Quand Fabcaro dessine une enquête palbitante...

Dans ce vaste monde qu'est la bd humour, on ne présente plus le montpellierain Fabcaro, dessinateur , scénariste, romancier, musicien, qui a vu sa popularité explosé avec le désormais presque culte Zai Zai Zai Zai , une renommée que ce dessinateur tournera souvent en dérision dans ses oeuvres suivantes comme l'album Pause. 

On retrouvera un peu de cette soif d'autodérision dans Moon River , une parodie glacante et ultraprenante de polar et de roman noir, concentré dans une édition simili cuir de qualité qui donne immédiatement le ton. D'un noir de jais, cet album vient vous attrape par le colback, vous donne une bonne paire de torgnole et vous hurle doucement à l'oreille que Fabcaro n'est pas là cette fois pour rigoler. 

L'heure est grave, une fameuse actrice hollywoodiennne de renommée mondialement mondiale  vient d'être victime d'un terrible crime : un sinistre désaxé lui a dessiné une bite sur la joue pendant qu'elle dormait...

Cette enquête criminelle bouleversante qui vous laissera aussi ému qu'un pancake perdu sous la pluie est entrecoupée d'entractes autobiographiques du dessinateur, de véritables moments de making-fun autour de la genèse de Moon River comme un poignant témoignage des filles du créateur " non mais Papa, c'te honte, tu peux pas dessiner des bites sur la joue, y diront quoi au lycée ?!!" ou encore le rapport tendre , fusionnel, sadomasochiste avec la fermière du coin...

Mais, c'est surtout l'enquête en elle -même qui nous interesse, le bon polar hardboiled de blasé qui sue des larmes de colère... Et là, le détective Fabcaro prouve une nouvelle fois que son amour de l'absurde est intarrissable ! Les interrogatoires délirants s'enchainent, le grotesque vient rompre génialement une situation sérieuse, notre humble mais terriblement génial dessinateur s'amuse même avec la subtance même de la forme formelle en insérant des passages sous forme de roman-photos , en invitant James Dean, en jouant de la couleur, pastichant un album pour enfant que vous ne voudrez pas voir entre les mains de votre enfant...

Bref, le lecteur avide de Fabcaro se régalera une nouvelle fois du style Fabcarolien qui est un petit mix entre le dessin figé de Zai Zai Zai Zai et celui plus expresisf comme dans Pause où le dessinateur se prête au jeu de l'autodérision.

Ce petit mélange de style n'est pas forcément tout le temps judicieux. Dommage que l'intrigue ne soit pas pleinement concentrée sur l'enquête, certaines digressions autobiographiques sont divertissantes mais rompent néanmoins le fil de cet affaire déjà bien emmélée. 

Au final, c'est sans regret que nous clôturons le dossier Moon River, une enquête qui aura fait couler beaucoup d'encre (et user bon nombre de marqueurs sur des joues affriolantes).