Ce premier tome d’une série annoncée comme une trilogie nous narre l’histoire croisée de trois personnages principaux, un enfant perdu, amnésique, un jeune homme sensible, fougueux, peu réfléchi, et une femme au prise avec une réalité qui la dépasse. Le scénario est bien construit, il pose les bases de l’époque, des difficultés et contradictions qui assaillent les personnages, entre idéalisme et accommodement avec la réalité pour les adultes et recherche d’identité pour l’enfant. Le dessin est puissant, déroutant, jouant avec les sensations, les sentiments, les ressentis, tout ceci traduit par des couleurs et des cadrages déstabilisants. Rien de négatif dans mon constat, au contraire. La période est dure. La vie des personnages l’est aussi. Ces cadrages, ces mises en pages, ces choix de couleurs permettent de mieux s’immerger dans l’histoire et de s’insérer en partie dans les tourments de l’époque. Le cahier de fin, fait de récit vécus et d’échanges avec le père de l’auteur est un complément intéressant qui replace le travail de l’auteur dans son contexte. Je retiens la dernière phrase de son père : « je comprends bien qu’à travers le nazisme tu veuilles aussi parler du présent, car aujourd’hui on connaît toutes sortes de formes d’extrémismes. Le pire est de s’en accommoder. » Un ouvrage donc qui par l’analyse du passé nous renvoie aussi à nos propres responsabilités. Résumé : destins croisés de 3 personnages face à la guerre 39/45 sur un dessin fascinant et déroutant mais en prise directe avec les bouleversements vécus par les protagonistes.