On aurait aimé l'aimer un peu plus.

Des entités gigantesques, du bon gros Space Opera qui tache et un titre énigmatique qui attire la rétine : il n'en fallait pas plus pour que ce We Only Find Them When They're Dead fasse son trou au milieu des titres indés attendus. Si on ajoute à cela, Al Ewing et Simone Di Meo en maitre d'oeuvre, on est quand même en droit d'en attendre quelque chose. Ah bah ça, attendre, on peut. Obtenir, c'est déjà plus compliqué. 

Bon, petit résumé ? WOFTWTD (ouais, on va gagner un peu de temps) est un Space Opera qui prend place en 2367. Ce futur proche est presque semblable à notre époque : les humains existent toujours, la technologie évolue constamment et Dupont-Aignan est encore à 2%. Bref, la routine...

Enfin, à ceci près que les humains ont épuisé leurs ressources et qu'ils arpentent l'espace en quête de vivres et de matières premières. Mais dans l'espace, point de Biocoop alors les humains se ravitaillent en traquant des «dieux», des êtres gigantesques dont les cadavres jonchent l'espace et que les humains traquent pour combler leur apport journalier en macro-nutriments.

Au milieu de tout ça, on suit le Vihan II, un des nombreux vaisseaux à farfouiller l'univers en quête de ces dieux morts. À sa barre, on retrouve Georges Malik, chef de l'équipage et qui clairement caresse un autre espoir que simplement trouver de la viande : il veut voir un dieu vivant et en profiter pour se tirer de ce bourbier.

Parce que oui, on imagine facilement que cette société où l'humain est devenu un nomade précaire est tout sauf un camp de vacances. Les dieux et les ressources ne courent pas le cosmos. Chaque chasse est encadrée et chaque ravitaillement est rationné par une milice qui n'hésitera pas à fusiller quiconque tentera de piquer une entrecôte sur l'étalage.

Totalitarisme, autoritarisme, précarité, bref, on comprend Georges Malik qui va tenter avec son équipage de partir à l'aventure et ainsi, tenter s'émanciper d'une société de la disette, qui vit sur la mort de titans que personne n'a jamais vu vivant. Et à ce moment là, les hypokhâgneux  de la salle auront fait le lien avec le titre de l'oeuvre que ne m'amuserai pas à réécrire. Pour le pitch, on va s'arrêter là, sinon je spoile. J'en parlais plus haut, j'aurais aimé adorer ce bouquin. La promesse est alléchante : l'immensité de l'espace, un climat social houleux et des cadavres de dieux qui servent de buffet froid. Mais, en réalité, ces premiers chapitres ne traitent pas directement de l'univers ni de la problématique énoncée dans le titre de l'oeuvre. Ces premiers numéros s'attardent surtout sur Georges Malik, son passé, et ce qui le pousse à vouloir fuir. Au menu, moults flashback qui permettent d'en apprendre plus sur le background du personnage et de comprendre son cheminement de pensée, son laconisme et sa taciturnité.


À propos de flashback, on retiendra une planche très astucieuse. Une sorte de gaufrier où chaque case nous transporte dans une époque différente. Très rapidement et sans trop de dialogue, les auteurs parviennent à nous expliquer un fil de causes et de conséquences qui qui s'étirent a travers le temps. Malin !


Bien que l'on pourrait regretter la direction de Ewing à vouloir s'engouffrer dans une histoire de rédemption un peu classique, le récit n'en demeure pas moins très bien mené. Ce tome 1 est un page-turner, une sorte de fuite effréné qui arrive à maintenir le lecteur en haleine jusqu'à la résolution de l'intrigue. Les planches sont dynamiques mais souffrent d'un sur-découpage qui complexifie la lisibilité. Même si l'on pourrait pester à juste titre sur ces coups de cisailles, on comprend rapidement la volonté narrative sous-jacente. À savoir, faire de ce WOFTWTD un huis clos.

L'espace réduit du vaisseau dans lequel l'équipage évolue est exacerbée par l'exiguïté des cases et le sur-découpage. On ne respire pas, ni dans le vaisseau où la promiscuité est forcée fardeau, ni dans cette société oppressante et ni dans les planches.

Parlons un petit peu du dessin. Sans trop m'étaler, c'est un peu comme passer 3h à faire un boeuf Bourguignon et à la toute fin de cuisson, ajouter 3 litres de javel. C'est un peu frustrant disons... Le trait est soigné, les dieux sont merveilleusement bien mis en scène mais la colorisation vient tout gâcher. Des aplats de couleurs vives et numériques qui cassent la grâce de l'espace et qui rendent l'action brouillonne et les visages vaporeux. Dernière remarque en ergoteur que je suis : la résolution de l'intrigue. Sans rien en dire, la fin de ce premier tome dévoile une révélation, fruit d'une intrigue qui était jusqu'alors rondement mené par l'auteur. En revanche, quand il s'agit de la dévoiler, la subtilité se volatilise. Le récit qui était jusque là habile, offre son coeur brutalement, par le biais d'un monologue de Georges Malik qui se mue en SAV du scénariste en s'assurant de bien expliquer les tenants et les aboutissants de l'histoire.

C'est regrettable, d'autant plus qu' Al Ewing avait fait confiance aux lecteurs tout au long du récit pour lire entre les lignes. Mais à la fin, il a craqué et il s'est surement dit "Ouais, il y a quand même 2% de la population qui votent comme des cons, on ne va pas prendre de risques". La tentation de faire expliquer son intrigue par ses personnages est une facilité narrative que beaucoup d'auteurs adoptent. D'ailleurs, Alexandre Astier en parle dans une interview chez Konbini et c'est hyper intéressant. Comme souvent avec monsieur Astier vous me direz. (https://youtu.be/sr_A6DBkMFk)



En bref

Ce We Only Find Them When They're Dead est plutôt une bonne lecture, saccagé par le besoin d'absolument tout expliquer et une colorisation à la limite du délit visuel. Le tout reste solide, porté par un univers que l'on a envie d'explorer et un propos politique et social qui donne de l'épaisseur au récit.

6
Positif

- C'est globalement bien mené

- Un univers qui peut devenir riche

- Le mystère des dieux très bien entretenu

- Le dessin.

Negatif

- Le décalage entre ce qui est "vendu" et ce qui est proposé

- Les couleurs issues de la gamme "Luminaires Fiesta" de chez La Foir'Fouille

- Une révélation d'intrigue un peu lourdingue.

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