Décrit à raison par Delcourt comme le ''rejeton improbable de la Famille Adams et le demi-frère d'Hellboy'', The Goon témoigne, au fil des aventures, d'un rapiéçage malin de l'imaginaire tonitruant d'Eric Powell. Chaque pièce de viande, chaque balafre, chaque trou de balle révèlent une sensibilité contrastant avec l'ambiance brute (voire graveleuse) perçue au premier abord (à l'image de son graphisme à la fois grossier et souple). Toujours flanqué de son acolyte dégénéré Franky, The Goon souffle cette année ses quinze bougies dans un douzième volume qui résume par son simple titre ''Du Whisky et Du Sang'' l'aspect routinier que délivre parfois ce Frankenstein narratif. Il faut l'avouer, si les inconditionnels de The Goon se retrouveront facilement dans cette nouvelle palanquée de coups dans la tronche, d'action Acmé et d'humour potache, ce 12ème volume est loin d'être à la hauteur de ses prédécesseurs au point d'en pâtir graphiquement (les personnages se faisant plus raides qu'a l'accoutumé). À travers quatre aventures particulièrement expirées, le Goon affronte sa galerie habituelle de monstres (au programme, un énième combat contre un géant des marais particulièrement débile) sous le crayon d'un auteur qui délaye la sauce, ne parvenant ni à relancer les péripéties en cours ni à amuser avec ses dialogues joliment fleuris. C'est d'autant plus dommage que le Prêtre Zombie prédit l'arrivée d'une menace comme notre héros n'en a jamais connu dès les premières pages du recueil. Une promesse qui accentue l'impression de lire un volume intermédiaire et, ce, malgré la participation d'invités de marques, Kyle Host et Mark Bukingham, qui viennent relever le niveau de ce volume gentiment mécanique. On le sait, Powell a passé deux années particulièrement chaotiques (dont n'a pas eu connaissance le lecteur français grâce au travail régulier des éditions Delcourt), on attendra donc patiemment d'abord la compilation du délirant Big Man Plans ainsi que le retour de la série en grande forme. L'auteur promet d'ailleurs un changement de ton radical à l'image du mélancolique Chinatown. De quoi faire passer plus facilement le Whisky et le Sang de cette dernière tournée.