Quand le manga réinvente les grands classiques de la peinture

Un ouvrage qui va faire parler

Hier est sorti un ouvrage qui a le mérite d'être original dont le titre parle tout seul : Quand le manga réinvente les grands classiques de la peinture 

De Botticelli à Picasso en passant par Van Gogh, découvrez les toiles de maître comme vous ne les aviez encore jamais vues ! Au fil des 112 pages de ce magnifique livre illustré, apprenez-en davantage sur ces classiques et laissez-vous surprendre par l’alliance étonnante du manga et des peintures iconiques au travers du regard de plus d’une quarantaine de mangaka et d’illustrateurs japonais.

Edité par MANA BOOKS, ce beau livre de plus de 100 pages a pour ambition de créer un lien entre des artistes contemporains et des artistes de renommée mondiale qui ont marqué leur époque. C'est ainsi qu'on va pouvoir (re)découvrir des toiles de maîtres revisitées façon manga avec en prime des explications détaillées sur les toiles d'origine, ce qui permet de mieux les appréhender, notamment pour les néophytes en peinture.

Quand on sort un livre de ce type qui ose toucher à ces peintures intemporelles qui ont traversé les âges et qui suscitent chez bon nombre de personnes une admiration et un respect sans faille, il faut bien avoir en tête qu'on prend un gros risque et qu'on va sans doute s'attirer les foudres des puristes.

Personnellement, je trouve le concept intéressant et c'est une manière originale de sensibiliser un certain public à la peinture. Mais aussi faut-il que cela soit fait avec goût et respect de l'oeuvre originale. Alors qu'en est-il ?

Ce livre ne se contente pas d'exposer des dessins les uns après les autres. Cela démarre par un petit rappel très intéressant de l'histoire de l'art des origines à nos jours pui on enchaîne avec quelques pages qui expliquent la place que la "copie" d'oeuvres a joué et montre que presque tous les artistes ont utilisé ce procédé à un moment ou à un autre pour récupérer une idée ou tout ou partie d'une oeuvre en la revisitant.

Concernant les dessins en eux-mêmes, on retrouve d'abord ceux en "paysage" puis ensuite ceux en "portrait", ce qui évite de tout le temps tourner le livre...bien vu ! 

La bohémienne endormie d'Henri Rousseau revisitée par Yoshioka Airi

Alors autant le dire de suite, c'est assez inégal dans l'ensemble. Même si tous les illustrateurs possèdent un talent certains, tous n'ont pas réussi (ou voulu !) à conserver l'esprit d'origine. Car ne l'oublions pas : ces peintures étaient rarement dénuées de sens et véhiculaient une sorte de message ou voulaient retranscrire un moment, une ambiance. Certains s'en sont merveilleusement tirés mais d'autres ont été moins inspirés et on se retrouve parfois avec des dessins un peu hors-sujet et d'autres tout droit sortis d'un anime lambda.

Certains crieront sûrement au sacrilège et ils auront peut-être en partie raison mais ce serait oublier les dessins qui, à mon sens, apportent vraiment quelque chose et rendent un bel hommage à l'oeuvre originale. Et ce livre en possèdent assurément.

Voilà donc un ouvrage qui mérite qu'on s'y attarde et qui va certainement donner envie à certains d'en savoir plus sur les oeuvres dont ces illustrateurs contemporains se sont inspirés pour nous en offrir une version actuelle.

L'éditeur a mis un extrait en ligne qui vous permettra de voir un peu de quoi il retourne. Personnellement, je trouve l'extrait mal choisi car il ne comporte pas les meilleures "adaptations" à mon sens.

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Commentaires (12)
  • Alexielios
    Membre

    Merci de ta réponse. L'idée n'est pas de faire un cours d'histoire de l'art avec, mais plus de les intéresser en laissant l'artbook à disposition dans le CDI. Comme c'est du manga, ça les attire comme des aimants, mais en même temps, il y a une dimension culturelle qui pourrait éveiller leur curiosité. Effectivement, une exploitation par le prof d'art plastique pourrait être intéressante également, selon ce qu'il fait, mais je le laisserai faire, n'ayant absolument pas les compétences pour x) Ceci dit, je lui en parlerai.

  • Willos
    Membre

    Le problème pour une étude croisée qui pourrait intéresser les jeunes, c'est qu'il n'y a pas la démarche de l'illustrateur qui pourrait aiguiller des pistes de réflexions plus contemporaines. Mais il doit y avoir moyen d'approfondir le sujet avant de proposer une approche diacritique d’œuvres choisies. À l'époque mon prof d'Histoire au collège nous avait fait étudier en parallèle dans le cadre de l'âge d'or des Provinces Unies, une planche d'Astérix, ça devait être dans Le Devin, qui parodiait un Rembrandt, La Leçon d'anatomie du docteur Tulp. Donc avec la taille des pages et les techniques de scan actuelles, ça doit passer largement sur un vidéo-projecteur. La démarche plus ludique de retrouver les styles/œuvres/artistes à partir des composantes des réinterprétations peut aussi avoir un intérêt, pour peu de choisir celles réussies, et que les élèves aient déjà été initiés au sujet. En gros c'est le travail critique que le lecteur fait, mais non avec des acquis persos, mais comme outil d'apprentissage. L'artbook n'a plus l'esthétique pour finalité, mais devient alors un vecteur de savoir. Sauf que pour le coup, le savoir n'est pas inclus dans média, ce n'est clairement pas un manuel d'Histoire de l'Art clef en main, donc ça demanderait un travail préparatoire pour un enseignement encadré avec précaution.

  • Alexielios
    Membre

    Ce livre m'intrigue, et je trouve la réflexion de Willos très intéressante. ça me donne envie de l'acheter pour voir, voir même de le proposer pour le CDI du collège et/ou du lycée (?). Pensez-vous que ce serait adapté pour des jeunes en intro à l'histoire de l'art (matière quelque peu délaissée depuis la nouvelle réforme du collège)?

  • Tori
    Staff

    J'ai eu les mêmes réflexions que toi concernant le manque d'information sur les auteurs des nouvelles versions, alors qu'on nous présente les auteurs des oeuvres d'origine, qui sont bien plus connus (et, au pire, dont les infos sont moins compliquées à trouver), ainsi que de l'absence marquante de la Joconde (et, partant, de Léonard de Vinci), mais d'autres artistes majeurs manquent à l'appel (je pense à Raphaël, Michel-Ange, Dalí, ou encore Bosch, Goya ou Léger), alors que d'autres voient plusieurs de leurs oeuvres présentées. C'est aussi pour ça qu'un deuxième volume serait intéressant.

  • Willos
    Membre

    Heureusement que c'est le style manga et non le genre, parce que du Soulages en noir et blanc ça aurait été très moche. Est-ce L'Origine du monde version manga a le droit à sa mosaïque ? Avec l'extrait, c'est effectivement inégal. Le problème est d'ailleurs là, comme représenter un style, avec un autre style ? Formellement c'est très délicat, est c'est plus sur le fond que ça ce joue. Pour le figuratif, en particulier les œuvres académiques, pas de problème, le manga est lui-même une adaptation de la réalité, il suffit de représenter ce qu l'auteur à représenter, le sujet et la composition aidant grandement. Le problème comme mentionné dans l'article, c'est la signification et le symbolisme de la représentation. Comment concrétiser de l'abstrait sans le dénaturer ? Comment garder un art naïf ou brut quand on est un professionnel d'un genre artistique empreint d'industrialisation ? Quant à y voir une démarche pédagogique ou que ça suscite un intérêt pour l'art, j'en doute. Au contraire, le côté classique parlera à plus de monde pour l'aspect culture générale et patrimonial, que le côté art pour les amateurs éclairés, on peut lui accorder cela. Mais la frise chronologique est vraiment brouillonne et ne reflète pas les patentées des styles ou leur diffusion spatio-temporelle, avec des mélanges entre les périodes chronologiques et les styles. D'autant que finalement, n'est représenté qu’essentiellement du moderne et un peu de contemporain. Mais sans cohérence, si ce n'est comme l'a mentionné Skeet, le format, c'est trop léger pour être à l'image d'une muséographie, dont on peut extraire un guide d'expo. C'est plus niveau cabinet de curiosité. Et l'on a seulement des infos sur l'originale, c'est faire fi de la copie, qui elle-même est une œuvre qui a le droit au chapitre. Quid de l'auteur ? On n'est pas plus avancé sur la démarche de l'artiste, si c'est une commande, une sélection dans un style donné, ou un choix libre, pourquoi tel artiste, son style perso, son affecte ou sa compréhension de l'originale, ça aurait été plus intéressant que des infos trouvables sur internet, alors que c'est contextuellement le même principe d'histoire de l'art. Sous cette forme, ça reste trop impersonnel pour entrevoir les différents niveaux de lecture inhérent à chaque toile ayant accédée au statut de classique. Plus qu'une simple copie, un "à la manière de" aurait été plus adéquat quand le résultat est trop dépourvu d'âme. Bien que la narration n'était pas très poussée, les parodies graphique dans l'album L'anniversaire d'Astérix et Obélix étaient bien pensée avec un bon effet visuel, et particulier le "D'après Arcimboldo" dont j'apprécie la recherche graphique originelle. On retrouve d'ailleurs ces parodie dans les autres volumes de la série. Dans l'univers du manga, c'est sans doute La Liberté guidant le peuple qui détient la palme de la référence. Si pour des raisons de droits il n'a pas été possible de caser un Goku portant son Genki Dama tel Atlas dans un style classique, j’aurais bien vu la métaphore d'un Tezuka sur retable façon Christ pentocrator. Pour revenir à ce livre, en voyant les titres des œuvres et les auteurs, on peut aussi se poser des questions sur les choix, je vais me répéter, mais sur ce sujet, un Arcimboldo est l’exercice de style à ne pas omettre, par exemple réunir tous les clichés du manga pour en faire une, voire 2 versions, shônen et shôjô. Autre absence, si on vous demande LE tableau, c'est La Joconde évidemment, et donc le maître, De Vinci. Il y a peut-être dans certains cas des notions d'ayants droits, bien que cela concerne plus les œuvres contemporaines, ou celles se trouvant dans des collections privées, et encore, pas sûr que ces hommages ne puisse pas en être exemptés légalement. Bref, sans avoir pu juger des toutes les qualités graphiques présentes dans ces illustrations, je trouve la présentation de ce corpus trop bancale pour que par mimétisme, on puisse le classer dans les "beaux livres". C'est clairement un artbook qui s'adresse aux amateurs de manga, mais le présenter autrement serait le survendre. Reste qu'un artbook couleur de 100 pages avec du contenu inédit et une approche originale, ça reste potentiellement un bon rapport qualité/prix.

  • Tori
    Staff

    Grâce à ce livre, j'ai découvert quelques artistes et tableaux... Bon, certaines adaptations sont un peu trop fidèles (et d'autres, au contraire, s'en éloignent un peu trop), mais j'ai trouvé l'idée intéressante... Et ça donne envie d'avoir un deuxième volume !

  • KssioP
    Staff

    Oh mais je suis d'accord avec toi Skeet^^

  • Skeet
    Staff

    @DéesseVonKiki : tu as raison, rien de mieux que les musées pour initier des gens à l'art mais le fait qu'il y ait un lien avec le manga fait que des personnes qui n'auraient pas fait la démarche d'aller dans un musée vont peut-être découvrir des tableaux qu'ils ne connaissaient pas grâce à ce livre (ou obtenir des explications sur les toiles en questions).

  • eenangel
    Membre

    @DéesseVonKiki: "None Taken". Et bizarrement je m'attendais à ce que ce livre te fasse de l’œil ;).

  • KssioP
    Staff

    Il me fait de l’œil depuis son annonce. Je connaissais déjà certaines de ces créations façon manga et j'adore personnellement. Après je ne le considère pas comme une manière d'initier les jeunes à la peinture ou à l'art, rien de mieux que les musées pour cela. je pense même que ce livre intéressera principalement ceux qui sont déjà des connaisseurs ou des appréciateurs de jolies toiles. Un livre à contempler et recomtempler. En famille ou seul. Enfin ce qui est bien avec l'art, c'est qu'au final chacun est libre d'interpréter comme il le veut. Certes les puristes diront que non, pourtant l'art visuel est une question de ressenti, d'ailleurs selon son état d'esprit du moment, on ne voit pas une toile de la même manière. Tout dépend ce que l'on recherche en fait. ^^ @ennangel: forcément c'est pas pour toi, t'es déjà pas sensible aux artbooks hein :p vouhou je te taquine (mais c'est vrai)

  • Skeet
    Staff

    Normalement si on lit bien le livre, on ne peut pas confondre, toutes les explications vont dans ce sens.

  • eenangel
    Membre

    Bonne idée sur le fond après il faut que sur la forme cela suive (qualité du dessin et respect de l'oeuvre original). Le petit inconvénient avec ce genre de chose c'est que certaines personnes (généralement assez jeune) auraient facilement tendance à croire que par exemple Noki est à l'origine de "La charmeuse de serpents" et non pas Rousseau... Les même qui te diraient que Jeff Buckley est à l'origine d'Hallelujah au lieu de Bernard Cohen^^. Mais bon les illustrations semblent plutôt jolies.