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Critique de Histoires de guerre #1

par MassLunar le dim. 19 sept. 2021 Staff

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Le Vin de Verdun... coupé avec de l'eau

Pinard de Guerre est le premier tome d'une série consacrée... à la guerre dans la collection Grand Angle de chez Bamboo. A priori, chaque album de cette collection sera indépendant et focalisé sur un thème précis différent durant la période de la Grande Guerre. Ce premier volume scénarisé par Philippe Pelaez ( Puisqu'il faut des hommes, Un peu de tarte aux épinards...) et dessiné par Francis Porcel ( Les folies bergères, Les mentors...) est donc centré sur le vin de guerre: ce  breuvage couleur sang qui animait l'ardeur des soldats entre deux tranchés.

La première de couverture est alléchante. Au premier plan, nous avons Ferdinand le héros cynique de cette histoire assis contre des tonneaux de vins percés par les balles dont le liquide rouge sang s'écoule au cœur d'une tranchée. 

Durant la Grande Guerre, le vin fait oublier, le vin stimule, le vin calme... Peu importe sa qualité et ses additifs douteux, le pinard de guerre est le véritable compagnon des damnés des tranchés. 

Avec un personnage principal peu scrupuleux dans la lignée de ces antihéros cynique façon Lord of war et une thématique bien ciblé tel que le vin, on pouvait s'attendre à une bd au caractère bien affirmée... Malheureusement, il n'en est rien. Ce pinard de guerre est coupé avec beaucoup d'eau trop d'eau pour nous enivrer complètement.

Le début est pourtant prometteur. Le lecteur est bien plongé dans l'atmosphère étouffante de Verdun que ce soit sur le terrain ou dans le quartier des généraux, les couleurs froides, ocres, le dessin de Porcel peu affiné au niveau des personnages mais avec du caractère nous immergent sans problèmes au coeur des tranchés. Au niveau de la forme, le résultat aurait pu être davantage conventionnel avec une colorisation et un style dans la lignée habituelles des bande dessinés consacrées aux tranchées et à la Grande Guerre. Dans l'ensemble, Pinard de Guerre demeure dans une représentation habituelle à une exception faite : le personnage de Ferdinand Tirancourt...

Cynique, féroce, sans aucun scrupule, ce fournisseur de vin frelaté, cet escroc traine son costume orange derrière les tranchées se faisant passer pour un infirme... Il vend son vin au litre à un prix plus chère et assume totalement ses actes. Plutôt intéressant, le héros de cette histoire se démarque aussi au niveau du style. Souvent affublé d'un costume orange qui détonne un peu (du moins dans un premier temps) , il est l'incarnation des profiteurs de l'effort de guerre. Cynique et désabusé, c'est à travers son point de vue que nous suivons une partie du trafic de la vinasse jusque dans les tranchées et son effet sur les soldats. 

Dès la première page, nous voyons un pauvre bougre accroché à des barbelés qui tentent de prévenir ses collèges alors abrités une dizaine de mètres plus loin derrière une tranchée. Abrutis par le vin, ils n'entendent pas les appels à l'aide qui se clôturent sur un implacable coup de feu. Cette implacable par la voix de notre antihéros qui déclame : " Le sang du soldat a coulé et il a une belle couleur bordeaux".

Dès la première de couv', la fusion entre le sang du soldat et la robe du vin provoque son petit effet. Avant que leur propre sang coule, les soldats ingurgitaient le sang de la terre bon gré, mal gré...

Pinard de guerre réussit son entrée en matière mais malheureusement à partir du moment où notre antihéros se retrouve piégé en cours d'album au cœur des tranchées, toute l'intrigue perd aussitôt de sa saveur. Et c'est vraiment dommage.

L'antihéros, lui-même ancien soldat, se découvre une conscience, contemple l'effet de son vin et surtout malgré tout le réconfort qu'il apporte à ces soldats. De ce fait, l'antihéros devient un héros et va multiplier les actes héroïques. Le pinard, alors bien présent, dans les premières pages devient secondaire face à une intrigue se résumant en une simple histoire de guerre. Sans doute, cette baisse de qualité à mi-chemin s'explique par le format classique de cette bande dessinée de 55 pages qui ne permet pas d'allonger ce revirement, d'étoffer davantage ce cynisme... Pinard de guerre aurait mérité davantage d'ambition. Ce volume aurait mérité de nous offrir un plus beau salaud qui aurait pu gagner quelques nuances tout en restant un bel antihéros mais ce n'est pas le cas. L'escroc est un personnage meurtrie par la guerre comme les autres , au final, c'est un brave.

C'est une direction scénaristique voulue mais qui prive cette bd d'une véritable saveur. Un manque d'audace certain. 

De plus, histoire de se rattraper vu que nous perdons de vue la thématique du vin, les auteurs et éditeurs nous incrustent l'habituel petit dossier explicatif en fin de volume sur le pinard de guerre. Certes, c'est intéressant mais en même temps quel dommage de ne pas avoir donner plus de corps à ce vin au coeur même de l'intrigue... Je suis parfois fatigué par ces dossiers explicatifs qui remplacent quelques pages de bd.

Pinard de guerre aurait gagné à être un album plus ambitieux mais en raison du format un peu court, le revirement scénaristique fait perdre toute sa saveur à un récit de guerre frontal. Au final, nous avons véritablement affaire à un petit "pinard" de bd historique.

En bref

Pinard de guerre est une déception qui joue d'abord le ton de l'irrévérence avant de se conformer en une banale bd de guerre qui éclipse donc sa férocité première, voire même son thème principal. Vite bu, vite lu...

4
Positif

Une entrée en matière réussie avec un bon antihéros

La qualité de l''argot

Bonne immersion

Negatif

...Une bd de guerre qui perd de sa férocité

Le sujet du vin au final peu étoffé malgré la présence ( trop didactique) de l'habituel petit dossier explicatif en fin de volume...

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