J’ai vécu quelques temps en Normandie. J’ai pu voir ces vastes cimetières aux croix blanches. J’ai pu revivre aussi, par la voix d’un historien amateur, une part de cette terrible bataille de Normandie, prendre pied dans un trou, cache ou trace d’explosion, regarder avec circonspection des reliques, armes uniformes, casques, d’un autre temps qui est pourtant le notre. Ce tome 4 nous fait partager toutes les dimensions de la bataille de Normandie, dans ce qu’elle a de libération et de boucherie sans nom. On avait laissé Gavin devant une tombe renfermant son amour d’enfance. On le suit dans la guerre, au fil des évènements qu’il traverse non sans dommage. On croise aussi les personnages du premier diptyque, simples figurants qui pourtant tissent un bien entre les deux histoires, différentes et proches. Il se mêle dans les récits de Jarbinet le romantisme d’une aventure sentimentale, renforcée par la douceur des traits et du dessin à la Servais, et le constat du vingtième siècle qui aura fait disparaitre des millions d’êtres humains dans des combats au sens discutable. L’histoire, comme le montre la planche de fin, n’étant qu’un perpétuel recommencement, d’autres cadavres joncheront certainement le passage à l’âge adulte à la maturité de l’humanité. Ce diptyque est très bien fait, comme l’ensemble de la série et c’est un plaisir de le lire.