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Critique de Lazarus #1

par bulgroz le lun. 29 févr. 2016 Staff

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Jésus (...) cria d'une voix forte : « Lazare, sors ! » Et le mort sortit, les pieds et les mains liés de bandes, et le visage enveloppé d'un linge. Jésus leur dit : « déliez-le, et laissez-le aller ». L'Évangile selon Jean. Chap. 11 Le titre même du comic-book nous annonce la couleur, non pas qu'il y soit question de religion à proprement parler, plutôt de résurrection(s). Lazarus. Un titre pas forcément original, mais stimulant l'imaginaire et renvoyant à l'un des mythes ayant énormément influencé la culture populaire. La bande-dessinée n'y faisant évidemment pas exception : la longévité de Ras' al Ghul est due à sa fréquentation assidue des puits de Lazare et c'est également le nom de l'un des personnages de Midnight Nation… Sans parler de la franco-belge. Plus largement, Lazare est une référence particulièrement prisée de la culture geek et S.-F. : Les jeux (Mass Effect, Call of Duty), les films (Casper, Interstellar) ou même la série Doctor Who y font tous référence à leur manière. En choisissant un tel titre, nul doute donc que les auteurs ont voulu s'inscrire dans cette longue lignée, tout en utilisant l'imaginaire lié au fantasme de l'immortalité. David Bowie sur son dernier album, dont la parution a précédé de quelques jours seulement sa mort, chante également ce titre, Lazarus : « I've got scars, that can't be seen » il n'y a pas de meilleure B.O. imaginable pour la lecture de ce comic. Le terme B.O. est peut-être plus approprié qu'on ne le pense : à croire un article de The Hollywood Reporter daté de mars 2015, Matthew Tolmach penserait à produire une série Lazarus. Ce qui n'est pas forcément une bonne nouvelle quand a vu The amazing Spider-Man. Dans Lazarus, le Lazare est un personnage particulièrement puissant et résistant, chargé de défendre sa "famille" contre d'autres Lazares, venus d'autres familles... Ils évoluent dans un futur post-apocalyptique, qui n'a rien d'original et sent le déjà-vu : le monde renaît de ses cendres et une nouvelle société voit le jour. Les États-Unis sont aux mains de puissantes familles alternativement en guerre ou unies par des accords commerciaux. Elles règnent sur le restant de la population répartie en deux catégories distinctes : les serfs et les « déchets ». Inutile de dire que le sort de cette dernière catégorie n'a rien d'enviable... Là est donc le premier intérêt de ce récit : la transposition d'un modèle féodal dans le futur, aux États-Unis de surcroît, sûrement le seul endroit où ce type d'organisation n'a jamais existé, on serait tenté d'y voir une critique des inégalités et de la société de classes, terriblement actuelle. Ou un récit d'anticipation. « Dystopique » dit la quatrième de couverture. Le scénario n'est pour ainsi dire pas révolutionnaire, tant on a en tête les autres excellentes sorties d'Images ces derniers temps, portées par exemple par Remender ou Vaughan. Greg Rucka, récompensé par de nombreux prix est un auteur qui n'en est pas à son coup d'essai, il a eu l'occasion de travailler sur des titres phares de Marvel (X-Men, Wolverine, Spider Man, Daredevil…) et DC (Batman, Wonder Woman…). Malgré une histoire somme toute assez convenue, il fait pour ce premier tome, preuve d'une grande maîtrise. Très dynamique, le scénario laisse entrevoir petit-à-petit un univers complexe, le nom des personnages ou l'origine de l'apocalypse et celle du Lazare même, tout n'est pas dévoilé. Peut-être ne le sera-t-il jamais complètement, c'est là la marque des grandes sagas. Le lecteur doit donc être particulièrement attentif aux nombreux détails lui permettant de visualiser puis s'approprier le cadre général. Le dessinateur, Michael Lark, lui aussi multi-primé, connaît très bien Rucka puisqu'ils ont travaillé ensemble à l'élaboration de l'excellent Gotham central, ce qui leur a valu de remporter un Eisner en 2004. Lark et Santi Arcas - pour la couleur - réalisent un travail remarquable dès l'ouverture. L'encrage venant renforcer avec force les traits des personnages. On notera particulièrement les couleurs utilisées pour les couchers de soleil et les crépuscules, notamment dans la dernière partie où le violet et le rose, très présents, laissent peu à peu place à la nuit en conclusion du premier tome. Tout un programme. La violence est omniprésente dans le livre, mais sans jamais basculer dans le gore excessif et gratuit. Elle est distillée, dans l'essence même du Lazare, dans les rapports entre la famille et ses "déchets", évidemment, ainsi que dans les scènes de combat, assez peu nombreuses en fait, mais efficaces comme un katana, puisque c'est de ça dont il est question. Notons également la réflexion entreprise par Rucka sur les rapports entretenus entre les personnages. Ceux-ci sont complexes, et bien que les "bons" et les "mauvais" soient identifiables assez rapidement, nul doute que dans la suite de l'histoire les affaires de familles seront à l'origine de nombreux rebondissements. Lazarus est donc bien ce que son titre laisse deviner : un univers référencé, profondément ancré dans la culture populaire. Mais aussi une histoire de multiples résurrections : celles bien-sûr des protecteurs des "familles" ces clans féodaux administrant l'Amérique, et celle de la société même. Malgré un scénario qui, à première vue, n'offre rien d'original et des personnages auxquels on peine à s'identifier, le dynamisme, l'intrigue qui s'y déploient, en font un très bon premier tome. Ici réside peut-être la maîtrise de Rucka, Lark et Arcas : exposer les éléments constitutifs d'une histoire qui s'annonce épique !

En bref

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