La déshumanisation du monde de l'édition

Après un premier tome où j'avais aimé le concept mais trouvé sa mise en scène un peu timide et maladroite, j'attendais beaucoup du tome 2 pour me convaincre ou me faire mettre le stop. C'est le premier qui l'a emporté.

Avec une conclusion en cliffhanger dur dur d'imaginer ce qu'allait pouvoir être ce deuxième volume. Les auteurs ont su me surprendre en nous emmenant, non pas sur tout autre chose, mais sur quelque chose que je n'attendais pas. Plutôt que de rester centré sur le couple du héros, c'est sa carrière professionnelle qui va être zieutée et qui va prendre de l'importance avec une tournure inattendue que j'ai beaucoup aimé.

Kiwa a été embauché dans l'entreprise de sa petite amie et postule donc pour avoir un poste dans l'une des branches de celle-ci, mais alors qu'il pensait atterrir au marketing, le voilà à la rédaction d'un magazine de manga, lui qui n'y connaît rien et cerise sur le gâteau, on lui refile un vieil auteur dont personne ne veut. Une fois de plus, le pouvoir de notre héros se fait très très discret dans la narration et c'est plutôt une banale histoire humaine qui va l'emporter. Ne vous fiez pas à mon ton, j'en suis ravie !

J'ai beaucoup aimé voir les auteurs mettre en avant la relation que Kiwa va tisser avec l'auteur dont il a la charge. J'ai aimé le portrait âpre et rude de celui-ci, auteur sans grand talent, qui a eu la chance de correspondre à quelques modes à l'époque, mais qui est vite retombé en panne d'inspiration, ce qui l'a plongé dans une terrible spirale. Le portrait fait du monde de l'édition est terrible, entre auteur considéré uniquement dans des visées utilitariste, oeuvre dont on se fiche tant qu'elle vend, jeune employé qu'on use jusqu'à la corde et à qui on refourgue les pires missions, auteur lui-même sans inspiration et ambition, etc. Les auteurs n'y vont pas avec le dos de la cuillère et le tableau est fortement à charge.

Heureusement, et c'est tout le sel de ce type de récit, on a la chance dans ce tableau très noir d'avoir un héros qui, lui, est humain et ne laisse pas faire les choses. Son implication, bien qu'elle aille beaucoup trop loin dans le cadre strict du travail, montrant au passage le rapport quasi esclavagiste et bien trop intrusif des japonais à celui-ci, nous démontre qu'il existe des gens humain pour qui les autres comptent, qui ne peuvent ignorer la détresse de leur prochain. Notre héros va ainsi se lancer dans une véritable quête humanitaire avec sa compagne et leur duo sera fort séduisant dans les belles valeurs qu'ils portent et l'énergie qu'ils déploient.

Mon seul regret, encore une fois, l'oublie de l'aspect fantastique du titre, qui était pourtant son point de départ. On nous vend bien une mystérieuse muse pour le mangaka qu'on suit, qui aurait pu être une divinité comme celles tutélaire de Kiwa, mais ce n'est qu'un mirage qu'on perce bien vite à jour. Et c'est au final, un récit plus proche du thriller qui en vient à se dessiner dans les ultimes pages du tome, là aussi prévisible au vu des indices peu subtiles qui avaient été semés, mais on ne boudera pas son plaisir.