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Critique de Blue period #11

par Tampopo24 le sam. 5 nov. 2022 Staff

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Psychanalyse freudienne et artistique

Quel tome, bon sang, quel tome ! Même si je dois me faire une raison sur la narration poussive de Tsubasa Yamaguchi, qui je crois me suivra tout au long de la série, en revanche elle n'a pas sa pareille pour aborder avec brio les sujets autour de l'art et c'est un régal !

J'ai été bluffée par la richesse de ce tome où le héros prend un virage surprenant pour tenter de se changer les idées après sa dépressive première année dans son école d'art. Pour retrouver la foi, pour retrouver le goût à la peinture et à la création, il a besoin de couper et étant passée par là moi aussi, je ne peux que le comprendre. L'autrice en ce sens joue très bien la carte du réalisme.

Yatora se retrouve donc à travailler dans une petite école privée d'art tenue par son ancienne prof de lycée. Le monde est petit ! Et alors que je ne le voyais pas dans ce rôle, que je me demandais ce que ce détour allait pouvoir nous apporter, j'ai eu l'impression de me retrouver devant l'un des meilleurs tomes de la série ! Peut-être est-ce parce que moi-même je travaille comme enseignante avec des enfants de cet âge mais toutes les thématiques abordées autour d'eux m'ont parlé, tant elle touchait à l'essence même de l'art, sa réception et sa pratique par les plus jeunes et les conséquences sur leur moi adulte. Excellent !

Même si je n'aime toujours pas la narration de l'autrice qui nous balance de trop gros bloc d'information sur un ton tout sauf narratif mais avec une didactique bien trop frontale, à l'ancienne, j'ai quand même pris énormément de plaisir ici. J'ai aimé la façon dont elle va répondre aux interrogations sur Picasso, cet artiste toujours aussi clivant, qui certes fut un génie, mais dont tout le monde est loin d'apprécier les tableaux tant ils bousculent les codes. Avec lui, j'ai apprécié la façon dont elle décortique notre réception d'une oeuvre, d'un artiste et d'un homme et nous invite à la fois à réfléchir face aux oeuvres et à se documenter sur leur histoire. Elle met ainsi joliment en avant la figure d'Hashida, qui va nous accompagner pendant tout le tome.

Ce dernier n'est pas moins perdu que Yatora et tout deux vont projeter à leur façon leurs fragilités sur leurs élèves sans le vouloir, mais ce qui les aidera aussi à se retrouver, du moins ce qui les aidera à voir une nouvelle voie s'ouvrir. J'ai beaucoup aimé tout ce qui a tourné autour de la transmission des savoirs ici, des savoirs pratiques certes, mais des savoirs être également qui vont touchés à l'intime des élèves. Ainsi, on découvre que les qualités d'observateur de Yatora et Hashida, bien que différentes, l'un étant plus centré sur l'humain et l'autre sur les oeuvres, permettront tout de même d'aider ces élèves parfois en perdition.

Ce fut fascinant de voir la façon dont Yatora a fini par réussir à aider Shôya, l'élément perturbateur du groupe. L'autrice nous montre que ça n'a rien de simple, qu'il n'y a pas de réponse toute faite, qu'il y a aussi parfois une multitude de cause et qu'il faut juste savoir être à l'écoute et trouver la bonne porte d'entrée, ce qui peut prendre du temps. De la même façon, j'ai trouvé bien trouvé et inattendu de voir l'autrice pointer du doigt celle qui semblait la plus douée, Kie, pour montrer la crise existentielle qu'elle vit et qui se reflète dans son art. C'était assez déchirant dans les deux cas et l'autrice, même si elle pointe leurs défaillances, est restée assez soft sur la responsabilité des parents dans tout cela ainsi que des adultes autour d'eux, mais elle montre bien que c'est important de faire attention avec eux car c'est ce qui les construira plus tard.

J'ai de cette façon trouvé logique de voir Yatora transposer tout ce qu'il voyait pour tenter de mieux se comprendre. Ainsi, c'était intéressant de voir la façon dont les enseignants travaillaient avec les plus jeunes pour leur faire conserver leur passion, leur audace et leur imagination sans les brider, pour ne pas braquer les adultes qu'ils seront. J'ai retrouvé pas mal d'expériences personnelles de mon travail avec les enfants ici, sur le fait de ne pas interpréter leurs dessins, pas imposer des techniques et couleurs en faisant à leur place, sur le fait d'accepter toutes les formes d'art et d'accompagner les passions parfois extérieures des enfants pour les y intégrer, sur le fait d'oser sortir de la salle et du cadre. C'est très enrichissant et soit l'autrice a été enseignante soit elle s'est bien documentée parce que ça fait plus vrai que vrai !

En bref

Excellent tome pour enfin sortir de la spirale dépressive de Yatora et tenter de redonner le goût et l'envie au héros, l'autrice part, tel un psychanalyste, sur les traces de l'enfance de celui-ci à travers ces rencontres et ce travail avec les plus jeunes. Ce fut éclairant, lumineux, très instructif également et on a fait des rencontres fortes avec des jeunes enfants en souffrance pour lesquels l'art n'est pas toujours la réponse et qui ont juste besoin de la bonne oreille attentive. Excellent ! Je regrette juste que l'autrice ne soit pas allée jusqu'au bout dans le traitement trop superficiel du rôle des parents dans tout ça, car on sent à quel point la pression qu'ils mettent sur leurs enfants a un impact ici, et ce serait un bon moyen de le dénoncer plutôt que de le mettre sous le tapis... Un des meilleurs tomes que j'ai lu !

8
Positif

Une plongée surprenante dans les coulisses de la création et l'âme des créateurs

Un focus très intéressant sur l'enseignement de l'art aux plus jeunes

Une autrice bien renseignée sur l'enseignement

Des héros qui se cherchent en revenant aux sources

Des focus sur des enfants en souffrance poignant

Des thématiques à nouveau très riches et percutantes

Negatif

Une narration toujours très poussive

Une autrice qui ne sait pas communiquer ses idées sans gros pavés lourds à lire

Un développement inabouti autour de la pression parentale

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