La Poésie de l'Insensé...
Lecteur de comics depuis sa prime jeunesse, l'acteur Keanu Reeves a eu l'occasion de créer son propre personnage (qui lui ressemble beaucoup, chose utile si le projet devient un jour un long métrage) en collaborant avec le scénariste Matt Kindt et le dessinateur Ron Garney sur BRZRKR, maxi-série en 12 numéros publiée sur un peu plus de deux ans. Si le résultat était inégal (ça avait plutôt bien commencé mais j'ai été moins convaincu au fil des numéros), le succès fut au rendez-vous, ce qui a poussé l'éditeur Boom! Studios à capitaliser sur le nom de l'interprète de John Wick avec une série de one-shots centrés sur le passé du guerrier immortel Unute, obligé de répandre le sang pour nourrir le berserker en lui, la fureur sacré du "guerrier-fauve".
Pour le premier épisode spécial, Keanu Reeves et son responsable éditorial ont fait appel à Steve Skroce. Révélé dans les années 90 sur des séries Marvel (Cable, X-Man, Amazing Spider-Man...), le canadien s'est ensuite éloigné du monde des comics pour travailler comme storyboarder pour le cinéma, principalement pour les réalisations et les productions des Wachowski. Ces dernières années, il est redevenu plus actif en bande dessinée avec des titres comme We Stand on Guard, Maestros et Pax Americana. Des titres que je n'ai pas lus et c'est donc avec cette Poésie de l'Insensé que je retrouve à nouveau les planches de Steve Skroce...
...et j'avoue que je garde une petite préférence pour son travail d'il y a 30 ans, plus percutant, même si l'ensemble reste tout de même très solide. Il y a toujours son sens du détail, beaucoup d'énergie dans les morceaux d'action, des designs de monstres réussis...c'est au niveau du scénario, également signé Skroce, que ça pêche un peu. C'est même très léger : il y a des milliers d'années, Unute est le seul défenseur de l'Atlantide contre les armées d'envahisseurs. Mais le roi qu'il sert est tombé sous l'influence du grand prêtre d'une nouvelle religion dédiée aux grands anciens. Leur "dieu" arrive bientôt et selon la prophétie, boire le sang de l'immortel peut leur permettre d'échapper à sa colère...
La Poésie de l'Insensé se résume donc au Berserker contre Cthulhu. L'idée est amusante et le dernier acte spectaculaire. Mais un spectacle tout de même creux, qui se résume à beaucoup de sang et de tripailles (comme dans la série principale, le gore est généreux, ça charcute et ça gicle dans tous les coins des cases) et de destruction. La bourrinade fait partie des démonstrations de force du berserker et il y a en a aussi dans Empire Déchu, mais de façon plus diffuse, sous le crayon plus élégant de Rebekah Isaacs.
Mattson Tomlin (A Vicious Circle) a imaginé une histoire d'amour et de trahison au coeur d'un empire oublié...l'atmosphère est différente du one-shot précédent, même plus intimiste par moments, avant que la violence finisse par éclater de nouveau. Tel est le destin d'Unute, incapable d'échapper à sa rage utilisée comme une arme par ceux qui l'entourent. Au-delà des blessures physiques, celles du coeur peuvent lui faire plus de mal et c'est un élément qui apporte une petite nuance supplémentaire à cet Empire Déchu.
Le deuxième album Bloodlines est déjà prévu, avec Jason Aaron et Francesco Manna pour une ambiance western et le retour de Keanu Reeves, Matt Kindt et Ron Garney pour The Lost Book of B.
En bref
La galerie de couvertures (régulières et alternatives) et la biographie des auteurs sont disponibles en fin de volume.
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