Un dernier tour de piste

Après un tome bien ficelé mais plein de combats qui m'avait moins enthousiasmée, j'ai l'impression que l'auteur déploie vraiment tout son talent ici en alliant duels épiques et développement poignant des personnages pour à nouveau mettre en avant de manière fulgurante une figure clé de l'histoire. Un quasi coup de maître !

En fait depuis le début, Karakuri Circus est une série qui alterne entre coups de génie et moment toujours aussi épique mais plus tranquille. On a ainsi des pointes d'émotion très fortes dues au génie créatif de l'auteur mais parcheminées sur l'ensemble de l'oeuvre, ce qui fait que parfois l'intérêt baisse avant d'être à nouveau réveillé. Ce fut le cas ici !

Reprenant au début le classique schéma de combat de RPG face à un groupe ennemi où on passe des sous-fifres, aux seconds couteaux, aux bras du boss puis au boss final, je pensais tomber sur un tome assez prévisible. Ce ne fut pas du tout le cas. Avec son semblant de redite du tome précédent, celui-ci cachait en fait la complexité qu'il manquait à ce dernier et j'en suis ravie. J'ai ainsi dans un premier temps beaucoup aimé assister au développement des nouveaux shirogane venus rejoindre les précédents et renforcer l'équipe. Comme ceux que l'on connaît, ils ont un sacré passé, dramatique à souhait, qui trouve un écho dans les matchs qui se jouent et renforce ainsi l'émotion de ce qui se joue.

Mais c'est surtout la figure de Narumi, une fois de plus, qu'on prend plaisir à suivre. Sans le vouloir, il a vraiment tout du chef de file charismatique, qui ne veut pas se battre mais le fait quand même pour défendre son idéal. Les duos qu'il va former avec les différents shirogane au secours desquels il va aller seront impeccables. J'ai en particulier celui avec Faceless, cet homme difficile à cerner qui a un passé richement tragique. Voir la force grandissante de Narumi en tant que moteur d'une autre forme de combat est saisissant et c'est retranscrit avec force dans le dessin puissamment évocateur du mangaka, qui en fait un Prométhée moderne.

La mise en scène de Kazuhiro Fujita est d'ailleurs toujours aussi impressionnante. Ce maître marionnettiste fait ce qu'il veut de nous. Ici, il passe d'un schéma répétitif dans un lieu ordonné, pour aller à un duel annoncé face aux Quatre Pionniers, avant de complètement renverser la situation. On sent régulièrement de brusque accélérations. La tension monde. La peur est partout. On craint énormément pour nos héros tant la situation semble désespérée à plusieurs reprise mais l'auteur sait nous surprendre avec de beaux retournements de situation qui à chaque fois font sens. Tout ne repose pas sur de la baston, loin de là, c'est plutôt la caractérisation psychologique des personnages qui fait loi et notamment les liens filiaux au sens le plus large du terme. C'est pourquoi la série nous touche autant.

Le dernier coup de chapeau que Fujita imagine est grandiose. Ce sera l'un des grands moments de la série. La mise en scène en est parfaite, que ce soit pour la pluie d'émotion qui l'accompagne ou la pluie d'hémoglobine qu'elle suscite. C'était surtout totalement inattendu, brutal et violent, même si cela fait sens. L'histoire prend un nouveau virage ici avec ceci.