Retour vers le passé : Les Menottes Rouges (1974)

 

Thriller
Long métrage japonais
Réalisé par Yukio Noda
Scénarisé par Hiroo Matsuda et Fumio Konami d’après le manga de Tōru Shinohara
Avec Miki Sugimoto, Eiji Go, Hideo Murota…
Titre original : Zeroka no onna: Akai wappa
Année de production : 1974

Le pinku eiga est un sous-genre du cinéma d’exploitation japonais qui mettait l’accent sur la nudité et l’érotisme. Les studios les déclinaient sous différentes formes…par exemple, la Nikkatsu regroupait ses « films roses » sous la bannière Roman Porno (malgré cette appellation le sexe restait soft à cause de la censure) tandis que la Toei s’est tourné de plus en plus vers la pinky violence, avec ses histoires de flics, de yakuzas, de gangs de filles (souvent topless) ou de nonnes sadiques. Les Menottes Rouges (selon plusieurs sources, le film serait sorti en France à l’époque sous le titre hautement débile de L’Aubergine était presque farcie) met en scène une policière aux méthodes expéditives qui utilise une paire de menottes améliorées pour trancher la gorge de ses proies.

 

 

L’introduction annonce d’emblée la couleur (oui, il y aura beaucoup de rouge). Incarnée par Miki Sugimoto (l’une des égéries du pinku eiga), une jeune femme se laisse séduire par un diplomate venu des U.S.A. qui l’emmène dans sa chambre d’hôtel. Là, il la dénude et commence à s’exciter avant d’aller chercher quelques instruments sado-maso pour épicer la soirée. L’héroïne (dont le prénom est Rei) sort alors de sa torpeur pour accuser le bonhomme d’avoir tué une jeune américaine, ce que le salaud sûr de son immunité confirme. Elle sort son flingue, lui tire dans les burnes avant de se servir de ses menottes comme elle seule est capable de le faire.

Cette exécution n’est pas du goût de sa hiérarchie et elle est jetée au trou en compagnie de prostituées qui la passent à tabac. Peu de temps après, la fille du futur premier ministre est kidnappée par une bande de tarés qui la violent à répétition (dans une scène difficilement supportable). Parce qu’il craint pour sa réputation, l’homme politique ne veut pas que la chose s’ébruite et il donne carte blanche à la police pour la récupérer par tous les moyens possibles. Le commissaire décide de libérer Rei en lui promettant de classer son dossier si elle ramène la fille après avoir tué tous les membres du gang pour ne pas laisser de témoins…

 

 

 

Adaptation d’un manga de Toru Shinohara, à qui l’on doit également les Sasori portés à l’écran à la même période (Elle s’appelait Scorpion), Les Menottes Rouges suit une héroïne troublante, dont le mutisme et l’air boudeur rendent difficiles à cerner dans l’exécution de son plan, qui navigue entre des chefs hypocrites et calculateurs et des criminels complètement dégénérés que l’on croirait sortis de La Dernière Maison sur la Gauche de Wes Craven. Les personnages masculins sont les pires spécimens d’humanité qui puissent exister (c’est le moins que l’on puisse dire) et le seul mec sympathique, un adolescent dégoûté par la violence extrême de son frère, paiera sa gentillesse d’une façon horrible.

Si les acteurs ne font pas dans la demi-mesure (l’actrice principale est souvent impassible alors que les hommes organisent un hallucinant concours de cabotinage), le réalisateur soigne une atmosphère sordide aux couleurs pop décalées et éclatantes et livre des morceaux d’action et de sadisme aussi efficaces qu’outranciers (la torture se fait au chalumeau et les gunfights déversent des hectolitres de sang en geyser) avant un règlement de comptes final dans une déchetterie étrangement beau dans son esthétique, conclusion cruelle et nihiliste.

 

 

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