Retour vers le passé : Deux salopards en enfer (1969)

 

REALISATEUR

Tonino Ricci

SCENARISTES

Tonino Ricci et Piero Regnoli

DISTRIBUTION

Klaus Kinski, George Hilton, Ray Saunders, Betsy Bell…

INFOS

Long métrage italien
Genre : guerre
Titre original : Il dito nella piaga
Année de production : 1969

Dans sa longue carrière (plus de 130 rôles en 40 ans), l’allemand Klaus Kinski a tout tourné, enchaînant films d’auteurs, séries B et nanars les plus improbables, jusqu’à huit longs métrages par an. Construisant sa légende, l’homme au regard halluciné et aux colères mémorables fut longtemps l’un des piliers du cinéma d’exploitation européen, passant régulièrement d’un genre à l’autre. Dans les films de guerre, il interprétait surtout des officiers nazis. C’est le cas par exemple dans Cinq pour l’Enfer de Gianfranco Parolini (1969) et Les Léopards de Churchill de Maurizio Pradeaux (1970). Mais dans Deux salopards en enfer (premier passage derrière la caméra de Tonino Ricci, futur réalisateur de nanars comme le post-apo Rage et le sous-Conan Thor le guerrier), Kinski campe pour une fois un soldat américain.

Mais pas un G.I. valeureux et héroïque. Le titre français donne un bon indice sur la personnalité du bonhomme (il y a eu beaucoup de salopards dans les titres français des bisseries guerrières après le succès des Douze Salopards de Robert Aldrich). Brian Haskins est un soldat désabusé qui ne croit pas au combat dans lequel il a été enrôlé et qui ne pense qu’à se remplir les poches. Après son dernier pillage, il est arrêté et conduit en cour martiale en compagnie d’un soldat noir qui a tué son supérieur. Alors qu’ils allaient être fusillés, une attaque des allemands les sauve in extremis. Ils s’enfuient, suivis par l’officier chargé de leur exécution qui a aussi échappé au massacre…

 

 

Avec sa présence charismatique et sa gueule incroyable, Klaus Kinski vole aisément la vedette aux autres têtes d’affiche. George Hilton, autre visage bien connu des amateurs de séries B italiennes, est un brin rigide en lieutenant fraîchement émoulu de West Point qui se décompose dès que les premières balles se mettent à siffler autour de lui (le film aurait pu s’appeler « Deux Salopards et un froussard en enfer »). Ray Saunders (inconnu au bataillon) complète ce trio, tout en retenue pendant une grande partie du film, sauf dans le feu de l’action. Il y a une vraie tension qui s’installe entre ces trois protagonistes, une dynamique intéressante (avec un discours anti-guerre marqué) qui pourrait exploser à tout moment.

L’histoire prend une autre tournure lorsque cette petite équipe se réfugie dans un village italien. Les habitants les prennent pour des sauveurs, ce qu’ils ne sont franchement pas. Mais les trois américains vont évoluer au contact des villageois. Le ton devient alors plus mélodramatique, mais de façon inégale. L’histoire d’amour entre Brian et la jolie Danièle est forcée, beaucoup trop maladroite. C’est plus convaincant pour Calvin, le soldat noir, qui va réapprendre à faire confiance à quelqu’un au-delà de la couleur de la peau par sa touchante relation d’amitié avec un jeune orphelin.

 

 

Le scénario prend ce temps pour creuser les personnages, même si le rythme s’en ressent. Deux salopards en enfer n’est pas sans défauts (notamment au niveau de la mise en scène, pas vraiment maîtrisée, et de la photographie, le manque de moyens est flagrant) mais le métrage étonne par son symbolisme religieux (et ce dès son introduction qui peut surprendre…je me suis d’ailleurs demandé ce qui se passait pendant deux minutes et si je ne m’étais pas trompé de film…il n’y avait vraiment que le cinoche d’exploitation italien pour débuter une série B de guerre de cette manière) et par son fatalisme souligné, entre autres, par l’emphase de la musique composée par Riz Ortolani (Le Dernier Jour de la ColèreLa Longue Nuit de l’Exorcisme…).

Le dernier acte renoue ensuite avec l’action et une percutante bataille finale qui voit les nazis prendre d’assaut le village uniquement défendu par ces trois soldats si différents unis malgré eux…et Klaus Kinski y joue comme un possédé, jusqu’à l’hystérie la plus complète dans son ultime scène.

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