Quand le Western s'invite dans le Cyberpunk

Quand on aime la SF et les mangas, dur de passer à côté de Tsutomu Nihei mais avec son esthétique et son univers si particulier, pour ne pas dire clivant, nous sommes nombreux à ne pas avoir osé nous lancer. J'avais déjà tenté autrefois avec plusieurs de ses titres (Blame, Biomega, Knight of Sidonia) sans jamais avoir réussi à dépasser le premier tome face à l'immensité de l'univers et ma faible compréhension de celui-ci. Il aura donc fallu Noise, un oneshot, pour changer cela.

Paru initialement en 2003 dans un format manga classique, le volume a été réédité depuis en grand format pour s'harmoniser à la nouvelle édition de Blame et est présenté désormais comme un tome 0, une aventure s'inscrivant dans le même univers, comme une histoire bonus. Il faut dire que même si le dessin est plus discret, plus modeste, on retrouve le même univers de cyberpunk et d'enquêtes très sombre avec une terrible organisation en train de prendre le pouvoir. 

Manga d'aventure, court et efficace, il nous met dans la peau de l'enquêtrice Susono Musubi qui met le doigt sur quelque chose avec son collègue en cherchant des enfants disparus. Les choses s'emballent alors et c'est une sorte de western cybernique punk totalement débridé auquel nous allons ensuite assister où des machines transhumanistes vont poursuivre notre enquêtrice qui se défendra avec une arme bien mystérieuse. 

Comme toujours avec Nihei, franchement, on ne comprend pas grand-chose en dehors des minces clés qu'il nous donne et on sent derrière un univers bien plus riche à base de tromperies des humains par les machines ou d'organisation pseudo religieuse cherchant la fin de l'humanité. Mais ce n'est pas grave, on se régale de ses propositions graphiques démesurées à base d'un trait rempli de hachures sombres rappelant ces fils qui nous connectent  tous de plus en plus et de ces tiges qui viennent figer béton et construction. C'est lunaire comme dessin, si immersif et ici, rempli d'une action sale et violente. 

Il faut avoir le coeur accroché quand on lit du Nihei. Ce n'est pas gentil. Ce n'est pas fait pour faire rêver. C'est fait pour réveiller. On passe ici la majeure partie du temps avec une héroïne en danger cherchant à y échapper et ce genre d'action pulp violente est bandante à lire. L'auteur puise à merveille dans le registre du gore et de la SF organique pour mettre en scène pour mieux venir nous secouer et nous déranger. Et ça fonctionne à merveille ! C'est assez unique dans le milieu du manga.