L'analyse de Denny Colt des New X-men - Partie 2

Découvrons la suite de l'analyse du run mémorable de Grant Morrison sur les mutants.

SERIENEW X-MEN

SCENARISTEGrant Morrison

édité en France par Panini Comics

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REPRODUCTIONS

 

L'idée politiquement incorrecte est en fait utilisée par Morrison comme une métaphore des pulsions destructrices et de la peur de l'Homme face à ses propres créations et son futur. Les X-Men et les mutants sont des créations artificielles, le gène X étant issu des expositions aux radiations. Dirigés par Xavier, ils prônent l'ouverture et la tolérance. A l'opposé, Sublime et ses sbires contestent le partage de la Terre et réclament leur «droit du sang» fomentant les génocides, la guerre et le rejet de la différence.

 

Morrison critique par là-même la répétition des intrigues de la série et ces affrontements similaires tout en s'inscrivant dans la tradition : lui-même utilise dans «Planète X» des péripéties récurrentes comme le retour de Magneto ou la mort de Marvel Girl transformée en Phénix, l'entité surpuissante, figure de l'arc phare des X-Men de 1981, «La Saga du Phénix Noir» (Uncanny X-Men 129-138).

Même l'idée du futur à éviter de «Déjà demain» provient de cette période co-écrite par Chris Claremont et son dessinateur John Byrne : l'arc «Days of Future Past» (Uncanny X-Men 141-142).

 

Pour autant, Morrison ne se réfère pas qu'aux anciennes sagas des X-Men mais va également s'inspirer d'un autre comic-book mémorable du début des années 80, et concurrent des mutants de Marvel, les New Teen Titans de Marv Wolfman et George Perez. L'un des emprunts les plus flagrants est la trahison d'Esme, une des étudiantes privilégiées d'Emma Frost, les quintuplées surnommées les «Stepford Cuckoos». Esme trahit les X-Men, séduite par Magneto, comme Terra servait d'espionne à l'assassin Deathstroke pour infiltrer les Teen Titans.

 

  

A l'instar des tandems Wolfman & Perez et Claremont & Byrne, Morrison va multiplier les genres au cours de ces arcs : on passe d'un space-opera («Imperial») à un épisode simple intimiste centré sur Xom (le n°127), avant d'entrer dans un thriller horrifique au cours duquel les membres du X-Corps de Paris zombifiés par l'Arme douze affrontent Jean et Fantomex dans l'Euroturmel. Enigmes, intrigues amoureuses, groupement terroriste secret (les U-Men rappelant les hommes demain du H.I.V.E. des Teen Titans), hard SF avec «Le Monde» créateur de super-sentinelles... les aventures des X-Men changent de ton mais gardent comme socle les relations humaines et l'apprentissage de nouveaux héros.

 

Les créations de Morrison pour le titre sont assez nombreuses et répondent à la fois au thème du passage de témoin entre génération et à l'analyse des archétypes de la série. Chaque nouveau membre ou élève renvoie à un X-Man précédent présent ou non dans son run.




Angel est la nouvelle détentrice du pseudo de Warren Worthington, mais c'est également une nouvelle protégée pour Wolverine comme le furent avant elles les adolescentes Kitty Pryde et Jubilee.

 

 

 



Fantomex est un séduisant voleur à l'accent français comme l'était Gambit. Morrison y adjoint un élément atypique : un centre nerveux vivant et androïde, E.V.A. : une nouvelle forme de mutation mi-femme, mi machine.

  




Bec, Barnell Bohusk, au physique d'oiseau, est l'ado hypersensible et mal dans sa peau typique des œuvres de Morrison, mais c'est aussi un miroir pour le Fauve qui y voit ses propres peurs face à son apparence déshumanisée.

 

   


 


Dust qui peut prendre la forme d'une tempête de sable, est une Afhgane recueillie durant la période post-ll septembre, comme Colossus, au corps d'acier, était un équipier russe lors de la période de la Guerre Froide.

 

 

 

 

Les fascinantes télépathes Stepford Cuckoos sont toutes modelées sur leur héroïne, Emma Frost. Mais elles tirent également leur surnom du film (lui-même tiré d'un roman) mettant en scène des «femmes au foyer modèles» robotisées z c'est à la fois un indice de leur appartenance au projet super-sentinelles (elles sont l'arme XIV) et un clin d'œil à leur volonté d'indépendance. Morrison avait d'ailleurs prévu que les initiales de leurs prénoms fassent «S.P.I.C.E.» en hommage au groupe pop représentant du Girl Power, même s'il n'en nomme que quatre au cours des épisodes : Sophie, Phoebe, Céleste et Esme.

  





De la même manière, Quentin Quire chouchou du professeur Xavier qui finit par mener une révolte contre lui, se révèle être un avatar de l'entité cosmique du Phénix, comme avant lui Marvel Girl.

 

 

 

Morrison va même jusqu'à reprendre une idée de la période écrite par Roy Thomas et Arnold Drake, avec l'officier de police, Fred Foster, là où les X-Men d'antan collaboraient avec le F.B.I.

Et, dans le futur de «Déjà Demain», on fait la connaissance furtive de Mer-Max une baleine télépathe et Bumbleboy, seul humanoïde d'un peuple d'insectes, deux figures habituelles chez Morrison. Cette présence de peuplades animales rappelle le monde de Kamandi, le dernier garçon de la terre et le Forager des New Gods, deux créations de Jack Kirby du DC des années 70.

 

On y rencontre également plus longuement Tom Skylark, un humain qui contrôle une Sentinelle et un coup de chapeau à une série Marvel «Sentinel», morte-née au début des années 2000.

 

Leurs ennemis ne sont pas en reste : Sublime, en premier lieu, est un pendant autant sémantique que créatif de Sinistre, le généticien fou qui cherche à cloner le couple Jean/Scott depuis les années 80. Le Sublime c'est également, comme le rappelle artemus dada sur son blog, ce qui s'oppose au sens du merveilleux : la fascination du meurtre présenté comme un art.

 

Et lorsque ce même Sublime investit dans le futur le corps du Fauve et devient une sorte de «Dark Beast», version mauvaise du Dr McCoy venu de l'Ere d'Apocalpyse, autre ligne temporelle alternative. Son aide de camp, Apollyon, est en fait Fantomex transformé par chirurgie, destin tragique qu'avait connu Archangel sous la coupe d'Apocalypse. Quant à l'Arrne Douze, elle menace les X-Men par contrôle mental comme Proteus avant elle.

 


 

LA FIN COMME NOUVEAU COMMENCEMENT

 

Mais toutes ses nouveautés et ses nouveaux élèves resteraient à l'état d'idées mitraillées si le run de Morrison n'aboutissait pas à de profondes remises en question de ses personnages principaux. A contrarie de la tendance des années 90 qui voyaient les séries des X-Men empiler les mystères sans jamais les résoudre, Morrison clôt son passage par des prises de conscience collectives comme individuelles de son quintette d'X-Men.

 

Ici, Cyclope redevient le leader héroïque de l'équipe malgré ses doutes et les tourments que lui avait infligés Apocalypse avant l'arrivée de Morrison. Ce dernier reprend une idée avortée de Nicieza, la tentation de l'adultère de Scott Summers. Il choisit enfin entre Emma et sa femme Jean qui assume la fin de son mariage et sa mission de juge cosmique, en tant que Phénix.

 

 

Le Fauve se réhabitue à son nouveau corps comme il avait surmonté ses mutations précédentes. Wolverine fait face à sa nature de Super-Sentinelle. Et Emma Frost laisse enfin tomber le masque et son enveloppe froide et cynique en tombant dans les bras de Scott Surnmers et en rejoignant l'équipe. Même Xavier se surpasse en révélant au monde sa nature de mutant.

Comme toute évolution celle-ci se fait à coups de sacrifice : Jean meurt, Magneto également, tout commence avec le massacre de Genosha et finit avec l’annihilation de la ligne temporelle de «Déjà demain». Enfin, le statu quo n'est plus car Xavier cède sa place à Scott et Emma à la tête de l'institut.


 Une mort qui restera gravées dans les annales

 

Les New X-Men de Morrison représentent donc des agents du changement, de l'évolution et de l'adaptation. Comme les Stepford Cuckoos l’annoncent à Quentin Quire, ce n'est plus l'anarchie contre l'ordre, l'expérience contre la jeunesse mais «qui est in ? Qui est out ?». Comme la Doom Patrol au début des années 90, les X-Men, leurs concepts et thématiques épousent parfaitement les différentes obsessions et approches de Morrison.


La suite et fin de l’analyse lors du prochain épisode qui abordera les autres thèmes abordés dans ce run notamment l'aspect du sexe et de la violence.

Source:

Yann Graff est l'auteur du livre Grant Morrison: Revolution! paru chez les Moutons Electriques.

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