GG Comics HS 10 : Interview Stjepan Sejic [Paris Fan Festival 2024]

Découvrez notre interview de Stjepan Sejic réalisée au Paris Fan Festival 2024 en audio !

 

Bienvenue dans ce nouvel hors sujet des GGcomics où vous pourrez découvrir notre interview de Stjepan Sejic, réalisée lors du Paris Fan Festival 2024 : entretien où nous revenons sur les thèmes de ses comics, la façon dont il les crée mais aussi sur son mode de vie loin des big two. Bonne Interview !

Audio :

 

Vidéo :

 

Retanscription : 

Santuary : Bonjour Stjepan Sejic, pouvez-vous vous présenter pour nos auditeurs ?

Stjepan Sejic : Bonjour, je suis Stjepan Sejic. Je suis un scénariste et artiste croate et  jongleur amateur (rire). Je fais plein de comics et un roman, voilà ce que je fais.

S : Harleen, Aphrodite IX, Fine Print, Sunstone, vos récits sont  principalement sur les femmes et un peu sur le sexe.

S. Sejic : Parfois Oui. (Rires)

S : Pouvez-vous expliquer pourquoi vous choisissez des histoires sur les femmes et pourquoi vous abordez les sujets du sexe ?

S. Sejic : Je n'ai pas vraiment choisi ça, c'est plutôt ça qui m'a choisi. Non, en fait, tout cela est arrivé par pure coïncidence. J'ai souvent été mis sur des projets avec des personnages féminins ou j'ai commencé à en créer un, et la plupart du temps, c'était par accident. Par exemple, j'ai toujours voulu travailler sur Witchblade parce que je trouvais le personnage et son armure cool. Je suis un grand fan de HR Giger, j’aime bien le style du personnage qui a un côté zenomorphique. Ensuite, j'ai travaillé sur mon propre comic, Ravine, qui avait deux protagonistes, Stein et Lynn. Puis, j'ai accepté de travailler sur Aphrodite IX, principalement parce que je collaborais étroitement avec Top Cow, et leurs personnages populaires étaient souvent féminins. Sunstone n'était pas prévu du tout. C'était une manière pour moi de gérer mon épuisement créatif. Je pensais arrêter les comics et finalement je me suis encore plus impliqué. Donc nous y voilà.

S : Effectivement, mais pourquoi le sexe du coup ?

S. Sejic : Pourquoi le sexe ? Parce que ce n'est pas souvent traité de manière non pornographique. Il y a deux approches : les comics pornos, qui sont tout à fait valables et servent leur propre but, et les comics matures qui traitent le sexe de manière mature. C'est devenu une chose populaire à faire. Ce n'est pas juste moi, il y a eu des titres comme Sex Criminals, même Saga en a beaucoup. Il y a plein de comics avec une approche similaire, on peut citer Pat Shand qui fait de supers œuvres... Au final, le sexe n’est pas vraiment le coeur du sujet, c'était surtout sur les relations en général. Ce que je fais, ce sont des romances pour lecteurs matures. C'est très standard dans les romans d'amour, mais on ne le voit pas beaucoup dans les comics américains, je ne parle pas des comics en général, le Japon fait de super choses.  Mais dans les comics américains, ils ont tendance à réduire l'existence de ce genre de romance. Pour ma part, j'ai décidé de faire Sunstone où c’était sur des tranches de vie sur des personnes. Le sexe est présent, mais ce n'est pas l'élément moteur. C'est juste un des éléments de l'histoire. C’est la même chose avec Fine Print qui aborde le sujet des personnes qui font des choses de la mauvaise manière et comment ça empire au point d’en faire un gros bazar. Mais ça reste un récit mature pour une audience mature, donc c’est plus qu’une histoire où des gens couchent avec d’autres, parfois [les lecteurs] le comprennent (rire).

S : C'est drôle, j’allais justement parler de ça car quand je lis vos livres, tout le monde parle du sexe, mais ce ne sont pas des histoires de sexe : ce sont des histoires de sentiments, de relations humaines. Comment faites-vous pour être si réaliste sur ces sentiments ?

S. Sejic : J'utilise un truc simple. Je me rappelle que tout le monde est un idiot. (Rires) Non, sérieusement, ça semble drôle, mais on est juste tous des idiots essayant de rendre notre vie fonctionnelle. Quand ça marche, c’est cool, on a l'air compétent, mais la plupart du temps, on avance en disant "je ne sais pas ce que je fais". Et c'est ce que je capture dans mes personnages, cette sorte de confusion totale, cette imperfection de l'expérience humaine. Parfois les gens parlent de personnages imparfaits, mais [il faut] des personnages véritablement imparfaits. Vous ne pouvez pas avoir de défauts trop excessifs. Non, ils doivent avoir de véritables défauts… Des fois, ils sabotent leurs propres relations et tu te dis: “pourquoi ils ne parlent pas simplement entre eux ?” et quand tu commences à te rappeler de tes propres relations, tu te dis pourquoi tu ne l’as pas fait également. C’est ça la recette. C'est la partie amusante. J'adore écrire sur ce genre de choses parce que c'est très humain, c'est très terre-à-terre, et c'est pourquoi les gens, quand ils lisent mes livres, se disent : « Je vois où ça va”. Et puis ils pleurent. (rires)

S : Est-ce que votre femme vous aide pour construire vos histoires ou est-ce que vous le faites seul ?

S. Sejic : Ma femme et moi travaillons chacun sur nos propres comics, mais nous sommes en quelque sorte le premier niveau de relecture l'un pour l'autre. Nous lisons le livre, nous lisons les mises à jour et disons “d'accord, ça fonctionne bien, c'est intrigant. C'est cool, c'est sympa” ou alors  “c'est confus. Tu dois clarifier ça. Tu n'as pas vraiment nettoyé ce passage.” Parfois, en tant qu'écrivain, tu vas avoir des choses qui te semblent claires parce que tu sais où ça va. Tu sais comment c'est, donc tu vas sauter la partie où tu es censé expliquer cet élément au public. Et ça m'arrive encore. J'écris depuis longtemps, mais de temps en temps, elle va dire : "De quoi s'agit-il ?" Et je me dis : "Ah oui, je devrais en fait clarifier ça."

S : Pour moi, il y a un moment clé dans votre carrière. “Harleen” a été un grand succès chez DC et en France, tout le monde voulait la suite, mais subitement vous avez dit “non, je ne ferai pas de suite car je préfère travailler sur mes propres projets.”

S. Sejic : Oui, j'aime travailler avec DC. Je travaille encore sur des choses (NB : principalement des covers) de temps en temps. Mais le fait est que je n'ai pas le temps, s'il faut choisir entre mon propre travail indépendant ou un travail rémunéré. Quand tu as des best-sellers en tant que créateur, ils te rapportent trois fois plus. Et puis c'est comme ça, comment prends-tu cette décision ? J'ai écrit “Harleen 2”, j'ai écrit “Isley” (NB : Le nom de famille de Poison Ivy), j'ai écrit les grandes lignes de “Harleen 3”. Ils sont cinq fois meilleurs que la première histoire, mais en même temps, comment trouver le temps de les réaliser ?

L’auteur a finalement publié une ébauche de la suite dans le “Harley Quinn Black + White + Red (2020) #1”

S : Et il est normal que vous préférez d'abord travailler sur vos propres projets. Et c'est drôle parce que je connais votre Patreon depuis 2020. A cette époque, vous aviez déjà le votre et votre Twitch que je suivais également. Pour moi, vous êtes sûrement le premier artiste qui a ouvert la voie pour vivre un autre style de vie parce que vous vivez uniquement par des voies indépendantes [hors du milieu des comics]. Ainsi, pouvez-vous nous expliquer comment vous avez-vous choisi cette voie ? Comment avez-vous choisi Patreon ?

S. Sejic : Twitch et Patreon fonctionnent pour les personnes disciplinées, qui continueront à créer du contenu parce que c'est en gros une sorte de pacte entre toi et les personnes qui t'aident à réellement créer tes œuvres. Je traite mes patreons avec le plus grand respect, et je continue de livrer ce que j'ai promis. Parfois, s'il y a un problème de santé ou autre, je fais un post à ce sujet, mais deux mois plus tard, je vais dire : "Voici le double du nombre de pages." Je prends Patreon très au sérieux et ça paie. Les gens qui viennent là-bas voient vraiment que chaque mois, ils vont obtenir ce qu'ils attendent. S'ils me posent une question dans les messages, ils vont avoir une réponse.

En prenant un abonnement sur le patreon de l’auteur, vous avez accès à l’intégralité de ces œuvres à n’importe quel palier payant (même 1€ !)


S : Pour préciser, vous avez presque 9 000 personnes qui suivent votre Patreon. Donc vous avez un compte Patreon conséquent.

S. Sejic : Oui. Et c'est ça, il y a des options en ce moment. Si tu veux travailler dans les comics, si tu veux travailler dans n'importe quel domaine créatif, il y a des options pour le faire et en vivre. Le problème, c'est que les gens me demandent comment faire pour réussir via certains chemins que j'ai pris mais c’est compliqué aujourd’hui car ils sont maintenant bouchés.

S: Pas tant que ça ?!

S. Sejic : Si, ils le sont, et je vais te dire pourquoi. Facebook, quand j'ai commencé, c’était différent.

S : Ah oui, exact. 

S. Sejic : DeviantArt, quand j'ai commencé, était très différent. Twitter, quand j'ai commencé, était très différent aussi. C'était facile pour moi de toucher du monde à l'époque et de gagner un public et de faire voir mes productions. Mais avec le temps, les choses ont changé. Et maintenant, je ne peux même pas dire aux gens, "Hé, voici la marche à suivre. Faites juste ça."

L’artiste proposait à l’époque des exclusivités sur son compte twitter mais se consacre quasi exclusivement à son patreon aujourd’hui.

S : Oui, en ce sens, vous avez totalement raison.

S. Sejic : De nos jours, les choses ont changé. Je suis là, je me dis : j'aimerais pouvoir vous donner des conseils. Je peux vous dire de créer un Patreon, mais ça ne va pas faire grand-chose en soi. Tu dois avoir une portée (NB : une audience). Tu dois avoir un moyen d'accéder à un public pour que les gens voient tes oeuvres et se disent, "Hé, c'est quelque chose que j'aimerais soutenir." Maintenant, il y a des moyens, comme je l'ai dit, vous pouvez faire des choses sur Webtoons, où vous pouvez avoir votre Patreon à la fin. Cela aide énormément. Ça passe de quelque chose qui t'aide à joindre les deux bouts à, si tu es assez persistant, être ton travail à temps complet.

S : Si je regarde par rapport à ma femme (Equinoxe), qui est également une artiste, on observe qu’il est également très difficile de développer son Instagram actuellement.

S. Sejic : Parce qu'Instagram s'est transformé en Facebook et TikTok.

S : Oui, surtout depuis l’arrivée des Reels et autres fonctions. Donc, que suggérez-vous pour les artistes qui souhaitent réussir et avoir un Patreon comme le vôtre ? Juste travailler ?

S. Sejic : Continuez à travailler et continuez à publier littéralement sur tout ce que vous pouvez jusqu'à ce que vous y arrivez. C'est quasiment un travail de 24 heures sur 24. Et une fois que vous avez réussi, c'est un travail de 20 heures par jour. Sans blague. C'est un exercice constant de patience parce que vous devez continuer à promouvoir votre travail sur internet. 


Un exemple de post de l’artiste sur Patreon


Tout le monde agite ses clés : tu dois agiter tes clés encore plus fort.

C'est un triste fait, mais c'est comme ça. Et si vous êtes sur Instagram, assurez-vous que, si vous faites du dessin numérique, faites des vidéos accélérées de votre flux de travail, pour dire : "Hé, voici ce que j'ai fait.". Mettez de la musique en arrière-plan, accélérez une vidéo de cinq minutes et bam, mettez-la [sur les réseaux sociaux]. Continuez à les mettre. Vous allez attirer de plus en plus de personnes. C'est une question de persévérance et de constance. C'est un grind (NB : une progression petit à petit). C'est ce que c'est. J'ai créé mon Patreon après cinq ans de Sunstone. À ce moment-là, j'avais un grand nombre de personnes et les gens sont venus sur mon Patreon parce qu'ils savaient que cette personne lunatique avait donné cette bande dessinée gratuitement pendant cinq ans. Donc bien sûr, il va continuer à livrer. Donc, j’ai, en quelque sorte, prouvé à mes auditeurs que j’étais digne de confiance avant le succès, mais que dire… c'est compliqué.

S : Mais vous avez un super patreon qui traduit votre succès, donc félicitations surtout !

S. Sejic : Merci

S :  Aujourd’hui, vous travaillez donc principalement en indépendant mais pensez-vous qu'un jour vous ferez à nouveau un récit pour Marvel ou DC ou vous resterez sur vos propres œuvres ?

S. Sejic : Je n'ai aucun intérêt pour Marvel, DC, définitivement.

S : Pourquoi ? A cause des personnages ?

S. Sejic : Ouais, déjà chez Marvel, le seul personnage que j'aime, et c’est bizarre, c’est Spider-Man. Je préfère DC en général.

S : Même pas une histoire pour Blackcat ?

S. Sejic : Oui, je pourrais faire ça. Je pourrais faire une histoire dans l’univers de Spider-Man. Pas de problème. Mais au-delà de ça, rien.

S : Si demain, Marvel venait vous voir, seriez-vous intéressé pour faire un Spider-Man ?

S. Sejic : Ils devront faire un grooos chèque.(Rires)  Non sérieusement, si je faisais cette série, je devrais refaire toutes les recherches. Et les recherches prennent du temps et donc…

S : (Rire) On comprend tout à fait ! Juste pour finir, avez-vous quelque chose à dire à votre public français ?

S. Sejic : Continuez à lire. Je vais continuer à faire des bandes dessinées. Il n'y a rien qui arrêtera ce train jusqu'à ce que je meure, alors espérons que je ne meure pas. (Rires) 

S:  Merci beaucoup Stjepan Sejic. C'était très intéressant.

C’était l’interview de Stjepan Sejic, Un grand merci au Paris Fan Festival d’avoir permis cette rencontre, Interview réalisée par moi-même, Blackiruah et un grand merci à Sn Parod pour son doublage de qualité. A la prochaine


 

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Commentaires (1)
  • weyb
    Membre

    tres interessant, surtout la partie sur Patreon !!!