Une très belle surprise !

Rose est blanche, créole, elle a les cheveux crépus, et c’est un vrai problème pour elle. Elle raconte son enfance avec des séances de coiffage insupportable, la fausse solution des cheveux très courts, les remarques nulles des collégiens ou les galères des ajouts, des tresses ou du prix à payer pour se coiffer quand on a ses cheveux. Le tout avec beaucoup d’humour. Ce n’est pas tout, elle évoque la taxe rose, Angela Davis ou l’histoire du peuplement et des métissages à la Réunion. C’est bien une histoire de Racines dans tous les sens du terme.

Les dessins sont très sympas avec bien sûr l'évolution des cheveux de Rose mais aussi les pages "informations générales". Les émotions des personnages sont très lisibles, ça m'a beaucoup plu. Il y a plusieurs illustrations pleine page où on voit Rose dans différentes situations (quand elle est moquée, quand elle se tond les cheveux...) J'ai particulièrement aimée celle où son cordon ombilical est une grande tresse. La couverture texturée est très originale aussi.

A priori, lire 200 pages sur des cheveux, ce n’est pas pour moi. J’ai des cheveux bien sûr, mais c’est un non sujet. Et c’est là que Lou Lubie est très forte : à travers les cheveux, elle questionne le racisme, l’histoire, la sociologie. On apprend plein de choses et ce n’est pas barbant du tout. Au contraire, la narratrice est très drôle, elle dépeint son quotidien avec beaucoup d’humour et d’auto-dérision. Et le cheveu devient le point de départ de l’histoire de Rose, de son rapport à sa mère, de son rapport au monde et de ce que les autres projettent sur les cheveux crépus. La BD est passionnante, elle se dévore : quel tour de force ! Comme quoi, quand on a un extraordinaire talent de conteur, peu importe le fil conducteur, les lecteurs suivent ! Un vrai coup de cœur.