènes de sexe et des courtes, car ce n'est pas le coeur de l'objet et ça fait du bien également. Alors on les laisse un peu en rade et l'autrice nous laisse miroiter qu'on pourrait les retrouver dans sa postface. Je ne crois pas que ce soit le cas à l'heure actuelle, mais je ne serais pas contre.